La rencontre Trump-Kim vaut-elle un prix Nobel ?

Publié le 12 juin 2018 à 16h42

Source : Sujet JT LCI

DIPLOMATIE - Une poignée de main, une déclaration signée et une promesse de paix à l'horizon : que vaut la rencontre entre Donald Trump et Kim Jong-un ? Si le rapprochement entre les deux ennemis semble positif, plusieurs éléments peuvent nuancer l'enthousiasme de ceux qui les voient déjà recevoir le prix Nobel de la paix.

Donald Trump prix Nobel de la paix ? Quelques heures après le sommet historique entre le président américain et son homologue nord-coréen Kim Jong-un, la question est posée très sérieusement par de nombreux médias et observateurs. Mais si leur rencontre est incontestablement une évolution positive, beaucoup d'éléments viennent modérer cet optimisme.

Russie, Chine, Japon, Corée du Sud, France, Royaume-Uni et même Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) : tous ont salué la rencontre de Kim et Trump. À l'image de la France, ils considèrent le sommet de Singapour comme le "début d'un processus".

Une avancée, mais quel genre de désarmement ?

Incontestablement, la rencontre des deux dirigeants constitue une avancée marquante, alors que les tensions entre la Corée du Nord et les États-Unis semblaient à leur comble. Mais si parler est un début, il faut être d'accord sur le sens des mots, et en particulier de celui de "dénucléarisation". 

Pour les États-Unis - comme pour la France -, cette dénucléarisation doit être "complète, vérifiable et irréversible". Sauf que Pyongyang n'a jamais accepté d'utiliser ces termes, et la déclaration signée ce mardi par Kim et Trump ne mentionne qu'une "dénucléarisation complète de la péninsule". La nuance est de taille, car jamais la Corée du Nord n'a accepté de lâcher définitivement son programme nucléaire, ni de permettre à l'AIEA de vérifier qu'elle s'y attelait. 

Un air de déjà-vu

De nombreux experts observent que la Corée du Nord a déjà pris des engagements similaires par le passé, sans les respecter. En 1993, le pays avait signé à New York un accord de principe en faveur de la "paix et la sécurité dans une péninsule coréenne sans armes nucléaires", s'engageant à suspendre son retrait du Traité de non prolifération nucléaire (TNP). En 2005, Pyongyang avait même accepté d'"abandonner touts les armes nucléaires et les programmes nucléaires existants", avant de réaliser un an plus tard son premier essai nucléaire...

Vipin Narang, professeur au Massachusetts Institute of Technology, indique auprès de l'AFP que "la Corée du Nord n'a rien promis de plus qu'au cours des 25 dernières années", ajoutant qu'"à ce stade, il n'y a aucune raison de penser que ce sommet débouche sur quelque chose de plus concret que cela sur le front du désarmement". Pour Jeffrey Lewis, professeur au Middlebury Institute of International Studies, "la Corée du Nord n'offre toujours pas de désarmer".

La concession surprise de Donald Trump

D'un côté, Kim Jong-un profite de sa rencontre avec Trump pour légitimer son régime, en répétant des promesses déjà formulées dans le passé. De l'autre, le président américain offre, en plus de cette opportunité, une concession surprise au leader nord-coréen, en annonçant que les États-Unis allaient cesser d'organiser des exercices militaires conjoints avec la Corée du Sud. Apparemment, Séoul et le Pentagone n'étaient pas au courant. 

En bref, Donald Trump semble avoir fait un pas vers Kim Jong-un. Reste à savoir si ce pas incitera le leader nord-coréen à offrir de véritables garanties sur le désarmement. D'ici là, pas de quoi accorder un prix Nobel de la paix aux deux dirigeants, selon plusieurs spécialistes. "C'est trop tôt", estime ainsi Asle Sveen, un historien du prix Nobel. En revanche, "si ça devait déboucher sur un désarmement réel sur la péninsule coréenne, il serait très difficile de ne pas donner le prix. Ce serait une situation bizarre mais il s'est déjà produit que des personnes au passé assez violent reçoivent le prix Nobel de la paix", estime-t-il.


La rédaction de TF1info

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