Drapeaux étrangers : un arrêté "inutile" voire "xénophobe"

Publié le 1 juillet 2014 à 12h18
Drapeaux étrangers : un arrêté "inutile" voire "xénophobe"

POLEMIQUE – L'arrêté municipal signé par le maire de Nice, pour interdire dans le centre de la commune "l’utilisation ostentatoire et générant un trouble à l’ordre public des drapeaux de nationalité étrangère", est un Ovni juridique selon plusieurs experts contactés par metronews.

"C'est une mesure réellement symbolique et xénophobe". Maître Sefen Guez Guez n'est pas tendre avec le dernier arrêté municipal signé par le maire de Nice , Christian Estrosi. Cet avocat niçois, qui défendait en janvier l'agent de sûreté musulman de l'aéroport de Nice suspendu pour radicalisme religieux, a déposé ce mardi un référé suspension contre l'arrêté interdisant durant le Mondial "l’utilisation ostentatoire et générant un trouble à l’ordre public des drapeaux de nationalité étrangère". "Le maire a un pouvoir de police mais il y a des limites à ce pouvoir : on ne peut pas restreindre de manière abusive les libertés" explique Me Guez Guez à metronews.

"C'est typiquement un cas pratique que je pourrais donner dans mon cours de droit administratif à mes étudiants de deuxième année" glisse Christian Vallar, le doyen de la fac de droit de Nice et professeur agrégé de droit public. "Sur le fond, ce texte est fondé sur le pouvoir de police du maire, ce qui est classique. L'interdiction est limitée géographiquement et dans le temps, donc à ce niveau il ne pose pas de difficulté juridique" assure Christian Vallar. Les services de la ville de Nice ont bien retenu la leçon depuis l'annulation l'arrêté sur les "épiceries de nuit" en 2010 .

"Un drapeau est en lui-même un signe ostentatoire"

L'arrêté signé par Christian Estrosi n'en reste pas moins un Ovni juridique. "Impressionné" par le nombre de "considérants" (11 au total) en préambule de l'arrêté municipal, le professeur Vallar avoue qu'il ne connaît "aucun autre texte en France évoquant l'usage ostentatoire d'un drapeau générant un trouble à l'ordre public. Le tribunal administratif de Nice devra définir le caractère ostentatoire de l'utilisation d'un drapeau".

Or, il n'en existe pas de définition juridique. "Un drapeau est en lui-même un signe ostentatoire", estiment tous les juristes contactés par metronews. Pour un spécialiste du droit administratif, "cet arrêté est surtout inutile dans la mesure où lorsque survient un trouble à l'ordre public la police doit intervenir. Si le but est en revanche de viser précisément un drapeau, comme celui de l'Algérie par exemple, il s'agit de discrimination". Le tribunal administratif a 48 heures pour se prononcer sur le référé déposé par maître Guez Guez, en attendant un éventuel jugement sur le fond de l'affaire.


La rédaction de TF1info

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