"Force disproportionnée" : le policier qui avait frappé un élève près du lycée Bergson à Paris jugé ce jeudi

Publié le 10 novembre 2016 à 12h03
"Force disproportionnée" : le policier qui avait frappé un élève près du lycée Bergson à Paris jugé ce jeudi

LOI TRAVAIL – Le policier qui avait asséné un violent coup de poing en mars dernier à un adolescent à proximité du lycée Bergson lors d’une manifestation contre le texte de Myriam El Khomri comparaît ce jeudi devant le tribunal correctionnel de Paris. Il est jugé pour "violences volontaires par personne dépositaire de l'autorité publique".

La vidéo, d'un peu plus de 30 secondes, a été visionnée des millions de fois depuis le 24 mars. Elle a été mise en ligne le jour même des faits, qui s’étaient déroulés à proximité du lycée Bergson dans le 19e arrondissement de Paris alors que la contestation contre la loi Travail était grandissante. 

Sur les images, trois policiers entourent un jeune homme qui se trouve au sol. "Lève-toi, lève-toi !" hurle l'un d'eux. Puis deux fonctionnaires redressent l'adolescent, âgé de 15 ans, avant que le 3e ne lui assène un violent coup de poing en plein visage. Le garçon bascule en arrière et tombe au sol. En fond sonore, la voix de ses camarades, bouleversés par ce qu'ils viennent de voir… 

La police des polices (IGPN) avait été saisie dès le lendemain. Bernard Cazeneuve, le ministre de l'Intérieur, s'était dit "très choqué" par la scène. Ce jeudi, le fonctionnaire, poursuivi pour "violences volontaires par personne dépositaire de l'autorité publique", comparaît devant le 10e chambre du tribunal correctionnel de Paris. 

"Une force disproportionnée"

 

Face aux enquêteurs de l'IGPN (Inspection générale de la police nationale, la "police des polices"), ce policier, âgé de 26 ans, a livré ses explications. Au mois de septembre, Libération a publié quelques extraits du procès-verbal. Selon nos confrères, il a tout d'abord évoqué un contexte "dangereux" avant d'ajouter : "Lorsque mon bras s’est lancé, la tête s’est baissée et c’était trop tard pour s’arrêter". Il a aussi assuré qu'il voulait viser "le plexus" du jeune homme et non sa tête. 

"Confronté aux enregistrements vidéo qui mettaient à mal sa relation des événements", le policier a campé sur sa position avant de changer de version. "A l’issue de nouvelles auditions, le gardien de la paix reconnaissait […] avoir usé à tort d’une force disproportionné", avait conclu l’IGPN.

Nez cassé et trauma

Dans une interview diffusée ce jeudi sur France Info, à quelques heures du procès de son agresseur, le jeune Adan (ndlr : le prénom a été modifé), dont le nez avait été cassé, déclare qu'il se souvient "très bien du policier et de son poing". Il indique qu'il lui arrive désormais souvent de "se bloquer" quand il croise des fonctionnaires de police dans la rue. Ce jeudi, il reverra pour la première fois en face à face celui qui l'a frappé. Ses attentes : "Comprendre pourquoi il a fait ça". 

Outre ses blocages dans la rue, son père souligne que son fils va mal depuis le printemps, qu'il va "voir un psychologue", qu'il "fait des cauchemars" et qu'il "ne dort pas bien. "Je ne sais pas pourquoi ce policier a frappé mon enfant", s'interroge-t-il, en soulignant attendre également des réponses… voire des excuses.   Des comités de soutien, au jeune homme comme au policier, ont d'ores et déjà annoncé leur venue au tribunal jeudi après-midi. 

Un second procès disjoint

Ce procès sera suivi d'un autre, similaire, dans les mois qui viennent. Mi-octobre, le tribunal a  en effet refusé de joindre, comme le demandait l'avocat d'Adan, à ce dossier celui d'un deuxième policier poursuivi pour violences sur un autre élève, le même jour au même endroit.  Pour cette seconde affaire, le tribunal a finalement ordonné un supplément d'information afin de déterminer s'il existe d'autres victimes et d'entendre un témoin. L'audience a donc été renvoyée au 16 juin 2017. Des vidéos montrent notamment un policier en civil, visage dissimulé par un foulard et une capuche, donner des coups de matraque à des élèves.

Le débat sur les violences, qu'elles soient le fait de manifestants ou de policiers, a rythmé la mobilisation du printemps contre la loi Travail. Un collectif a adressé au Défenseur des droits 68 réclamations, dénonçant des coups de matraque et des jets de gaz lacrymogènes gratuits, ainsi que des insultes, à Paris comme dans le reste de la France. Selon le ministère de l'Intérieur, quelque 600 membres des forces de l'ordre ont de leur côté été blessés en marge des manifestations.


Aurélie SARROT

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