"Nous avons commencé à perdre espoir et patience" : Ingrid Chauvin lève le voile sur son combat pour adopter

Propos recueillis par Rania Hoballah
Publié le 11 juin 2019 à 11h18

Source : Sujet TF1 Info

INTERVIEW – Il y a 5 ans, Ingrid Chauvin et son mari Thierry Peythieu lançaient une procédure d'adoption. Alors que leur agrément se termine en novembre prochain, ils sont revenus sur leur parcours du combattant dans un documentaire diffusé ce lundi 10 juin sur TF1. L'actrice se confie auprès de LCI.

Cela fait 5 ans qu'ils attendent. Après le décès en 2014 de leur petite fille Jade, âgée d'à peine 5 mois, Ingrid Chauvin et son mari Thierry Peythieu ont entamé des démarches pour adopter un bébé. Alors que le couple obtient enfin son agrément, la comédienne tombe enceinte et donne naissance en 2016 au petit Tom. Si la procédure s'en retrouve ralentie, ils ne perdent pas espoir et espèrent encore pouvoir accueillir un petit frère ou une petite sœur pour Tom. Malheureusement, les choses ne se passent pas comme prévu...

Alors que leur agrément se termine en novembre prochain, l'héroïne de "Demain nous appartient" a accepté de raconter avec beaucoup de sincérité son quotidien semé d’embûches dans un documentaire bouleversant, qui pointe du doigt les dysfonctionnements du système d'adoption français. Un programme diffusé en deuxième partie de soirée lundi soir, après le prime de "Demain nous appartient", qui a largement séduit les téléspectateurs : ils ont été en moyenne 980.000 devant leur poste. L'actrice se confie auprès de LCI.

LCI : D'où est venue votre envie de faire un documentaire sur un sujet aussi intime ?

Ingrid Chauvin : Ce sont mes producteurs qui m'ont proposé cette démarche. J'ai beaucoup réfléchi car il fallait que ce soit en toute transparence et qu'on y apprenne véritablement des choses. J'ai accepté en me disant que ce serait un bon moyen pour lever le voile sur ce projet du cœur magnifique, mais semé d'embûches. Certains couples qui n'ont pas d'enfant s'imaginent une démarche idéaliste, mais ce n'est pas le cas. Ces enfants ont déjà une lourde histoire, quel que soit leur âge, ils ont déjà un traumatisme dû à l'abandon. Il faut trouver les meilleurs parents pour un enfant, et pas l'inverse.  

Vous attendiez-vous à ce que ce soit aussi difficile d'adopter ?

Franchement, non. On savait juste que c'était long et qu'il est très difficile à présent d'adopter à l'étranger. Beaucoup de pays privilégient les adoptions locales pour ne pas déraciner l'enfant. Quand nous avons obtenu notre agrément, on nous a dit qu'on pourrait espérer adopter une petite pupille d'ici deux ans. Mais voyant l'échéance arriver, nous avons commencé à perdre espoir et patience. J'aurais pu essayer d'avoir un deuxième enfant naturellement, mais cette démarche de sauver la vie, de donner de l'amour à un enfant qui en a besoin, c'est quelque chose qui nous tient à cœur. 

Aujourd'hui, 10% de couples seulement arrivent à adopter. C'est trop peu quand on sait le nombre d'enfants en souffrance.
Ingrid Chauvin

Dans le documentaire, vous allez visiter une pouponnière. Ça a été un moment marquant pour vous ? 

Cette journée m'a bouleversée. Je n'arrête pas de repenser à ces bouts de choux qui n'ont rien demandé et qui sont dans un désarroi total. Les équipes qui s'occupent de ces enfants sont incroyables. Il y a beaucoup d'enfants délaissés qui pourraient être adoptés, mais en France, on privilégie les liens du sang. Et ce, même si les parent sont incapables mentalement ou physiquement de s'occuper de leurs enfants. On brise tellement de vies. J'ai envie de faire quelque chose pour que ça change, il faut réviser le droit parental pour permettre à ces enfants d'avoir un foyer, une famille. 

Vous avez rencontré le secrétaire d’Etat à la protection de l’enfance, Adrien Taquet. Que lui avez-vous dit ? 

J'ai été heureuse car j'ai rencontré un homme de cœur, ouvert d'esprit. Il a envie de changer les choses. Ma priorité, c'était de lui dire que ces fameux liens du sang ne devraient pas être priorisés. Il y a trop d'enfants en foyer qui souffrent, et ça ce n'est pas possible. Quand les parents sont dans une incapacité mentale ou physique, il faut organiser un délaissement parental réel pour que ces enfants deviennent des pupilles de l'Etat. Il faudrait également aussi créer un lissage national pour l'adoption, afin que tous les départements travaillent ensemble. Ce qui n'est pas le cas pour l'instant. 

Votre agrément se termine en novembre.  Etes-vous prête à faire le deuil de l’adoption ?

Il faut se préparer à faire le deuil de l'adoption, car c'est vraiment usant. C'est très frustrant car on se dit qu'on a tout pour rendre un enfant heureux et lui offrir une vie magnifique. Pourquoi délivrer autant d'agrément pour qu'au final il y ait tant de parents déçus ? Aujourd'hui, 10% des couples seulement arrivent à adopter. C'est trop peu quand on sait le nombre d'enfants en souffrance.

On vous voit parler à votre fils Tom d'un bébé qui n’est pas là mais qui pourrait arriver. Ça doit être très compliqué…

En tant que jeune parents, on est obligés de lui en parler et de le préparer car si un enfant arrive, il ne faut pas que ce soit un choc pour lui. Mais s'il n'arrive pas, ce n'est pas juste non plus pour lui. C'est très difficile à gérer, mais les enfants captent tout. Tom m'a dit un jour au cours d'un repas "Maman, ne t'inquiète pas, on va trouver une petite sœur. Et je serai très gentil avec elle". Ça m'a bouleversée. 

Vous avez traversé beaucoup d’épreuves. Avez-vous encore foi en l’avenir ?

Bien sûr, et c'est ce que je souhaite communiquer aux gens. A partir du moment où on décide de rester en vie alors qu'on a vécu des épreuves terrifiantes, il faut penser à de belles choses et propager du bien. Aujourd'hui, malgré ce deuil qui sera présent jusqu'à la fin de nos jours, on arrive à apprécier les choses qui nous sont offertes. Et presque plus que les autres… 

* "Ingrid Chauvin : Notre combat pour adopter", lundi 10 juin à 23 h 10 sur TF1.


Propos recueillis par Rania Hoballah

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