Affaire Windrush : comment un scandale lié à l'immigration a forcé la ministre de l'Intérieur britannique à démissionner

Publié le 30 avril 2018 à 19h12
Affaire Windrush : comment un scandale lié à l'immigration a forcé la ministre de l'Intérieur britannique à démissionner
Source : Daniel LEAL-OLIVAS / AFP

OUT - La ministre de l'Intérieur britannique Amber Rudd a démissionné dimanche 29 avril, à cause d'un projet d'expulsion d'immigrés du Commonwealth, arrivés légalement après la Seconde Guerre mondiale pour reconstruire le Royaume-Uni.

Le Royaume-Uni est actuellement secoué par un scandale dont les racines remontent à 70 ans. Son nom : le scandale Windrush. C'est à cause de cette affaire que la ministre de l'Intérieur britannique, Amber Rudd, a présenté dimanche sa démission à la Première ministre britannique Theresa May, qui l'a acceptée. Lundi, elle a été remplacée par le ministre des Communautés, Sajid Javid.

Amber Rudd était sous pression depuis la révélation par le quotidien The Guardian de la responsabilité de Theresa May dans le scandale Windrush, qui a conduit des milliers d'immigrés venus légalement du Commonwealth et présents depuis plusieurs décennies sur le sol britannique à être menacés d'expulsion, mais aussi privés de soins médicaux ou de domicile.

Des immigrés venus reconstruire le Royaume-Uni

Pour comprendre ce scandale, il faut revenir aux années qui suivent la Seconde Guerre mondiale. En 1948, le Royaume-Uni, en pleine reconstruction, a d'immenses besoins en main d'oeuvre et invite des centaines de milliers d'immigrés venus de pays du Commonwealth, notamment de Jamaïque et des autres Antilles britanniques, à venir travailler dans le pays. Ceux qui n'avaient pas déjà la nationalité britannique bénéficient pour cela d'un droit d'installation au Royaume-Uni.

Plus de 500.000 Caribéens ont ainsi débarqué au Royaume-Uni à partir de 1948. Ils ont été surnommés la "génération Windrush", du nom de l'Empire Windrush, le premier bateau transportant des Jamaïcains à avoir accosté près de Londres. En 1971, une loi sur l'immigration supprime ce droit au séjour pour le ressortissants du Commonwealth à partir du 1er janvier 1973. Sauf que certains n'ont jamais effectué les démarches pour obtenir les papiers qui attestent de leur situation. En effet, il n'est pas obligatoire d'avoir une carte d'identité au Royaume-Uni, et le passeport ne sert qu'en cas de voyage hors du territoire. 

La "génération Windrush" assimilée aux immigrés clandestins

Le ministère de l'Intérieur n'ayant pas recensé tous ces immigrés considérés comme légaux, beaucoup d'entre eux ont poursuivi leur vie au Royaume-Uni sans les papiers qui attestent de leur situation. Une situation qui ne posait de problème particulier... Jusqu'en 2013. 

Cette année-là, le gouvernement met en place une politique beaucoup plus répressive envers les immigrés. Theresa May, l'actuelle Première ministre, est alors ministre de l'Intérieur. Son objectif : créer un "environnement hostile" aux immigrés clandestins. Pour cela, propriétaires, employeurs et médecins sont incités à dénoncer ces immigrés illégaux sous peine d'amende. De nombreux membres de la "génération Windrush" sont ainsi dénoncés, mais ne peuvent pas justifier de leur situation. Certains sont licenciés, d'autres menacés d'expulsion ou privés de soins médicaux.

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Theresa May fragilisée à quelques jours des élections locales

En mars, après de premières révélations du Guardian, le scandale prend de l'ampleur. Puis Theresa May refuse le 10 avril, à quelques jours d'un sommet du Commonwealth, de recevoir des ambassadeurs de 12 pays concernés par le problème. Malgré ses excuses, les protestations continuent.

Quant à la ministre de l'Intérieur Amber Rudd, elle avait annoncé "profondément regretter" cette situation et évoqué "l'importante contribution de la génération Windrush". Mais le Guardian a publié de nouvelles révélations concernant des quotas d'immigrés à expulser, fixés par le ministère de l'Intérieur. Amber Rudd a nié devant les parlementaires avoir été au courant de ces quotas, avant que le quotidien britannique ne publie une lettre, signée par la ministre, promettant à Theresa May une hausse de 10% des expulsions.

Accusée d'avoir caché l'existence de ces quotas et d'avoir menti aux parlementaires, Amber Rudd est finalement contrainte de présenter sa démission le 29 avril. Le tout à quelques jours des élections locales, qui ont lieu le jeudi 3 mai. 


La rédaction de TF1info

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