Prostitution des mineurs, "proxénétisme de cité"... La traite et l'exploitation d'êtres humains augmente en France

Publié le 22 octobre 2021 à 18h21
Prostitution des mineurs, "proxénétisme de cité"... La traite et l'exploitation d'êtres humains augmente en France
Source : LOIC VENANCE / AFP

AU RAPPORT - Les infractions pour traite et exploitation d'êtres humains a bondi de 31% entre 2016 et 2019, révèle une étude ministérielle dévoilée ce vendredi. Parmi les victimes, le nombre de mineurs sous la coupe de proxénètes s'est multiplié en quelques années.

C’est la première fois qu’un rapport ministériel s’attelle à ce fléau : un service dépendant du ministère de l'Intérieur a indiqué dans une étude publiée ce vendredi 22 octobre que les infractions de traite et d'exploitation des êtres humains enregistrées en France avaient bondi ces dernières années, exception faite de l’année 2020. Elles ont ainsi augmenté de 31% entre 2016 et 2019, soit avant la période particulière de crise sanitaire, précise ce rapport du Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI), le premier sur cette thématique.

En 2019, 933 procédures pour traite ou exploitation d'êtres humains ont été ouvertes par les services de police et de gendarmerie, contre 710 en 2016. En revanche, les nombres de procédures ont chuté à 772 en 2020, "probablement en lien avec la crise sanitaire et les différents confinements", suggère le SSMSI dans son analyse. Le nombre de "victimes, mis en cause et personnes poursuivies et condamnées" a aussi diminué sur l'année passée.

Ces dernières années, le nombre de personnes condamnées pour des infractions de traite et d'exploitation des êtres humains a en revanche progressé : elles étaient 993 en 2019, soit 46% de plus qu'en 2016. Mais l’ensemble des "données enregistrées par les institutions" seraient sous-estimées car elles "ne reflètent que la partie visible de la traite et l’exploitation des êtres humains", nuance le SSMSI. Selon une enquête sur les victimes de traite citée par l'analyse ministérielle, "en 2020, seules 28% des victimes accompagnées par les associations ont déposé plainte"

De plus en plus de jeunes filles victimes de proxénétisme

Plus de la moitié des procédures en question sont ouvertes pour proxénétisme, faisant des victimes de plus en plus jeunes. La part de mineures parmi elles a plus que doublé en l'espace de quatre ans : elle est passée de 12% à 33% entre 2016 et 2020, relève le rapport. Le SSMSI a recensé 400 victimes l’année passée, contre 116 quatre ans auparavant. "Depuis 2018, le phénomène de l'exploitation sexuelle de personnes mineures ou jeunes majeures de nationalité française augmente", en particulier chez les jeunes filles, commente l'étude. Un constat également partagé "par les forces de l'ordre et la société civile" depuis 2017, estiment les auteurs. 

En juillet dernier, un groupe de travail sur la prostitution des mineurs, mis en place par le secrétaire d’État chargé de la protection de l’enfance, révélait dans un rapport que le nombre de mineurs prostitués en France étaient estimés par les associations entre 7000 et 10.000, même si ces chiffres restaient approximatifs et peut-être sous-évalués. Les mineurs les plus touchés sont des jeunes filles de 15 à 17 ans, souvent en rupture familiale. Près de la moitié des victimes ont par ailleurs subi des violences intrafamiliales et/ou sexuelles pendant leur enfance. 

L'ampleur du phénomène est aussi à mettre en lien avec le développement depuis 2015 d’un "proxénétisme de cité", défini comme "l'exploitation sexuelle de jeunes femmes mineures ou majeures désocialisées (…) par des délinquants originaires de cité", précise une étude du Service d'Information, de Renseignement et d'Analyse Stratégique sur la Criminalité publiée en mars 2021 et citée par le groupe de travail ministériel. Cette situation s’est aggravée avec la crise sanitaire, puisque "en 2020, plus de 85% des mineures victimes de proxénétisme l'étaient au titre du proxénétisme de cité"

Le rapport note toutefois que les jeunes filles "issues de familles plus favorisées ne sont pas à l'abri". Les réseaux sociaux ont aussi joué un rôle d’"amplificateur" dans la prostitution de mineurs, beaucoup utilisés par les proxénètes pour leur recrutement. 


La rédaction de TF1info (avec AFP)

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