Le rappeur SCH : ''La violence, la bouteille, la came, j'ai vu tout ça''

par Judith KORBER
Publié le 30 novembre 2015 à 16h01
Le rappeur SCH : ''La violence, la bouteille, la came, j'ai vu tout ça''

INTERVIEW – Le marseillais SCH vient de sortir son premier album "A7", du gangsta rap aux textes bien énervés qui plaira aux puristes du genre. Le rappeur, proche de Lacrim, cartonne avec des clips à la réalisation hyper soignée à l'image de "Gomorra", tourné en partie à Sciampa, haut-lieu de la mafia napolitaine.

A 22 ans, vous sortez A7 votre premier album. Est-ce que c'est un rêve de gosse qui se concrétise ?
Oui, c'est un aboutissement. Ça fait dix ans que je fais de la musique. J'ai commencé seul dans ma chambre. Je travaille avec plus de rigueur depuis un an et demi et avec l'album, on a déjà l'impression d'avoir déjà réussi quelque chose. Les ventes ont l'air de confirmer que ce n'était pas une folie.

Selon vous, qu'est-ce qui vous a permis de sortir de la masse ?
C'est ma différence. De couleur, déjà. Il n'y a pas beaucoup de blancs dans le rap. Et puis, il y a mon univers, très visuel. Dans mes clips, il n'y a pas juste un quartier avec une horde de jeunes.

Est-ce qu'on peut dire que Lacrim vous a mis le pied à l'étrier ?
Oui. Dès qu'il m'a épaulé, j'ai gagné en exposition. Il m'a donné plus qu'un coup de pouce.

Avez-vous eu de ces nouvelles ?
Pas directement depuis qu'il a été incarcéré. J'en ai eu par sa famille et des co-détenus. Ils m'ont dit qu'il allait bien. On devrait échanger par courrier d'ici peu.

"J'ai grandi avec une maman qui avait beaucoup de dettes"

Vos textes parlent de violence, de bouteille, de came. Est-ce que cela reflète ou a pu refléter votre quotidien à Marseille ?
Oui, j'ai vu tout ça, je l'ai aussi un peu vécu et ça m'a beaucoup inspiré. Maintenant, je suis concentré sur la musique.

Sans le rap auriez-vous mal tourné ?
Oui carrément ! Je ne suis pas fait pour taffer de 9 à 5. Sans le rap, je me serai enlisé.

Vous évoquez aussi la crise, "ces pères et ces mères insolvables". Est-ce également quelque chose que vous avez connu ?
Entièrement, c'est une réalité. J'ai grandi avec une maman qui avait beaucoup de dettes. J'ai été confronté aux huissiers et à tout ce système. Je me mets à la place de ces gens qui n'arrivent pas à subvenir à leurs besoins dès le 15 du mois. Je parle aussi de ces pères et mères inconsolables parce que j'ai des frères qui ne sont pas libres. Ce sont des thèmes qui reviennent dans la rue et dans ma musique.

Le titre de l'album A7, ça correspond à quoi ?
C'est une définition de comment je perçois mon rap : la gorge du rap sous mon Gillette. Je recherche mes limites. Je ne les ai toujours pas trouvées.

"SCH, c'est la partie sombre de ma personnalité"

Est-ce qu'il y a aussi le message que tout est possible ?
Oui, bien sûr tout est possible vu de là où on vient. C'est pour encourager les gens à se surpasser eux-mêmes. C'est un son qui peut avoir plusieurs définitions, et qui peut être écouté par des personnes de tous horizons.

Dans la vraie vie, vous êtes aussi énervé que vos textes ?
[Il rigole]. Non, ça serait compliqué, surtout pour les interviews. Je me dois de mettre un petit bémol sur le SCH qui est en moi quand je suis en société. On est victime de beaucoup de clichés si en plus j'étais à 100% dans le personnage, ça serait compliqué à gérer.

SCH, c'est donc un personnage...
Oui, il est en moi. C'est la partie sombre de ma personnalité.

Le "fuck" sur la pochette, il est adressé à qui ?
C'est plus un symbole. Il y a beaucoup de jeunes qui se retrouvent dedans. Et puis, quand j'ai commencé il y a eu cette gimmick ''Que le doigt'' qui m'a suivi jusqu'à aujourd'hui. C'est un clin d'œil. Je pense que l'image est forte, je suis nu, mis à nu, il n'y a que ce doigt. Il y aussi une référence au film Blow (sorti en 2001, avec Johnny Depp - ndlr). C'est tout ce que j'aime.

''Pour tourner à Scampia, ça a été de la débrouillardise"

Certains de vos clips, très bien réalisés, cartonnent sur YouTube, comme "Gomorra" avec 6,3 millions de vues. Vous attendiez-vous à un tel buzz ?
Le son est sorti six mois avant le clip donc la vidéo était attendue mais je ne pensais pas atteindre de tels chiffres. On a pris notre temps pour faire les choses bien. On a beaucoup regardé la série. On s'est imprégné des lieux. Après, pour tourner à Scampia [quartier de la banlieue de Naples aux mains de la mafia, ndlr], ça a été de la débrouillardise. On s'est pris la tête sur le synopsis. Visuellement, ça ressort bien.

Est-ce que les attentats du 13 novembre vous donnent encore plus envie de vous exprimer ?
Ça m'a beaucoup attristé. C'était des innocents. On se retrouve tous en eux. C'est révoltant. Après en tant que citoyen, je suis mal informé. Je ne sais pas de quoi la France est acteur, notamment à l'étranger, donc je préfère ne pas trop parler.

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Judith KORBER

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