ART – L’artiste qui a peint un œil tourné vers l’horizon sur un bunker normand en bord de mer a décidé de fermer ce regard. Et ses raisons font réfléchir.
La pupille claire, monumentale, regarde l’horizon depuis près de deux ans déjà. Graffée sur un bunker de la Seconde Guerre mondiale en bord de mer, cette œuvre poétique baptisée The Eye a ému le monde entier. Mais après avoir résisté contre vents et marrées, l’œil de Siouville-Hague en Normandie s’est finalement fermé.
"En effaçant ce graff je voulais un peu interroger le rapport au temps, le ‘j’irais voir, j’irais faire demain’."
Cyrille Corlays alias Näutil, graffeur
L’œil s’est fermé par étapes. L’artiste, Cyrille Corlays alias Näutil, a d’abord représenté un regard mi-clos, puis baisseé complètement les cils pour tirer le rideau sur son œuvre. Il explique les raisons de son choix sur sa page Facebook, dans un message du 11 octobre : "En effaçant ce graff je voulais un peu interroger le rapport au temps, le ‘j’irais voir, j’irais faire demain’ […] (je sais que plein de gens ont eu envie d’aller le voir et ont reporté à plus tard)."
En plus de cette leçon sur le temps, l’artiste de 40 ans affirme que son geste relève d’une philosophie de son art, par nature changeant et éphémère. Dans un message du 16 octobre, le graffeur a même posté une image de l'oeil effacé, laissant place nette pour les autres artistes. "La destinée du graff c’est de laisser la place, de se stratifier comme les couches de terre en géologie : un, puis un, puis encore un autre après lui", affirme-t-il. Tout en légèreté, il conclut : "Adios l’œil".