#WhereIsMyName : privées de prénom sur leur carte d'identité, les femmes afghanes lancent un combat sur Twitter

par Elodie HERVE
Publié le 27 août 2017 à 9h00
#WhereIsMyName : privées de prénom sur leur carte d'identité, les femmes afghanes lancent un combat sur Twitter

SEXISME - En Afghanistan, les femmes n’ont pas de prénom ni de nom légal. Elles restent la fille de, l’épouse de… Aussi, elles sont plusieurs à s’être emparées des réseaux sociaux pour dénoncer cette pratique et demander une identité.

Quatre mots et une volonté de renverser les traditions. Début juillet, des Afghanes ont lancé le hashtag #WhereIsMyName (où est mon nom) pour demander une égalité avec les hommes sur leur carte d’identité. Depuis, le mouvement a pris de l’ampleur jusqu’à déclencher, la semaine passée à Kaboul, un premier événement public en présence d’un ministre. Une première dans un pays où les femmes n'ont pas d'identité légale. 

Car en Afghanistan, sur les papiers d’identité des femmes, il est inscrit "femme de", ou "fille de" avec le nom du mari ou celui du père. Mais leur prénom et leur nom restent inconnus. Et dans certaines régions reculées, les hommes préfèrent même appeler les femmes les "têtes noires". Une preuve, pour les défenseurs des droits de l'Homme, du statut de seconde zone des femmes, considérées comme la propriété des hommes.

Il en va de même pour les actes de la vie quotidienne. Par exemple, lors d'une visite chez le médecin, les ordonnances sont délivrées au nom du mari. Aucun nom de femme n'apparaît sur les documents légaux comme les actes de mariages ou encore les actes de naissances. Il en est de même pour les pierres tombales. Dans les cimetières féminins, les tombes ne portent pas le nom de la défunte. En cause : une tradition afghanne qui interdit l'usage en public des noms de femme, vu comme un "déshonneur" pour la famille. 

"Mon nom est mon identité"

C’est pour tenter de faire changer les mentalités et de récupérer leur identité que nombre d’Afghanes ont commencé à dénoncer ce système au début de l’été via Twitter. Laseh Osmany, une jeune activiste afghane, initie le mouvement le 5 juillet à Hérat. Fatiguée d'être constamment désignée par le nom des hommes qui l'entourent, elle demande à tous ceux et celles qui partagent son opinion de publier leur photo et d'indiquer leur nom complet. 

La réaction est immédiate : des femmes de tout le pays y participent. "Mon nom est mon identité. Je ne veux pas être appelé la mère de Matin, je veux juste que l'on appelle par mon propre nom", raconte Hosni Aman sur Twitter. 

"Mon nom c'est Laleh. Et vous voulez l'effacer ? Où est mon nom?", ajoute Laleh en persan. 

"Je n'ai pas connu le nom de ma mère pendant des années"

Des hommes se sont aussi joints au mouvement, dévoilant au fil des tweets le nom de leur épouse, de leur sœur et de leur mère. Ou racontant des moments de leur vie. "Je n'ai pas connu le nom de ma mère pendant des années, même quand j'ai été adulte", souligne Ali Sina Doosti. 

"Je suis l'époux de Sarah. C'est ma femme. Ce n'est pas la religion, ce n'est pas la culture, ce sont juste des hommes ignorants."

Peu après, des vedettes afghanes ont aussi fait part de leur soutien à cette protestation en ligne. Comme Farhad Darya, chanteur afghan adulé, qui a mis en ligne une photo de lui et son épouse, avec leurs noms. Ou encore Bahar Sohaili, écrivaine et militante.

De nouvelles cartes d'identité devraient entrer en circulation dans les semaines à venir, en Afghanistan. Une occasion, peut-être, pour le gouvernement de décider de rendre aux femmes leur identité propre. "Les gens de la culture afghane n'étaient pas prêts pour cette étape moderne. Ça pourrait générer un tumulte gênant", tente de justifier une porte-parole de la Cour suprême à Kaboul.


Elodie HERVE

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