Assaut du Capitole : une mystérieuse "cellule de crise" aurait tout orchestré depuis un hôtel de luxe

Publié le 28 octobre 2021 à 13h04

Source : TF1 Info

ENQUÊTE - Des proches de Donald Trump sont soupçonnés d'avoir fait la liaison entre l'ancien président et les émeutiers de l'attaque contre le siège du Congrès américain en janvier dernier, se retrouvant dans un hôtel huppé bien connu de l'entourage du Républicain.

Une "cellule de crise" nichée au cœur d'un hôtel de luxe de Washington. Conduite par des conseillers de Donald Trump, celle-ci pourrait bien faire partie des rouages du spectaculaire assaut du Capitole américain le 6 janvier dernier, mené par des émeutiers et partisans de l'ancien président. 

L'enquête parlementaire se penche désormais sur le rôle des avocats Rudy Giuliani et John Eastman, ainsi que Steve Bannon, proche allié de Donald Trump, soupçonnés d'avoir agi en coulisses pour préparer cette attaque meurtrière sans précédent de milliers de partisans, qui voulaient empêcher les élus de valider l'élection du démocrate Joe Biden à la présidentielle. 

Se retrouvant au Willard InterContinental, tout près de la Maison Blanche, avant et après l'assaut sur le siège du Congrès, ils sont accusés par la commission d'enquête spéciale de la Chambre des représentants d'avoir fait la liaison entre le gouvernement de l'ancien président et des groupes ayant participé à la grande manifestation "Stop the steal" ("Stop au vol" des élections, ndlr) organisée le 6 janvier. 

Steve Bannon bientôt poursuivi ?

La commission veut notamment poursuivre Steve Bannon, l'un des artisans de la victoire de Donald Trump en 2016, pour avoir refusé de témoigner alors qu'il est soupçonné d'avoir participé à promouvoir cette campagne et à orchestrer l'assaut depuis l'hôtel Willard. Les parlementaires estiment aussi que les explications de l'ancien conseiller de 67 ans seraient essentielles pour comprendre le rôle de l'hôte de la Maison Blanche au moment de l'assaut. 

Ce jour-là, l'ex-président avait posté sur Twitter un appel aux manifestants à rentrer chez eux en demi-teinte, justifiant entre les lignes leur attaque. "Ce sont les choses et les événements qui arrivent, lorsqu'une victoire électorale écrasante et sacrée est sans cérémonie et vicieusement arrachée à de grands patriotes qui ont été mal et injustement traités pendant si longtemps", avait-il notamment écrit. "Rentrez chez vous avec amour et en paix. Souvenez-vous de ce jour pour toujours !"

Le quartier général des "lobbyistes"

Depuis 1847, l'hôtel Willard accueille une clientèle aisée, mais est aussi un centre névralgique pour des responsables politiques et des dignitaires visitant la capitale américaine ou la Maison Blanche. Le terme "lobbyiste" semble d'ailleurs avoir été popularisé à Washington pour désigner ceux qui, dans la deuxième moitié du XIXe siècle, fréquentaient le hall d'entrée (lobby, en anglais) de cet établissement, en espérant approcher le président Ulysses Grant, habitué des lieux.

En amont du 6 janvier, des dizaines de proches de Donald Trump impliqués dans la tentative de renverser la victoire électorale de Biden ont à leur tour visité l'hôtel, selon le journaliste indépendant Seth Abramson, qui cite entre autres sur son site internet Proof le conseiller politique conservateur Roger Stone, l'ancien porte-parole Jason Miller, le conseiller de campagne Boris Epshteyn et l'ex-directeur de la police de New York Bernard Kerik. Autant de personnalités gravitant dans l'entourage de l'ancien président américain, dont la commission d'enquête veut déterminer les responsabilités. 

Donald Trump est également visé par les enquêteurs. Juste avant l'assaut, le 5 janvier, il aurait demandé à son vice-président Mike Pence de bloquer la certification par le Congrès des résultats de l'élection présidentielle en dénonçant une fraude grâce à un argumentaire juridique inédit ficelé par l'avocat John Eastman, expliquent dans leur livre Peril des journalistes du Washington Post Bob Woodward et Robert Costa - des accusations à ce jour jamais prouvées. 

"C'est le moment d'attaquer"

Mais Mike Pence aurait refusé cette option le soir même, selon les auteurs. Cela n'aurait pas découragé l'ancien hôte de la Maison Blanche, qui a appelé ensuite au moins une fois la "cellule de crise" de l'hôtel Willard pour "coordonner cette tentative visant à parler à la place" de son vice-président, a expliqué lundi Robert Costa sur la chaîne américaine MSNBC. Un échange crucial, dont la commission d'enquête parlementaire souhaiterait obtenir les relevés téléphoniques. 

L'enquête de Peril avance aussi que Steve Bannon aurait encouragé en décembre l'ancien président républicain à utiliser les prétendues fraudes électorales pour empêcher le vote présidentiel. Dans un podcast du 5 janvier, il prédisait la "victoire" de cette stratégie le lendemain, affirmant que "tout converge et c'est le moment d'attaquer".

Les opérations menées depuis l'hôtel de luxe n'étaient pourtant pas un secret : en mai, John Eastman mentionnait sur une radio de Denver cette "cellule de crise de l'hôtel Willard (qui) coordonnait toutes les communications". Les échanges entre la Maison Blanche et les occupants de l'établissement auront en tout cas été déterminants pour l'attaque du lendemain, a estimé Bob Woodward lundi sur MSNBC. Selon lui, Steve Bannon et Donald Trump "ont réalisé que c'était le moment de tout faire péter, et c'est exactement ce qu'ils ont fait".


La rédaction de TF1info (avec AFP)

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