Procès des attentats de janvier 2015 : "Le terrorisme, je sais pas ce que ça veut dire"

Publié le 20 octobre 2020 à 17h48
Procès des attentats de janvier 2015 : "Le terrorisme, je sais pas ce que ça veut dire"
Source : AFP/Benoit Peyrucq

JUSTICE – Poursuivi pour avoir participé à la recherche et à la fourniture d'armes d'Amedy Coulibaly et des frères Kouachi, le Belge Michel Catino est interrogé ce mardi sur les faits qui lui sont reprochés. Des faits qu'il conteste.

"Je reconnais que j'ai transporté un sac, c'est quelque chose que j'aurais pas dû faire. Mais tout le reste je reconnais pas. Je suis pas un terroriste, je suis pas en lien avec le terrorisme. Je sais pas ce que ça veut dire. En 2015, c'est la première fois que j'ai entendu ça. Mon seul but, c'est de jouer. Je regarde pas la télé, je lis pas les journaux, pas de politique." Au début de son interrogatoire ce mardi, c'est spontanément que Michel Catino, 68 ans, a tenté mettre des mots sur sa situation. 

Ce Belge de 68 ans, accro aux jeux, est soupçonné notamment d'avoir, avec les accusés Metin Karasular, Ali Riza Polat, Abdelazziz Abbad et Miguel Martinez, recherché des armes pour les auteurs des attentats de janvier 2015. Et d'avoir transporté un sac en contenant. 

Considéré comme "l'homme de main", "l'homme à tout faire" de son voisin de box, Metin Karasular, qui est aussi son ami de 30 ans, Michel Catino a travaillé à ses côtés dans un café avec des jeux clandestins. Puis, une fois l'endroit fermé, de lui avoir "donné quelques coups de mains pour des pneus dans son 'garage'". C'est là, d'ailleurs, qu'il aurait rencontré Ali Riza Polat, ainsi qu'Abdelazziz Abbad et Miguel Martinez, qui se faisait appeler "Abdullah".

"Jouer, c'est mon hobby"

Dès son propos liminaire donc, le Belge reconnaît quelques escroqueries en échange de billets pour financer ses dépenses dans les jeux. "Moi, il me fallait de l'agent pour jouer, c'est mon hobby. Un jour, je suis resté cinq jours sans manger ni dormir, à jouer", confie l'accusé, crâne dégarni, cheveux poivre et sel tombants, lunettes sur le nez ce mardi et veste Jordan sur les épaules. 

Moyennant 500 euros, Michel Catino aurait transporté un sac entre Paris et Revin, dans les Ardennes, sans le toucher ni en connaître le contenu. Selon lui, Ali Riza Polat l'aurait déposé dans le coffre de sa voiture, et Miguel Martinez l'aurait récupéré à l'arrivée. Le sexagénaire admet aussi avoir fait dans les stupéfiants avec Abdelazziz Abbad. "C'était de l'héro je crois, de l'héro à snifner, (sic) snifer". Abbad serait ainsi venu chez lui avec une tierce personne, "un homme blanc", pour "goûter la came".

Un message le 7 janvier 2015 à 11h56

Michel Catino dit ainsi avoir été en contact physique et téléphonique avec tous ces accusés précités mais pas pour les raisons qui lui sont exposées depuis sa mise en examen. Me Cechman, avocate de la partie civile, lui rappelle que "le 7 janvier, à 11h56, juste après l'attentat de Charlie Hebdo, sa ligne appelle une ligne utilisée par le duo Abbad-Martinez". "C'est moi qui appelle ? Vous êtes sûre de ça ? C'est pas possible", répond l'accusé, qui, sans nier l'échange d'une minute, le justifie par une dette d'argent liée aux stups. 

Le 8 janvier, sa ligne de téléphone est coupée. Michel Catino explique l'avoir fait après que sa belle-fille lui a montré les images de l'Hyper Cacher à la télé et la photo du terroriste sur l'écran. "Là je vois la photo du Noir, que j'avais vu avec Polat. J'étais un peu mal. Le soir j'ai été chez Metin, j'ai dit 't'as vu à la télé, ce qu'on a montré ?' Je lui dis 'je crois que c'est le Noir qui est venu au garage'. Metin se sentait mal, avec la Mini (la Cooper achetée à Coulibaly ndlr), qui avait pas été payée, il m'a demandé de couper mon téléphone. Je lui ai dit mon téléphone est dans la voiture, il est éteint. J'ai laissé le téléphone dans la voiture, éteint", souligne-t-il, indiquant ne l'avoir jamais rallumé et en avoir acheté un autre une dizaine de jours plus tard. 

Selon Michel Catino, l'histoire pour lui s'arrête donc là, aux stups, à un transport de sac dont il ignorait le contenu et à deux fusils de Karasular, " un fusil à pompe qui était vieux, un autre sans chargeur" qu'il a gardés chez lui. "Pour les fusils, c'était la première fois que j'avais des fusils chez moi. Et ce sera la dernière fois. Vous pouvez le noter", promet-il, avant d'embrayer : "Faut pas me mettre des trucs de terroriste sur la tête."


Aurélie SARROT

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