Fiché par Monsanto, un chercheur breton porte plainte

Publié le 15 mai 2019 à 3h09, mis à jour le 15 mai 2019 à 7h27

Source : JT 20h WE

POLÉMIQUE - Monsanto a constitué un fichier avec les noms d'environ 200 personnes pour tenter de les influencer sur des sujets comme les OGM ou le glyphosate. Une pratique illégale qui a conduit des sociétés et des particuliers à porter plainte contre la firme.

"Cela ne m'étonne pas vraiment et c'est même une reconnaissance de mon rôle de lanceur d'alerte". Presque vingt ans après avoir entamé des recherches sur les pesticides et démontré le caractère potentiellement cancérogène du Round Up, Robert Bellé a découvert son nom, la semaine passée dans le fichier de Monsanto. Au fil des ans, la firme américaine a constitué une liste d'environ 200 personnalités (chercheurs, journalistes, politiques, etc.) et de leur propension à être influencé sur la question du glyphosate ou celle des OGM. Une démarche illégale contre laquelle le chercheur breton a décidé de porter plainte. 

Dès 1999, avec son équipe de la Station Biologique de Roscoff, Robert Bellé étudie les pesticides et dresse des études comparatives, raconte France 3. Très vite, il découvre que le Round Up est le plus toxique des produits étudiés. Ces résultats sont publiés en 2002 dans une revue de référence Chemical Research Of Toxicology. Dès lors, il raconte à France 3 avoir fait l'objet d'intimidations. Ses conférences sont annulées, ses crédits de recherches réduits. Il n'apprendra qu'en 2017, via l'affaire des Monsanto Papers, qu'il était directement visé par la firme. 

Des fichiers qui existent "très probablement" dans d'autres pays

Comme lui, les instituts de recherche de l'Inra et du CNRS ont décidé de porter plainte. Révélée jeudi par France 2, cette affaire a obligé Monsanto a réagir publiquement. Après avoir présenté dimanche ses excuses, le groupe allemand Bayer, qui a racheté en 2018 Monsanto, a indiqué lundi que ce type de fichiers existait "très probablement" dans d'autres pays européens que la France. Les documents en question datent de 2016, c'est-à-dire avant le rachat par Bayer du géant américain des pesticides et des OGM.

Les noms de plusieurs chercheurs, chercheuses et dirigeants de l'Inra et du CNRS figurent dans les fichiers établis par l'agence Fleishman Hillard pour le compte de la société Monsanto, confirment lundi les deux organismes, qui "protestent contre une telle utilisation de données personnelles et expriment leur indignation face à ces pratiques". "Un débat public serein sur l'utilisation des pesticides en général et du glyphosate en particulier est nécessaire. Les chercheurs de l'Inra et du CNRS y contribuent, sur la base d'expertises collectives et transparentes", concluent les deux organismes.

Vendredi, dès le lendemain des révélations sur ces fichiers, la justice française a ouvert une enquête sur des soupçons de fichage illégal pour le compte du géant américain Monsanto de centaines de personnalités et médias. Cette enquête fait suite à une plainte déposée par le quotidien Le Monde et l'un de ses journalistes, qui figurait dans les fichiers incriminés. Elle vise notamment le chef de "collecte de données personnelles par un moyen frauduleux, déloyal ou illicite" dans ses investigations.


La rédaction de TF1info

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