Notre-Dame-des-Landes : retour sur une évacuation sous haute tension

Publié le 9 avril 2018 à 20h17, mis à jour le 10 avril 2018 à 11h36
Notre-Dame-des-Landes : retour sur une évacuation sous haute tension
Source : LOIC VENANCE / AFP

ÉVACUATION - Près de trois mois après l'abandon du projet d'aéroport à Notre-Dame-des-Landes, une opération massive d'expulsions, avec près de 2500 gendarmes, a débuté lundi à l'aube pour déloger les occupants illégaux de la ZAD. Ce mardi, de nouveaux heurts ont éclaté entre forces de l'ordre et zadistes.

Malgré les nombreux affrontements avec les forces de l'ordre, la, préfète de Loire-Atlantique, Nicole Klein est satisfaite. L'opération de démantèlement de la "zone à défendre" de Notre-Dame-des-Landes, où le gouvernement a renoncé à construire un aéroport, est un succès, a-t-elle déclaré ce lundi en fin d'après-midi. "L'objectif est presque atteint [...] cela a été plus rapide que ce qu'on pensait", a-t-elle ajouté.

Lancée aux premières heures de la journée, l'opération s'est concentrée sur les abords de la route D281, l'ex-route "des 

chicanes". Elle mobilise de 2200 à 2500 gendarmes à l'intérieur et à la périphérie de la zone, et a permis d'évacuer "13 squats, dont six ont d'ores et déjà été détruits, et dix personnes ont été expulsées", a-t-elle précisé en fin d'après-midi. "Les opérations se poursuivront dans les prochains jours", a-t-elle expliqué soulignant que, en cas de tentatives de réoccupation des lieux dans les semaines à venir, "les forces de l'ordre interviendraient sans délai pour y mettre un terme". De fait, ce mardi, alors que les évacuations ont continué, de nouveaux heurts ont éclaté entre zadistes et forces de l'ordre

• Les "lieux de vie" démantelés

Les services de l’Etat se sont donné pour objectif de démolir 40 des 97 "lieux de vie" occupés par les militants présents dans la "Zone à défendre" (ZAD) : ils seraient situés trop près de la route départementale D281 et leurs occupants n'auraient pas déposé de dossier de projet agricole individuel. Le survol aérien de la zone a été interdit jusqu'à vendredi prochain.

L'opération a donné lieu à des heurts, notamment au lieu-dit "les fosses noires", au sud-ouest de la D281, où les gendarmes ont répliqué par des tirs de grenades lacrymogènes et assourdissantes à des jets de projectiles, notamment des pierres. Un gendarme a été légèrement blessé à l’œil par un tir de fusée mais il est déjà sorti de l'hôpital, a dit Nicole Klein.  

En milieu de matinée, des engins de chantiers sont arrivés sur la D281. Le mirador et le chapiteau du "Lama fâché", au bord de la départementale, ont été détruits par deux pelleteuses.  Un peu plus tard c'est le squat des "100 noms" dont les résidents ont été expulsés. Les gendarmes ont dû déloger plusieurs dizaines de zadistes venus s'opposer pacifiquement à la destruction du lieu, notamment en grimpant sur le toit, a constaté l'AFP.

Après les "100 noms", les gendarmes mobiles se sont positionnés devant le lieu-dit "Le Vrai rouge", entre la RD281 et les Fosses noires. Au "Vrai rouge", selon Copain 44, plusieurs dizaines de militants de toutes composantes ont formé une chaîne humaine devant une cabane, se passant des palettes de bois, roues de vélos, chaises, table qu'ils déposaient devant une barricade, derrière laquelle attendaient des gendarmes mobiles, la visière baissée. Beaucoup se sont assis dans le potager. Trois militants tenaient des pancartes "Attention plantes carnivores".

• Les interpellations

Bilan : sept personnes ont été interpellées, dont une pour violence sur agent de la force publique. Elle a été placée en garde à vue à Saint-Nazaire. Six autres personnes l'ont été après avoir été interpellées dans le cadre d'un contrôle d'identité en périphérie de la zone pour transport d'armes prohibées, conduite sous emprise de l'alcool ou parce qu'elles faisaient l'objet de fiches de recherches, a encore dit la préfète.

Les zadistes s'élèvent contre l'opération et demandent à tous leurs sympathisants de venir les rejoindre. "Nous appelons toutes celles et ceux qui peuvent nous rejoindre dès maintenant ou dans les prochains jours à venir sur la ZAD", ont-ils lancé.  "On appelle au calme et à l'apaisement. [...] On ne peut pas faire autrement, avec la posture radicale du gouvernement et la posture radicale de certains habitants de la ZAD", a déclaré pour sa part Julien Durand, porte-parole de l'Acipa, association historique des opposants à l'aéroport.

A 18H, les Zadistes dressent un bilan de la journée

• Les arguments du gouvernement

Dans un communiqué, le ministère de l'Intérieur explique qu'"il s’agit de mettre fin à la zone de non-droit". Il rappelle que les occupants de la ZAD qui ont accepté le dialogue avec les pouvoirs publics dans la perspective d'un projet agricole légal et de la régularisation de leur situation avaient "le soutien du gouvernement".

La quasi totalité des 250 zadistes estimés sur place ne l'ont pas fait, préférant une gestion collective du territoire et la possibilité de mener des projets non agricoles. "Nous faisons des sommations légales et donc si les gens quittent leur domicile, ils sont libres d'aller ailleurs [...] Il ne s'agit pas pour nous d'arrêter, sauf ceux, évidemment, qui passeraient à des actes de violence", a ajouté Gérard Collomb.

Le ministre de l'Intérieur a précisé que des forces de l'ordre seraient maintenues sur place "tant qu'il sera nécessaire" pour prévenir le retour d'occupants illégaux. Près de trois mois après l'abandon du projet d'aéroport, un certain nombre de "zadistes" s'accrochent à l'idée d'une solution collective, comme celle qui avait été mise en oeuvre en 1984 sur le plateau du Larzac après l'abandon d'un projet d'extension de camp militaire.


Virginie FAUROUX

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