Michel Catalano, l'imprimeur otage des frères Kouachi, a encore "une boule au ventre" chaque matin

par Amandine REBOURG Amandine Rebourg
Publié le 2 septembre 2020 à 16h28, mis à jour le 3 septembre 2020 à 8h46

Source : JT 13h Semaine

TÉMOIGNAGE - Cinq ans après, le procès des attentats de janvier 2015 s'est ouvert ce mercredi 2 septembre à Paris. De quoi faire remonter des souvenirs douloureux pour ceux qui ont vécu directement le drame, à l'image de Michel Catalano, cet imprimeur de Dammartin-en-Goële pris en otage par les frères Kouachi.

"La nuit n’a pas été facile", lâchait-il ce mercredi matin avant d’entrer dans la salle d’audience, confiant aux équipes de TF1 ressentir "une certaine pression" face à ce "moment important". Michel Catalano, imprimeur de Dammartin-en-Goële (Seine-et-Marne), est bien conscient que le procès des attentats de janvier 2015, qui va se tenir durant deux mois à Paris, ne lui rendra pas sa vie d'avant. Mais il espère malgré tout obtenir des réponses aux questions qui le hantent depuis cinq ans. Depuis que les frères Kouachi ont fait irruption dans son imprimerie pour se cacher des forces de police. 

"Comment ont-ils réussi à passer les barrages ?"

En janvier 2015, deux jours après le massacre perpétré à la rédaction de Charlie Hebdo, les frères Kouachi font irruption dans l'entreprise de Michel Catalano. Tout de suite, le patron comprend la situation et envoie son seul employé présent avec lui, Lilian Lepère, 26 ans, se cacher dans un meuble à l'étage, tandis que les terroristes le prennent en otage et échangent des coups de feu avec les forces de l'ordre. 

Lilian Lepère restera caché plus de huit heures, parvenant à échanger des messages depuis son téléphone avec le GIGN. Michel Catalano, lui, parviendra à s'échapper après avoir soigné l'un des terroristes blessés. Alors depuis, il se pose des questions : "comment ont-ils réussi à passer les barrages ? Qui les as aidés et comment cela fonctionnait ? Pourquoi ont-il réussi à faire autant de choses ?", se demande-t-il encore. Ce procès sera pour lui une "façon de tourner une page supplémentaire. Car toutes n'ont pas encore été tournées. 

Il y a quelque chose qui ne s'évacue pas comme ça aussi facilement
Michel Catalano, imprimeur à Dammartin-en-Goële

Il confie ainsi dans le reportage de TF1 en tête de cet article avoir encore tous les matins une "boule au ventre" lorsqu'il se rend à son travail. Sur le parking de l'imprimerie, l'une de ses voitures de collection, au pare-brise criblé de balles, n'a pas bougé. "Je n'ai pas réussi à la détruire parce que c'est un témoignage de la violence (...) il y a quelque chose qui ne s'évacue pas comme ça aussi facilement", explique-t-il. Alors certes, il aurait pu déménager, reconstruire sa vie ailleurs, sous des cieux plus tranquilles et moins chargés de symbole. Sa femme le lui a proposé, mais il a refusé. "Je souhaitais me relever exactement au même endroit et je continue à marcher à l'endroit où je suis tombé. Sinon, je crois que je n'aurais pas été complètement reconstruit même dans ma tête, j'aurais eu toujours l'impression que j'étais parti, que j'avais fait fui cet endroit qui me plaisait beaucoup", se justifie l'imprimeur.

Alors pour faire face à ce passé terriblement présent, il a rebâti un lieu différent, avec sa femme et son fils qui travaillent à ses côtés. Les cicatrices ne s'effacent pas mais sur les murs de son entreprise remise sur pied, il affiche ses phrases, des autographes, ses passions passées ... Une manière pour lui de se souvenir de l'homme qu'il est et qu'il souhaite redevenir :"Avant, j'étais un hyperactif. Je faisais plein de choses comme du saut à l'élastique, j'étais président de club... Je m'y remets tout doucement par petites phases, mais il me faudra encore un certain temps, confie-t-il. Il faut que j'arrive encore à évoluer suffisamment pour me donner l'envie de le faire. Je suis en chemin et chaque jour, j'essaye d'avancer un peu plus".


Amandine REBOURG Amandine Rebourg

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