Guillaume Musso : "Avec Central Park, je me suis lancé un défi"

Publié le 27 mars 2014 à 7h55
Guillaume Musso : "Avec Central Park, je me suis lancé un défi"

INTERVIEW – L'écrivain français Guillaume Musso publie jeudi son 11e roman, "Central Park" (XO Editions), un thriller psychologique à rebondissements qui débute à New York, la ville de son coeur. Son inspiration, son goût pour les personnages féminins et ses projets.... Il s'est confié à metronews.

Central Park est le titre, mais aussi le point de départ de ce nouveau roman. Est-ce une manière de prolonger votre histoire avec New York ?
Mon goût, ma passion pour cette ville n'est pas nouvelle. Curieusement au début du projet l'intrigue commençait à Hong Kong ! L'idée remonte à trois ans, j'étais en promo là-bas, et je me suis lancé un défi de romancier : placer dès la première scène deux personnages dans une situation inextricable, en m'interdisant toute explication surnaturelle. Le truc le plus excitant, et compliqué à faire, c'était un homme et une femme, qui se réveillent menottés l'un à l'autre sans savoir comment ils sont arrivés là. J'ai pensé aux quais de Hong Kong, au Pic Victoria aussi... J'attendais une manière de dénouer ce pitch et comme souvent la réponse est venue des personnages. Comme dans les livres, comme dans les séries que j'aime, on a besoin d'être en empathie avec les héros. Le déclic est venu du personnage d'Alice, sur son passé, et le drame personnel au cœur du livre. Entre-temps, je suis passé de Hong Kong à New York ! Parce que j'adore cette ville et que j'avais envie de montrer certains quartiers qu'on ne connaît pas toujours comme Astoria, qu'on surnomme la Little Egypt.

D'un roman à l'autre, on remarque votre obsession du rythme, de la vitesse. Est-ce quelque chose que vous travaillez consciemment ?
Ça aussi c'est l'influence des séries télé. Central Park commence à 8h du matin et termine à minuit. C'est une intrigue en temps réel, hormis les flash-backs qui nourrissent les personnages. J'adore Hitchock et j'ai beaucoup relu ses entretiens avec Truffaut. Il expliquait qu'il voulait toujours que sa caméra permette au spectateur de faire une sorte de ménage à trois avec les héros. Ma volonté en écrivant c'est ça : entraîner le lecteur au cœur de l'intrigue et lui proposer une expérience de lecture moderne, excitante.

C'est votre 11e roman. Comment surprendre à raison d'un livre par an ?
Je ne veux pas entrer dans une sorte de confort, que les gens se disent "un Guillaume Musso c'est forcément ça". Le déclic est venu il y a quatre ans, lorsque j'ai écrit L'Appel de l'ange. A l'époque, beaucoup de gens, des lecteurs comme des critiques, ont souligné le côté suspense, la dimension thriller là où dans l'esprit de certains je faisais toujours des histoires d'amour avec du surnaturel. Aujourd'hui je poursuis dans cette voie parce que c'est ce qui me correspond en tant que lecteur. Et je continue mon lent travail de "décollage des étiquettes". (sourires)

"Chez moi c'est souvent la femme le moteur de l'action"

Chez vous il y a toujours un personnage féminin fort, et cette fois vous avez raconté son passé à la première personne. Est-ce un exercice périlleux ?
Je le fais de façon assez naturelle. Lorsqu'on me demande de quel personnage de mes livres je me sens le plus proche, les gens s'attendent toujours à ce que je réponde Tom Boyd, l'écrivain de La Fille de Papier alors que non. Ecrire un personnage féminin à la première personne, curieusement, me permet de me livrer davantage. Et puis je joue pas mal avec l'inversion des rôles. Chez moi c'est souvent la femme le moteur de l'action, encore plus dans celui-là. Les hommes, en revanche, sont assez sensibles, ils n'ont pas peur d'assumer leur part de féminité. Ce n'est pas neuf, bien sûr. On trouvait ça dans les comédies américaines des années 1940 que j'adore. Mais je trouve que ça correspond bien à notre époque.

En lisant un Musso, on apprend donc plein de choses sur vous ?
Evidemment. J'aime beaucoup cette phrase de Paul Auster qui dit que le livre est le seul lieu au monde où deux étrangers peuvent se rencontrer de façon intime. Quand on lit, on est dans l'intimité de l'auteur. Il faut savoir la trouver, elle est cachée sous différentes strates de fiction. De toute façon j'essaie toujours d'écrire mes romans à deux niveaux. Il y a le côté "page turner", l'intrigue rapide, et puis je décline un thème qui m'est cher. Le deuil, la vieillesse, la maladie... Dans Central Park, il est notamment question de quête d'identité. Se réveiller à 8h du matin à New York, alors qu'on était à Paris la veille, c'est assez flippant, non ? (sourires).

Vous avez teasé Central Park sur votre page Facebook, en dévoilant la couverture, un bout de l'intrigue, etc jusqu'à la sortie. Prenez-vous plaisir à faire monter la pression avant chaque sortie ?
Oui, c'est un jeu, et c'est fait de façon très artisanale puisque je gère moi-même ma page Facebook. Lorsque vous regardez une bande-annonce de film longtemps à l'avance, vous finissez par avoir l'impression qu'il est déjà sorti. Or je reste très attaché à ce rendez-vous annuel avec les lecteurs. J'écris presque chaque jour, je consacre tout mon temps à ça et lorsque je présente mon travail aux lecteurs, j'ai envie de préserver la surprise, sans que ça fasse partie d'une stratégie marketing bien établie. Vous savez certains lecteurs me disent qu'ils ne lisent même pas la quatrième de couverture !

"J'ai envie de créer un couple d'enquêteurs récurrents"

Les Français consacrent de moins en moins de temps à la lecture. Ça vous surprend ? Ça vous déçoit ?
Les chiffres récents confirment ce qu'on voit tous les jours en prenant le métro, le train ou l'avion. Après les gens restent attachés au livre puisque ça reste leur deuxième loisir préféré. Et puis la France garde un réseau de distribution assez dense par rapport à certains pays. Le numérique ? Ça augmente, mais ça reste marginal dans mes ventes. Ce pourquoi je soigne de plus en plus le visuel de mes romans, avec un visuel, un papier de qualité. Ce qui m'a frappé dans l'étude publiée par Livres Hebdo, c'est ce qui motive les gens à lire. En numéro 1 ils citent l'histoire, en 2 le fait que quelqu'un leur a conseillé. Ça, c'est assez réconfortant : la meilleure façon d'inciter à la lecture, c'est de parler de ses goûts, ses découvertes autour de soi.

Faut-il faire des romans plus courts pour attirer le lecteur actuel ?
Pas forcément. L'un des derniers romans qui m'a donné beaucoup de plaisir, c'est le Joël Dicker. Or la taille n'a pas découragé les gens, bien au contraire. Vous savez je fais partie d'une génération à la confluence de l'écriture et de l'image. Et d'après moi des formes différentes existent pour chaque histoire.

Un Musso de 1 000 pages, ce n'est pas pour demain ?
Non, en revanche j'ai envie de créer un couple d'enquêteurs récurrents, dont les aventures alterneraient avec une histoire indépendante. J'ai envie d'avoir des personnages qui vieillissent avec moi. Du moins je veux essayer (sourire).


La rédaction de TF1info

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