Schizophrène, multirécidiviste et radicalisé : des failles dans le suivi du suspect de la Chapelle-sur-Erdre ?

Publié le 29 mai 2021 à 7h05, mis à jour le 29 mai 2021 à 20h18

Source : TF1 Info

ATTAQUE À LA CHAPELLE-SUR-ERDRE - Mutlirécidiviste, condamné de droit commun, radicalisé et diagnostique "schizophrène sévère", le profil de l'homme abattu vendredi après avoir poignardé une policière municipale de la Chapelle-sur-Erdre pose toujours de nombreuses questions. Notamment son suivi judiciaire.

Plus de trois heures de traque, une policière municipale blessée au couteau, deux gendarmes blessés au cours de l'intervention et l'auteur présumé des faits décédé. Ce vendredi matin, la commune de La Chapelle-sur-Erdre (Loire-Atlantique), qui compte environ 20.000 habitants, a été traumatisée après l'agression à l'arme blanche de cette fonctionnaire dans son bureau, dans les locaux de la police municipale. La quadragénaire, en urgence absolue, a été hospitalisée au CHU de Nantes. 

L'auteur des coups de couteau, lui, a pris la fuite avant d'être interpellé après des échanges de tirs avec les militaires alors qu'il se trouvait près de la brigade de gendarmerie, chez une femme qu'il a séquestrée "pendant près de deux heures et demie", selon le procureur de la République de Nantes. Malgré les tentatives de réanimations, le suspect est décédé. LCI revient sur son profil. 

Tout juste sorti de prison

L'individu, âgé de 40 ans, habitait la commune de La Chapelle-sur-Erdre. Le casier judiciaire du suspect comporte plusieurs mentions.  Écroué le 9 mars 2013, il purgeait principalement une peine de 8 ans d'emprisonnement prononcée par la cour d’assises du Nord le 7 octobre 2015. Il avait alors été jugé pour vol aggravé avec séquestration. Il avait été libéré le 22 mars 2021 en fin de peine (sans aménagement). À sa libération, le suivi socio-judiciaire auquel il avait été condamné en 2015 a été mis en place immédiatement, notamment l’obligation de soins.

Il a été rencontré à trois reprises par le service pénitentiaire d’insertion et de probation et a présenté les justificatifs de soins auprès du centre médico-psychologique. Il était également accompagné par une association en lien avec le service pénitentiaire d’insertion et de probation. Il avait retrouvé un emploi depuis sa remise en liberté.

Cet homme "présentait de toute évidence de graves problèmes psychiatriques", a indiqué le procureur de la République de Nantes, Pierre Sennès. Il a confirmé que des contrôles ont eu lieu après la sortie de prison du suspect : le 30 mars, le 30 avril et le 14 mai. L'assaillant "collaborait parfaitement aux mesures judiciaires et obligations, il suivait scrupuleusement les soins dans le cadre de l'injonction de soins".

"S'il y a eu des failles, elles apparaîtront au cours de l'enquête"

Le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti a insisté ce vendredi sur le fait que le suspect avait "purgé sa peine". "Il n'y a pas eu d'aménagement", a confirmé le garde des Sceaux. "Il avait un suivi socio-judiciaire qu'il a respecté complètement : domiciliation et travail". "Dans notre pays, quand un homme a purgé sa peine, il a purgé sa peine et quand il a un suivi socio-judiciaire, il est tenu de le respecter, ce qui semble être le cas", a souligné le ministre devant les journalistes.  "S'il y a des failles, elles apparaîtront au cours de l'enquête. S'il y a des failles, je dirais ce que j'ai à dire et je ferai ce que j'ai à faire. En l'état, il a purgé sa peine".

Selon nos informations, il y aurait eu plusieurs incidents au cours de sa détention. Il avait notamment été condamné en 2013 à cinq mois d'emprisonnement pour agression sur un surveillant. 

"Un profil hybride" : radicalisé et malade psychiatrique lourd

L'individu a été diagnostiqué schizophrène en 2016. Il se disait "possédé par le mal". Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, qui s'est rendu ce vendredi sur place a  confirmé devant les journalistes que le suspect était "psychiatriquement atteint" et qu'il était un "schizophrène sévère". "Il était médicalement suivi pour cela", a souligné le ministre. 

Une source proche du dossier a indiqué que l'homme présentait "un profil hybride, radicalisé et malade psychiatrique très lourd". Sur LCI, son avocat Me Vincent de La Morandière décrit un homme au profil complexe. "Il était en prison à l'extérieur, il était aussi en prison à l'intérieur. Son état psychologique s'est dégradé au fur et à mesure de ses incarcérations". 

L'ex-avocat du suspect : "Son état psychologique s'est dégradé au fur et à mesure de ses incarcérations"Source : TF1 Info

Suivi par le renseignement pénitentiaire

L'individu qui a agressé la policière ce vendredi matin était fiché pour radicalisation, a indiqué le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin. "Cet individu Français né en France est connu des services de police, sortait de prison et en 2016 il avait été signalé pour une pratique rigoriste de l'islam pour radicalisation et ainsi inscrit au fichier FSPRT" (Fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste), a-t-il dit, précisant que l'assaillant "avait agressé" les gendarmes "en tirant sur eux", lesquels "ont riposté". 

"Il n'a jamais été condamné pour terrorisme, pour complicité ou apologie du terrorisme. Il a toujours été emprisonné ou condamné pour des faits de droit commun, avec grande violence, mais des faits de droit commun", a précisé le ministre de l'Intérieur. Né à Saint-Nazaire, il était suivi par le renseignement pénitentiaire pour pratique dure de sa religion.

La question du lien éventuel entre la radicalisation du suspect en prison et son passage à l'acte "reste en suspens" à ce stade, a indiqué le procureur. C'est pourquoi le parquet de Nantes va donc continuer de diriger l'enquête à ce stade. "Cette situation est susceptible d'évoluer".


La rédaction de TF1info

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