Sécurité hors normes, ville "bunkerisée" : pourquoi une telle débauche de moyens pour le G7 à Biarritz ?

par Cédric STANGHELLINI
Publié le 20 août 2019 à 8h25, mis à jour le 22 août 2019 à 11h30

Source : JT 13h Semaine

À LA LOUPE – Circuler en voiture, naviguer, se baigner... La liste des activités interdites à l’approche du G7 à Biarritz est longue. Du 24 au 27 août, la cité balnéaire basque accueillera le sommet international rassemblant les sept plus grandes puissances du monde. Pour l’occasion, la France a relevé les dispositifs de sécurité au maximum. Ce dispositif est-il exceptionnel pour un G7 ?

Du 24 au 27 août, la France organise le sommet du G7, rassemblement des sept plus grands pays industrialisés : Etats-Unis, Royaume-Uni, Canada, France, Allemagne, Japon et Italie. D'autres Etats seront également de la partie. C’est la cité balnéaire de Biarritz qui a été choisie pour organiser cet événement placé, cette année encore, sous très haute surveillance. 

La ville est divisée en zones d’exclusion de circulation où seuls les habitants et commerçants peuvent entrer, badges à l’appui. La navigation, même en engin de plage ou en surf, est totalement prohibée au plus près des lieux de réception. La gare sera fermée ainsi que plusieurs accès routiers. Des caméras de surveillance supplémentaires ont été installées partout en ville et de nombreux policiers et militaires sont déjà sur place. 

Bref, la liste des mesures sécuritaires est longue et, même si la municipalité et la préfecture des Pyrénées-Atlantique tentent de tempérer la grogne des habitants, les quelques Biarrots encore présents en ville se sentent comme coupés du monde. Le dernier sommet avait eu lieu à Deauville en 2011. Une question se pose : ce niveau maximum de sécurité est-il exceptionnel ? À La Loupe fait le point avec les précédentes éditions en France et dans le monde.

Des lieux de plus en plus isolés

Durant le G7, Biarritz sera en effervescence. En plus des sept chefs d’Etat et de gouvernement attendus, la ville accueillera les dirigeants d’une vingtaine d’autres pays et organisations internationales. Ces derniers seront tous accompagnés des membres de leur délégation, ce qui représente plus de 3.000 personnes. Sans oublier les milliers de journalistes et personnels des forces de l’ordre. Alors pourquoi ne pas organiser ce sommet au sein d'une grande agglomération, des villes dotées à la fois des infrastructures et du parc hôtelier suffisant ?

La dernière grande ville européenne a avoir accueilli un tel sommet est Gênes pour le G8 de 2001. Mais durant trois jours, la ville italienne de 500.000 habitants a été en proie à de violents affrontements entre plus de 100.0000 manifestants altermondialistes et 15.000 membres des forces de l’ordre. Plus de 600 personnes ont été blessés, une personne a perdu la vie, de nombreuses voitures ont été incendiées ainsi et des commerces saccagés. Plusieurs policiers italiens ont également été condamnés par la justice pour des actes de violences envers les manifestants

Depuis les incidents de Gênes, les sommets du G8, puis du G7, les autorités hôtes privilégient des lieux faciles à contrôler. Les villes retenues ne doivent plus être des points de rassemblement mais des lieux isolés et coupés du monde le temps du sommet. Ce fut le cas dès l'année suivante en 2002 où le Canada choisit d'organiser le G8 dans le village de Kananaskis, entre lacs et forêts dans l'Etat de l'Alberta

Nous pouvons citer d'autres exemples marquants. En 2013, David Cameron, alors Premier ministre du Royaume-Uni, organise ce qui sera le dernier G8 au beau milieu de la campagne nord-irlandaise, dans le complexe hôtelier de Lough Erne. Le lieu choisi est une presqu’île sur un lac et il n’y a aucune grande ville aux alentours. Un endroit difficile à atteindre donc. 

Dans cette quête de l’isolement, l’Allemagne va encore plus loin en 2015. Les membres du G7 se retrouvent au cœur des Alpes bavaroises. Le lieu choisi est l’hôtel Schloss Elmau, qui est entièrement refait pour l’occasion : construction d’un héliport, installation de la fibre optique dans la vallée, etc. Entre le coût de la sécurité et des nouveaux aménagements, ces trois jours de sommet coûteront 112 millions d’euros

Des villes totalement bunkerisées

Lors des sommets internationaux, les pays hôtes ont une très grosse responsabilité : assurer la sécurité des personnalités politiques et économiques. Aucune faille sécuritaire ne peut être tolérée. Le choix d’un lieu isolé est important car les accès limités permettent d’éloigner au maximum les manifestants, au point de vider totalement les alentours de toute âme qui vive. 

Une sécurité maximum qui entraîne une véritable bunkérisation des villes hôtes. L’année dernière, lors du sommet du G7 au Québec, les habitants de La Malbaie, 8.000 habitants, ont vu s'ériger une clôture de trois mètres de hauts, avec des caméras de vidéosurveillance, afin de couper le village des lieux du sommet. En 2015, en Allemagne, une zone de protection de 8 kilomètres a été instaurée autour de l’hôtel Schloss Elmau. Toutes les plaques d’égouts ont été scellées et les autorités ont même suspendu la libre circulation de l’espace Schengen avec les frontières autrichienne et tchèque toutes proches. 

Pour le dernier G7 en Italie, les autorités ont privilégié la station balnéaire de Taormine, en Sicile. Surplombant la mer au sommet d'une falaise, la ville a été facile à boucler : le centre-historique n'est accessible que par une seule route ou par un funiculaire. Lors du dernier G8 organisé par la France en 2011 à Deauville, la ville fut également isolée : zonage, restriction de circulation et de stationnement, gare SNCF fermée. 12.000 policiers et militaires assuraient la sécurité du sommet.  

Toutefois, bunkeriser les lieux n’éteint pas les revendications des militants altermondialistes. Exemple en 2003, quand la France a choisi Evian-les-Bains pour le G8, De violents affrontements ont eu lieu sur l’autre rive du lac Léman, dans les villes suisses de Lausanne et Genève. Cette année, des rassemblements sont déjà annoncés dans la ville d'Hendaye, à 30 kilomètres au sud de Biarritz. 

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Cédric STANGHELLINI

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