Brexit : que contient le projet d'accord entre le Royaume-Uni et l'Union européenne ?

Publié le 15 novembre 2018 à 9h30, mis à jour le 16 novembre 2018 à 0h40
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Source : JT 20h Semaine

ACCORD - Theresa May a réussi à boucler un projet d'accord avec la Commission européenne et à convaincre ses ministres, nettement plus eurosceptiques, de le valider. Il doit maintenant passer devant les parlements britannique et européen, et cela ne va pas être une mince affaire. Que contient-il ? Qu'est-ce qui coince ? Retour sur accord obtenu au forceps.

La Première ministre britannique a réussi à obtenir l'aval de son gouvernement, ce mercredi 14 novembre, sur l'accord qu'elle a réussi à négocier avec Bruxelles. Une tâche ardue et qui n'a pas été sans conséquence : son secrétaire d'Etat pour 

l'Irlande du Nord, le conservateur Shailesh Vara, a dans la foulée annoncé sa démission. La phase de validation entre l'UE et le Royaume-Uni peut cependant enfin commencer, tout d'abord par les différents dirigeants de l'UE lors d'un sommet exceptionnel le 25 novembre prochain, puis par les parlements britannique et européen.

Mais que contient donc ce projet d'accord, de près de 600 pages ? Pourquoi les experts craignent-ils un blocage de la part des pro comme des anti-Brexit ? Si son contenu n'a pas encore été divulgué au-delà de l'hémicycle, des données sont déjà connues. LCI fait le point.

45 milliards de facture, droits des expatriés garantis et frontière ouverte, ce que contient le texte

Ce texte technique reprend les différents points d'accord négociés entre Theresa May et l'Union. Un des premiers points qui avait été (longuement) discuté reposait sur les obligations financières, l'équivalent, d'une certaine manière, d'un solde de tout compte. Car avant de voter le Brexit, Londres s'était engagé sur le budget 2014/2020, notamment pour financer certains projets. Elle doit également participer au paiement des retraites des fonctionnaires européens. Coût estimé : entre 40 et 45 milliards d'euros. Une dette qui sera bien entendu échelonnée. Les contribuables britanniques devraient finir de payer en … 2064 selon le Bureau de la responsabilité budgétaire (OBR)

Les discussions ont été également houleuses en ce qui concerne les droits des expatriés. Que vont devenir les trois millions d'Européens qui résident actuellement au Royaume-Uni ainsi que le million de Britanniques présents sur "le continent" ?

Selon l’accord conclu le 8 décembre, leurs droits devraient être conservés. "Quand nous quitterons l'Union européenne, vos droits seront inscrits dans la loi britannique", a ainsi assuré dans une lettre ouverte, Theresa May, aux citoyens européens. Les résidents pourront obtenir un statut de résident et leurs droits notamment à la santé, à la retraite et aux prestations sociales seront maintenus. Quant à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), les expatriés pourront toujours y recourir mais uniquement jusqu'en 2027.

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Le point qui cristallisait le débat jusqu'à il y a encore quelques jours était la question de la frontière entre l'Irlande du Nord, rattachée au Royaume-Uni et la République d'Irlande. Une fois le Brexit entériné, passer de l'un à l'autre reviendra à entrer ou à sortir de l'Union européenne. Après d'âpres négociations, Londres a obtenu un répit.

Aucune frontière physique ne sera rétablie pour le moment. Selon la télévision publique irlandaise RTE, le projet d'accord prévoit l'instauration d'un "filet de sécurité" : il aurait la forme d'un arrangement douanier incluant tout le Royaume-Uni avec des dispositions "plus approfondies" concernant l'Irlande du Nord en termes douaniers et réglementaires. Européens et Britanniques décideront en juillet 2020 de nouvelles modalités, si nécessaire.

Après 2020, le Royaume Uni restera dans une union douanière européenne. L'avantage : en attendant la conclusion d'un accord commercial – comme un un accord de libre-échange – le pays ne devra pas s'acquitter de droits de douane. Une victoire pour Theresa May, mais pour y parvenir, elle a dû autoriser la poursuite des règles du marché unique en Irlande du Nord et le paiement d'obligations douanières plus strictes que celles du reste du Royaume-Uni. Autre concession pour ce maintien du Royaume-Uni dans l'union douanière : la pays conservera les règles européennes anti-dumping.

Dernier point, le Royaume Uni pourra bénéficier d'une période de transition de vingt-et-un mois, allant du 30 mars 2019 au 31 décembre 2020 (mais non de deux ans comme le voulait la Première ministre).

Insatisfaction dans les deux camps, pourquoi ça coince ?

"Ce que nous avons négocié est un accord qui répond au vote des Britanniques" lors du référendum de juin 2016, a affirmé Theresa May ce 14 novembre devant le Parlement. Pourtant, que ce soit dans son camp ou dans le camp opposé, les critiques sont assez virulentes. "Nous ne serions pas surpris de voir de nouvelles démissions de la part de Tories tant europhiles qu'eurosceptiques", a ainsi commenté Ruth Gregory, analyste chez Capital Economics.

Les partisans du Brexit craignent qu'il n'oblige le Royaume-Uni à se plier aux règles de l'UE pendant des années, et l'empêche de véritablement couper les liens. "Avec cet accord, nous allons rester dans l'union douanière, nous allons rester, de fait, dans le marché unique", a ainsi déploré Boris Johnson sur la BBC, estimant que cela ferait du Royaume-Uni un "Etat vassal" de l'UE. "J'espère que le cabinet fera ce qu'il faut et rejettera" l'accord.

Pour le député eurosceptique Jacob Rees-Mogg, le projet d'accord est une "trahison" des engagements pris par Theresa May sur le Brexit et sur le maintien d'un traitement identique entre l'Irlande du Nord et le reste du pays. "Il est très difficile de comprendre les raisons pour lesquelles l'Irlande du Nord devrait être administrée depuis Dublin", a-t-il déclaré.

Les discussions s'annoncent donc ardues. Le tout doit pourtant être bouclé dans moins de cinq mois, d'ici le 29 mars 2019, date à laquelle la sortie du Royaume Uni a été fixée.


La rédaction de TF1info

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