Grèce : un tourisme qui explose, menacé par la crise politique

Publié le 28 juin 2015 à 17h10
Grèce : un tourisme qui explose, menacé par la crise politique

REPORTAGE - Un référendum crucial se tiendra le 5 juillet, appelant les Grecs à voter pour ou contre les mesures des créanciers internationaux sur la dette du pays. Parallèlement, le tourisme, secteur économique phare qui compte pour 20% du PIB, ne souffre pas encore des soubresauts politiques.

Au loin, l’Acropole surplombe la bouillonnante place Monastiraki, au centre d’Athènes. Les touristes de toutes nationalités sont interpellés par les vendeurs ambulants de perches à ie, boules de plastique lumineuses ou bracelets aux couleurs flashy. Sur fond de musique bouzouki, les serveurs des tavernes galopent, plateaux chargés de “souvlakia”. Dans cette ambiance effervescente, le bras de fer entre le Premier ministre grec et les créanciers sur la question de la dette grecque semble bien loin. “Crise, quelle crise ?”, frime un restaurateur aux cheveux gominés, montrant ses tables aux nappes à carreaux où s’amassent les visiteurs. A quelques mètres dans le quartier ancien de Plaka, les petits hôtels affichent complet “au moins jusqu’a juillet”, nous précise une gérante.

Cette année, la confédération du tourisme hellénique (SETE) espère accueillir quelque 25 millions de visiteurs. Un chiffre record. Les premiers à tomber sous le charme de la patrie de Platon sont les Allemands, suivis des Britanniques puis des Francais, 1,2 million à avoir arpenté le pays en 2014. Les destinations phares : les Cyclades, la Crête, le dème d’Epidaure… Des touristes avouent délaisser le soleil de Tunisie ou d’Egypte, Etats marqués par l’instabilité. D’autres vantent l’avantage “qualité/prix” des plages de la République hellénique, à l’image de Philippe Ruhlmann et Francoise Clozel, deux Lyonnais d’une trentaine d’années. Le teint hâlé et les bras chargés de souvenirs, ce couple de retour des plages assure : “La Grèce est un bon plan, au niveau du budget. Pour des chambres à moins de 50 euros par nuit, nous avons la beauté des paysages et le beau temps”. Passionnés de mythologie grecque, Philippe Ruhlmann a les yeux brillants lorsqu’il évoque le Péloponnèse, péninsule au sud-ouest “où l’on voyage tranquillement, et où l’on rencontre des gens hospitaliers”. Concernant la crise politique, les amoureux, “loin de tout”, admettent ne pas avoir suivi les dernières évolutions politiques.

La TVA en question

Preuve encore de ce décalage, peu de touristes disent s’être rendus dans l’urgence, samedi, retirer de l’argent au distributeur. La veille, le Premier ministre grec, Alexis Tsipras, a annoncé la tenue d’un référendum sur les propositions des créanciers, fixé au 5 juillet. Alors que la peur d’un contrôle des capitaux a saisi les épargnants grecs, les vacanciers du pied de l’Acropole ont relativisé. “J’ai vu des gens attendre devant les banques, mais je ne savais pas ce qu’ils faisaient, reconnaît Françoise. De toute façon, nous avons du cash, car nous retirons des sommes importantes en une fois pour éviter d’avoir trop de frais bancaires”.

Mais l’ombre plane tout de même sur cette belle saison touristique. Dans leurs dernières propositions pour encourager les économies en Grèce, les créanciers ont proposé de relever la TVA de 13 à 23 % pour les hôtels du continent, et de 6,5 à 23% pour ceux des îles. Une mesure que les institutions souhaiteraient appliquer après le 1er juillet, mais refusée par le gouvernement grec . “Sur les îles, notre taux est moins élevé car nous importons de nombreux produits, donc le coût de la vie est plus cher”, justifie Stella Dassoula, une gérante, qui tient des chambres d’hôtes sur l’île de Sifnos, dans les Cyclades. “Une augmentation serait dommageable, nous ne voulons pas augmenter nos prix, cela ne se fait pas, en pleine saison !”

De son côté, Kostas Bourdos, directeur de l’agence de voyage Grèce sur mesure, à Athènes, fustige : “Dans un pays sans réelle croissance, trop d’impôts tue l’impôt, cela va davantage encourager ceux qui ne font pas de factures à le faire encore moins”. Dans le tourisme, 20% du PIB, le manque à gagner est non négligeable, selon le SETE. Un vacancier (adulte) reste huit jours en moyenne et dépense 640 euros (sans les transports). Les visiteurs ont injecté environ 13 milliard d’euros, officiellement, dans l’économie grecque en 2014. Mais près de 40% des recettes du secteur touristique ne sont pas déclarées, d’après le président de la confédération. Tout sourire, Michelle, appareil photo et chapeau de paille, se perd dans les dédales de rues à Plaka. Dans son sac banane, la touriste française a toujours du liquide. “Je viens depuis cinq ans, les hôtels se sont améliorés mais il y a encore quelques tavernes réticentes à la carte bleue ! ” .


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La rédaction de TF1info

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