Opération Barkhane : les Français sont-ils seuls au Mali ?

par Cédric STANGHELLINI
Publié le 28 novembre 2019 à 21h35, mis à jour le 29 novembre 2019 à 19h05

Source : JT 20h Semaine

À LA LOUPE – Treize militaires français ont été tués au Mali lundi 25 novembre dans la collision de deux hélicoptères. Un drame qui relance le débat sur la plus importante mission extérieure de la France.

Depuis août 2014, 4.500 soldats français sont mobilisés au Sahel dans le cadre de l'opération Barkhane, dont la majorité au Mali. Il s'agit de la plus importante mobilisation extérieure de la France actuellement. Notre pays est-il seul mobilisé sur ce terrain d'opération aussi vaste que l'Europe ? Quels intérêts économiques sont en jeu ? 

En quoi consiste l'opération Barkhane ?

L'opération Barkhane a été lancée en août 2014 et vise à sécuriser la région du Sahel contre l'implantation de groupes djihadistes. Elle s'étend sur cinq pays, la Mauritanie, le Mali, le Burkina Faso, le Niger et le Tchad, un territoire quasiment aussi étendu que l'Europe. Pour reprendre les termes du ministère des Armées, la présence militaire française consiste à "empêcher la reconstitution de sanctuaires terroristes dans la région."

Les 4.500 soldats français sont soutenus notamment par 470 véhicules blindés, sept de chasse, trois drones, une dizaine d’hélicoptères, en plus des supports logistiques. Selon le ministère des Armées, les forces armées sont regroupées au sein de deux bases d'appui permanent - au Niger et au Mali - ainsi que huit bases avancées temporaires. Sous oublier trois points maritimes à Dakar, Abidjan et Douala. 

Les militaires français sont-ils seuls au Mali ?

Avec plusieurs milliers de soldats et des centaines de véhicules, la France est le belligérant principal de l'opération Barkhane. A noter toutefois la présence de militaires estoniens, avec 50 hommes déployés dans la base de Gao, au centre du Mali, depuis août 2018. L'Estonie augmentera prochainement son contingent à 95 soldats après une décision du parlement de Tallinn le 6 novembre dernier. Au mois de juillet, cinq soldats estoniens ont été blessés dans une attaque à la voiture piégée. 

Depuis juin 2018, à la suite à d'une promesse faite par Theresa May à Emmanuel Macron, le Royaume-Uni a envoyé trois hélicoptères de transport lourd pouvant embarquer jusqu'à 40 personnes à leur bord. Une centaine de soldats britanniques a également été déployée, mais ils ne participent pas au combat. La France peut également compter sur l'important soutien aérien espagnol et américain. Enfin, le Danemark a annoncé son intention d'envoyer 70 soldats et deux hélicoptères de transport pour un an à compter du mois de décembre 2019. 

Il ne faut pas non plus oublier deux opérations internationales en cours spécifiquement au Mali. La première, l'EUTM [European Union Training Mission in Mali] soutenu par 27 pays, qui ne sont d'ailleurs pas tous membres de l'Union européenne. Lancée en 2013, l'EUTM mobilise environ 600 soldats qui ont pour mission de former l'armée malienne. Les Français représentent toutefois un tiers des effectifs mobilisés. 

L'autre opération appelée la Minusma [Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation du Mali] a été lancée en 2013 au moment de la guerre. Actuellement, plus de 12.00 soldats sont mobilisés, provenant de 55 pays différents. Les premiers pays contributeurs sont le Burkina Faso et le Tchad. 

Car il ne faut pas oublier que les pays concernés par l'opération Barkhane mobilisent largement leur force armée nationale, comme l'explique pour LCI l'Etat-major des Armées. "L’opération Barkhane repose sur une logique de partenariat avec les principaux pays de la bande sahélo-saharienne, qui vise en priorité à favoriser l’appropriation par les pays partenaires du G5 Sahel de la lutte contre les groupes armés terroristes." 

Sur les dernières opérations, l'Etat-major assure que les armées locales participent à hauteur 30 à 40% des effectifs. "L’implication des forces armées de ces pays partenaires augmente, et la force Barkhane s’appuie aujourd’hui sur leurs progrès pour marquer un effort dans la région du Liptako-Gourma et dans la boucle du Niger élargie." 

L'intervention protège les mines d'uranium ?

Le Niger, pays couvert par l'opération Barkhane, est le quatrième exportateur mondial d'uranium. Le minerai est principalement exploité par la société Orano [anciennement Areva] grâce à deux mines. Un troisième site devait voir le jour mais est au point mort depuis 2015. La présence militaire française vise-t-elle à protéger ces gisements ? Une des deux bases avancées temporaires se situe à 80 km de la mine d'Arlit. 

Interrogée à ce sujet par Franceinfo, Caroline Roussy, chercheuse à l'Iris et spécialiste de l'Afrique de l'Ouest, explique que si la situation au Niger est bien surveillée de près, le terrain principal des opérations se situe au Mali. Sans oublier qu'Orano dispose de ses propres moyens de sécurité, comme l'explique Joseph Henrotin, politologue spécialiste des questions de défense à Franceinfo. "Les forces nigériennes portent un regard attentif à la sécurité de ces sites, parce que le Niger lui-même n'a pas intérêt à perdre l'activité des mines et les revenus qui en sortent." 

Contacté par LCI, l'Etat-major des Armées nous précise que "la protection des sites d'exploitation de l'uranium ou d'autres sites industriels ne relève pas de la responsabilité de Barkhane, dont le mandat est bien la lutte contre les groupes armés terroristes dans l'ensemble de la bande sahélo-saharienne." 

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Cédric STANGHELLINI

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