De l'indépendance à la mise sous tutelle : retour sur la journée historique de la Catalogne

Publié le 27 octobre 2017 à 23h00
De l'indépendance à la mise sous tutelle : retour sur la journée historique de la Catalogne

ESPAGNE - Le Parlement catalan a proclamé ce vendredi l'"indépendance" de la communauté autonome, une rupture sans précédent à laquelle Madrid a riposté en annonçant la destitution du gouvernement autonome et la tenue d'élections anticipées le 21 décembre dans la région séparatiste. Voici le déroulé de cette folle journée.

Ce fut certainement le moment le plus important de l'histoire du petit parlement catalan : peu avant 15h30, les députés adoptent une déclaration unilatérale d'indépendance et se prononcent pour engager un "processus constituant" afin de séparer la Catalogne du reste de l'Espagne. 

La motion, présentée par la coalition Junts pel Si (Ensemble pour le oui) et la CUP (Candidature d'unité populaire), est votée par 70 voix pour, dix voix contre, et deux votes blancs. En guise de protestation, les élus régionaux du Parti populaire de Rajoy, du Parti socialiste et de Ciudadanos quittent l'hémicycle avant le vote.

A sa sortie, le président catalan, Carles Puigdemont, érigé en chef d'Etat du nouveau pays, est ovationné par les députés et plus de 200 maires catalans pro-sécession. "Bienvenue à la République catalane", se réjouit un responsable du gouvernement régional. "Elle a déjà 15 minutes", plaisante-t-il. Les cris de "Président !" fusent, tandis que les maires indépendantistes entonnent "Els Segadors", l'hymne catalan ("Le chant des Faucheurs"). "La Catalogne est et restera une terre de liberté. Dans les temps difficiles et dans les temps de fête. Aujourd'hui plus que jamais", écrit Puigdemont sur Twitter.

15.000 manifestants acclament chaque bulletin

A proximité du Parlement, le vote a été retransmis en direct sur des écrans géants : environ 15.000 manifestants acclamaient d'un "ah" chaque bulletin "oui" et d'un (rare) "oh" de déception chaque "non". A la proclamation de la République catalane, une clameur de joie explose. Et la foule d'entonner comme un seul homme "Els Segadors", poing levé, avant de se prendre dans les bras pour certains ou de pleurer pour d'autres.

Quelques minutes après la proclamation de l'indépendance de la région, le président du gouvernement espagnol Mariano Rajoy lance un appel au calme et promet de rétablir la légalité en Catalogne. "J'appelle au calme tous les Espagnols. L'Etat de droit restaurera la légalité en Catalogne", a -t-il écrit sur Twitter.

Rajoy convoque un conseil des ministres extraordinaires

16h10 : le Sénat espagnol autorise la mise en oeuvre de l'article 155 de la Constitution qui permet au gouvernement espagnol d'administrer directement la Catalogne, une mesure sans précédent en 40 ans de démocratie. Cette proposition, soutenue par le Partido Popular (droite), Ciudadanos (centre) et le PSOE (centre-gauche) a été approuvée par 214 voix pour, 47 contre et une abstention.  

Dans la foulée, Mariano Rajoy convoque un Conseil des ministres extraordinaire pour mettre en oeuvre les mesures qui en découleront : destitution de l'exécutif catalan, mise sous tutelle de la police. Deux dispositions controversées, la mise sous tutelle du parlement catalan et des médias publics, ont finalement été écartées. Le président indépendantiste de la région Carles Puigdemont a, lui, appelé les Catalans à rester "pacifiques et civiques". 

Face au Palais de la Généralité, siège de l'exécutif, des milliers de séparatistes exigent déjà que soit retiré le drapeau de l'Espagne. Dans ses attendus, la résolution demande à l'exécutif catalan de négocier sa reconnaissance à l'étranger. Un voeu

pieux à en croire les réactions européennes enregistrées après le vote. "Cela ne change rien pour l'UE. L'Espagne demeure notre seul interlocuteur", a déclaré le président du Conseil européen, Donald Tusk. L'Allemagne, la France et la Grande-Bretagne, tout comme le président de la Commission européenne ont également rejeté la déclaration unilatérale d'indépendance et réaffirmé leur soutien à Rajoy. Note discordante, le Premier ministre Charles Michel s'est contenté d'un appel au dialogue sans violence, sans prendre parti pour l'un ou l'autre.

Plainte pour "rébellion" contre Carles Puidgemont

19h :  Le parquet général d'Espagne annonce qu'il va engager la semaine prochaine une procédure judiciaire contre le président catalan Carles Puigdemont pour "rébellion", indique un porte-parole du ministère public. "Le parquet présentera une plainte la semaine prochaine pour rébellion contre Carles Puigdemont", un délit puni d'une peine de prison pouvant aller jusqu'à 30 ans, a indiqué à l'AFP ce porte-parole. Cette procédure pourrait "peut-être être élargie au reste du gouvernement catalan et au bureau des présidents" de l'assemblée catalane, a indiqué cette source.

Rajoy destitue le gouvernement de Catalogne

20h20 : A l'issue du conseil des ministres extraordinaire, Mariano Rajoy annonce la destitution du président catalan Carles Puigdemont et de son exécutif, la dissolution du Parlement et annonce la tenue d'élections le 21 décembre en Catalogne. "Ce sont les premières mesures que nous mettons en marche pour éviter que ceux qui étaient jusqu'à maintenant responsables de (l'exécutif catalan) puissent poursuivre leur escalade de désobéissance", déclare-t-il.

"Nous les Espagnols avons vécu une triste journée, au cours de laquelle la déraison s'est imposée à la loi et a détruit la démocratie en Catalogne", affirme-t-il. La situation est "déchirante, triste et angoissante", ajoute-t-il encore, assurant que les mesures prises par le gouvernement "ne visent pas à suspendre l'autonomie, mais à ramener la loi et la concorde" en Catalogne.

Les autres mesures annoncées comprennent la destitution du directeur de la police régionale catalane, celle des représentants du gouvernement catalan à Madrid et dans les pays de l'Union européenne et la fermeture des "représentations" catalanes dans le monde, hormis à Bruxelles.


La rédaction de TF1info

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