Afrique du Sud, Burundi, et maintenant Gambie : pourquoi les pays africains claquent la porte de la CPI

Publié le 26 octobre 2016 à 16h44, mis à jour le 31 octobre 2016 à 23h14
Afrique du Sud, Burundi, et maintenant Gambie : pourquoi les pays africains claquent la porte de la CPI
Source : ONESPHORE NIBIGIRA / AFP

OUT - La Gambie a annoncé dans la nuit de mardi son retrait de la Cour pénale internationale (CPI), imitant ainsi l’Afrique du Sud et le Burundi. D’autres pays du continent pourraient suivre. LCI vous explique pourquoi.

La Cour pénale internationale (CPI) fait en ce moment face à des perturbations en Afrique. Et c’est peu dire : après le Burundi et l’Afrique du Sud, la Gambie a annoncé mardi soir son retrait de l’institution juridique instaurée en 1998 par le Statut de Rome. D’autres pays du continent pourraient les imiter. Le Kenya, l'Ouganda ou la Namibie ont par exemple déjà suggéré l’idée. 

Pourquoi ces retraits ? Les trois pays reprochent à la CPI de concentrer essentiellement ses efforts sur l'Afrique. Et de fait : sur les dix enquêtes ouvertes par l'institution depuis son entrée en fonction en 2003, neuf concernent des pays africains. La première hors du continent, sur la guerre d’août 2008 entre la Géorgie et la Russie en Ossétie du Sud, n’a été lancée qu’en janvier dernier.

La Gambie évoque "une sorte de chasse raciale"

"Nous avons entamé le processus prescrit par le statut fondateur pour nous retirer", a indiqué dans la nuit de mardi à mercredi le ministre gambien de l'Information Sheriff Bojang. Cette procédure est prévue pour durer un an à compter de la réception par le secrétaire général de l’ONU de la notification de retrait. 

Reprenant les griefs de l'Union africaine (UA), qui parle d’une "sorte de chasse raciale", le ministre a accusé la CPI de "persécution envers les Africains, en particulier leurs dirigeants", alors que, selon lui, "au moins 30 pays occidentaux ont commis des crimes de guerre" depuis la création de cette juridiction, sans jamais être inquiétés. 

L’exemple (inadéquat) de la Syrie

L’exemple de la Syrie, où le régime et son allié russe mènent d’intenses bombardements, est souvent cité en exemple pour évoquer l’inaction de la CPI hors d’Afrique. Mais l’institution ne peut entrer en action de son propre chef qu’à partir du moment où un crime est commis par l’un de ses Etats membres (ou l’un de ses ressortissants) ou sur le territoire de l'un d'eux. Problème : la Syrie n’est pas membre. 

Les Etats membres (ou Etats partie) sont jusqu'ici au nombre de 124, et 34 d’entre eux sont africains (voir l’infographie de l’AFP ci-dessous), ce qui représente le contingent continental le plus important. 

Pour Mark Kersten, chercheur en droit pénal international à l'université de Toronto, ces retraits de trois pays africains ont pourtant lieu "au moment même où la Cour semble élargir son intérêt dans les crimes les plus difficiles à poursuivre en dehors de l'Afrique, dans des endroits où des Etats occidentaux sont impliqués". Des examens préliminaires sont notamment menés en Afghanistan, en Irak et en Palestine.

La CPI devrait survivre

À en croire les experts de la question, ces départs ne signifient pas pour autant la "mort" du premier tribunal permanent chargé de juger les crimes les plus graves (crime de guerre, crime contre l'humanité, crime d’agression et génocide), ni un retrait à l'échelle du continent. "La justice internationale, tout comme la CPI, a toujours eu des hauts et des bas : elle ne va pas disparaître", assure ainsi Alex Whiting, professeur de droit à l'université d'Harvard.

"Prévu dans le traité", le fait que des pays se retirent de la Cour envoie "un message fort", explique pour sa part Aaron Matta, chercheur au sein de l'Institut de La Haye pour une justice mondiale. "Mais au final, la CPI existe pour les victimes et non pour ceux au pouvoir qui décident de ratifier ou non un traité".

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Alexandre DECROIX

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