Angela Merkel : de Chirac à Macron, les hauts et les bas du couple franco-allemand

F.S.
Publié le 18 juin 2021 à 19h31, mis à jour le 18 juin 2021 à 22h20
Angela Merkel : de Chirac à Macron, les hauts et les bas du couple franco-allemand
Source : ODD ANDERSEN / AFP

LONGÉVITÉ - Angela Merkel, qui recevait ce vendredi Emmanuel Macron pour la dernière fois avant de quitter la chancellerie en septembre, a connu quatre présidents français depuis sa première élection en 2005. Quatre mandats à la tête de l'Allemagne, quatre couples avec les présidents français successifs, résumés en quatre moments-clés.

Première femme à accéder à la tête de la chancellerie fédérale allemande, Angela Merkel y aura égalé le record de longévité d'Helmut Kohl (1982-1998), qui fut jadis son parrain en politique. Au fil de son règne, elle aura connu le baisemain de Jacques Chirac, une osmose passagère avec Nicolas Sarkozy qu'on alla jusqu'à nommer "Merkozy", une relation d'abord froide puis plus étroite avec François Hollande, jusqu'à une bonne entente manifeste avec Emmanuel Macron. Si elle le reçoit ce soir pour un dîner d'adieux, la chancelière aura incarné la moitié stable du couple franco-allemand pendant les 15 dernières années. Quatre dates-clés pour quatre présidents qu'aura connus la chancelière au cours de ses... quatre mandats.

23 novembre 2005 : à peine élue, Merkel file rencontrer Chirac à Paris

Le lendemain même de son élection au Bundestag le 22 novembre 2005, Angela Merkel est à Paris. Jacques Chirac et Dominique de Villepin reçoivent la débutante dans un contexte délicat : le traité pour une constitution européenne vient d'être rejeté par les Français, consultés par referendum. La chancelière pose dès cette visite les bases de son mandat : le couple franco-allemand est essentiel. Sa relation avec Jacques Chirac n'aura guère le temps de s'édulcorer : le président français est déjà sur la fin de son second mandat.

9 décembre 2011 : face à la crise des subprimes, le couple "Merkozy" arrache un traité européen

Plus rapide encore qu'Angela Merkel deux ans plus tôt, Nicolas Sarkozy s'était envolé pour Berlin juste après son investiture, le 16 mai 2007. Après un accueil plutôt favorable du volontariste Sarkozy, qui succédait à une phase d'inertie de la construction européenne, la relation du bouillant président français et de la chancelière s'était quelque peu dégradée par la suite. Mais l'urgence et la nécessité générées par la crise des subprimes les verront travailler ensemble jusqu'à arracher un traité d'union budgétaire à Bruxelles, au terme d'une litanie de 16 sommets successifs en deux ans. C'est le premier pas vers le pacte budgétaire européen, qui sera voté le 2 mars 2012. Le couple mythique "Merkozy" est né durant cette nuit du 9 décembre... mais ses jours sont déjà comptés.

11 février 2015 : Merkel et Hollande obtiennent de Poutine un plan de paix sur l'Ukraine

Leur relation avait très mal commencé. Angela Merkel avait refusé de recevoir François Hollande avant les élections, apportant même un soutien officiel à Nicolas Sarkozy. Lorsque François Hollande arrive à Berlin le 15 mai 2012, il est en retard : son avion a été frappé par la foudre et il a dû rebrousser chemin pour changer d'appareil, la première manifestation des rapports contrariés qu'entretiendra le nouveau président français avec la météo. Hollande se montre gauche et Merkel agacée, leur rapport personnel est très mal engagé. Mais plusieurs évènements vont permettre de l'améliorer : François Hollande ratifiera dès l'été le pacte budgétaire européen... qu'il avait pourtant promis de renégocier. 

L'union sacrée au lendemain des attentats de Charlie Hebdo aura aussi contribué à souder le couple Merkel-Hollande, mais c'est la crise ukrainienne qui leur permettra d'agir véritablement en osmose. Après un va-et-vient diplomatique qui aura vu, la semaine précédente, Angela Merkel et François Hollande partir ensemble à Moscou pour rencontrer Vladimir Poutine, des négociations fiévreuses sont engagées à Minsk, entre eux et leurs homologues russe et ukrainien. Après 17 heures d'affilée de discussions, la rencontre accouchera en fin de matinée d'un accord de cessez-le-feu, mettant fin aux combats dans l'Ukraine orientale, engagés depuis mai 2014. Le conflit, qui s'était intensifié depuis le mois de janvier 2015, connaîtra effectivement une baisse significative des hostilités, même si des accrochages sporadiques ont perduré jusqu'en 2019. 

21 juillet 2020 : avec Macron, elle parvient à un accord historique pour un plan de relance européen

Emmanuel Macron, tout juste élu, déclare très tôt sa flamme à l'Allemagne, par un discours à la Sorbonne pour "une refondation de l'Europe". Mais la main qu'il tend est saisie sans entrain à Berlin. Échaudée par ses expériences précédentes, Angela Merkel préfère attendre des actes, les déclarations d'intention venues de Paris la laissent circonspecte. Mais très vite, et malgré quelques accrocs comme la déclaration d'Emmanuel Macron sur l'OTAN (qu'il jugea en 2019 "en état de mort cérébrale"), la relation des deux dirigeants s'améliore peu à peu. 

Et c'est une nouvelle fois lors d'une crise majeure que le couple s'est ressoudé. Les confinements dus à la pandémie ont paralysé les économies des pays l'Union européenne : Angela Merkel et Emmanuel Macron unissent leurs forces pour convaincre leurs partenaires les plus orthodoxes, à commencer par les pays du nord. Après quatre jours de négociations, à l'aube du 21 juillet 2020, un accord est obtenu, qui comprend un emprunt inédit, prévoit des subventions directes, et atteint un total de 750 milliards d'euros. En droite ligne de ce plan d'inspiration franco-allemande, une première émission de dette commune a été réalisée mardi, pour un montant de 20 milliards d'euros.

Le 31 mai dernier, à l'occasion du dernier sommet franco-allemand de l'ère Merkel tenu en visioconférence, Emmanuel Macron avait couvert d'éloges la chancelière. Elle préfère attendre la fin effective de son mandat, et au-delà, pour dresser un vrai bilan de son action. En rencontrant Angela Merkel ce soir pour un dernier tête-à-tête, le président français est devenu aussi le premier dirigeant étranger à être invité physiquement à Berlin cette année - pour cause de pandémie.


F.S.

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