Procès du "bijoutier de Nice" : autodéfense ou légitime défense, de quoi parle-t-on ?

Publié le 28 mai 2018 à 15h33
Procès du "bijoutier de Nice" : autodéfense ou légitime défense, de quoi parle-t-on ?

DÉCRYPTAGE - L'ancien bijoutier niçois Stéphane Turk comparaît lundi devant les assises des Alpes-Maritimes, accusé de meurtre pour avoir abattu en 2013 un jeune homme qui venait de braquer sa boutique. S'il se défend d'un acte de légitime défense, la famille de la victime assure qu'il s'agissait d'autodéfense.

Légitime défense ou autodéfense ? Cette question est au cœur du procès de Stéphane Turk, 72 ans, jugé à partir de ce lundi devant les assises des Alpes-Maritimes pour le meurtre d'un jeune homme.

Les faits remontent au 11 septembre 2013. Ce commerçant d'origine libanaise, brutalisé et forcé de remettre le contenu de son coffre-fort à deux braqueurs casqués, avait fait feu à trois reprises depuis le seuil de son commerce avec un pistolet semi-automatique alors que ses agresseurs prenaient la fuite. L'une des balles avait touché mortellement dans le dos Antony Asli, 19 ans, qui s'enfuyait sur un scooter avec un complice, condamné depuis en appel à 10 ans de prison.

Deux parties qui s'opposent

Avant de savoir s'il s'agissait de légitime défense ou d'autodéfense, il convient dans un premier temps de définir les deux termes. Plusieurs conditions - encadrées par l'article 122-5 du Code pénal - doivent être réunies pour que la légitime défense soit reconnue : la riposte doit être absolument nécessaire, elle doit intervenir dans le même temps que l'agression, et, enfin, le moyen utilisé doit être proportionnel à celui de l'attaque.  

L'article 122-6 prévoit aussi une présomption de légitime défense dans deux cas : lorsque les faits se déroulent durant la nuit et s'il y a de la violence. 

On parle d'autodéfense lorsque la riposte n'est pas justifiée ou qu'elle est disproportionnée et que la personne fait donc justice-elle même. 

"Savoir s'il s'agissait de légitime défense ou d'autodéfense sera tout l'enjeu de ce procès", estime Me Thierry Vallat, avocat au barreau de Paris. "Il y a déjà eu des acquittements dans le passé pour ce type d'affaires, mais on a du mal à l'imaginer dans ce procès". 

Dans une société civilisée, il n'y a pas de place pour l'autodéfense, la vengeance privée ou la légitime défense des biens
Me Philippe Soussi, avocat de la partie civile

Pour l'avocat du bijoutier Me Franck de Vita, Stéphane Turk "n'avait pas d'autre solution que de se défendre" et il était à nouveau menacé lorsqu'il a tiré. Une thèse contraire à ce que disent deux rapports d'expertise balistique et technique versés au dossier. La famille Asli, partie civile, reproche au commerçant de s'être fait justice lui-même. "Dans une société civilisée, il n'y a pas de place pour l'autodéfense, la vengeance privée ou la légitime défense des biens", souligne leur avocat.

Sur les images de vidéosurveillance du magasin, le tribunal pourra revoir le calvaire de l'accusé, victime de "violences totalement gratuites" selon l'accusation. Il venait de désactiver l'alarme et préparait l'ouverture, le rideau métallique semi-abaissé, quand il a été dévalisé. La séquence de 2 minutes 43 secondes fixe aussi le laps de temps où les agresseurs repartent avec le butin dans un sac en menaçant leur victime d'un fusil à pompe. Stéphane Turk récupère alors le pistolet près du comptoir, enclenche le chargeur, s'avance avec l'arme dissimulée jusqu'à l'entrée du magasin, et s'accroupit pour faire feu.


La rédaction de TF1info

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