DÉCONNEXION ? – Selon une enquête du cabinet de conseil en qualité de vie au travail Eleas, quatre salariés sur dix disent recevoir trop d’informations, en raison notamment des outils numériques. Résultat : ils se sentent submergés et fatigués.
Le droit à la déconnexion, c’était il y a deux ans. Et alors ? Cela a changé quoi ? Malheureusement, pas grand-chose, à en croire le cabinet Eleas qui a publié jeudi une enquête sur "l’impact des outils numériques professionnels sur les salariés".
On s’en doute : les outils numériques font de plus en plus partie du quotidien des salariés. 75% des sondés disent les utiliser plus de 3 heures par jour -soit 8 points de plus qu’en 2016-, ce qui traduit un phénomène de généralisation dans le monde du travail. "Ce mouvement touche désormais des populations qui jusqu’ici étaient éloignées de l’emprise du numérique dans leur quotidien professionnel, comme les salariés de l’industrie. 34% d'entre eux les utilisent plus de 3 heures par jour", analyse le cabinet Eleas.
43% des sondés ont même un usage particulièrement intensif de ces outils en les utilisant plus de 6 heures par jour. La proportion augmente (49%) lorsqu'ils travaillent dans de grandes entreprises et lorsqu’il s’agit de cadres (55%). Et sans surprise, l’usage professionnel déborde largement sur le temps personnel : 47% les utilisent encore le soir après le travail, 45% le week-end et 35% pendant les congés.
Moins de diversité des tâches et de coopération entre collègues
Cette (sur)exposition est pourtant jugée positivement par la majorité des salariés. Ils voient ces outils numériques comme un progrès (45%), qui permet davantage de réactivité dans l’échange d’informations (62%) et plus d’autonomie professionnelle (57%). Mais si ces outils permettent plus de flexibilité (pour 43% des sondés), les salariés émettent en revanche des réserves sur le contenu du travail, qui tendrait à devenir plus répétitif, avec une moindre diversité des tâches (48%), une diminution de la coopération entre collègues (49%) ou encore des rapports plus dématérialisés avec les clients (47%).
Surtout, des effets négatifs sont aussi exprimés. "Un sentiment diffus de 'surabondance d’informations' serait en train de s’installer", note Eleas. "Quatre salariés sur dix estiment qu’ils reçoivent trop d’informations." Ce ressenti culmine à 49% pour ceux qui utilisent les outils plus de 6 heures par jour et 44% pour les cadres. Dans le même temps, 27% d’entre eux ressentent en parallèle un manque de temps pour traiter ces informations. Ils manifestent également de la fatigue (43%), ou encore un sentiment de submersion (36%). "Les effets négatifs de cette surabondance d’informations relativisent l’efficacité attendue des outils numériques professionnels", souligne encore le cabinet.
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Instaurer une culture de la pause
Fait curieux, les jeunes (18-29 ans) se disent plus fragilisés par l’utilisation intense de ces outils professionnels que leurs aînés. Ils sont plus stressés (48%, contre 35% pour l’ensemble des salariés), plus submergés (44%, contre 36% pour l’ensemble des salariés), moins concentrés (44% contre 32% pour l’ensemble des salariés), et plus désorientés (33% contre 22% pour l’ensemble des salariés).
Face à ce constat, le droit à la déconnexion et les quelques mesures prises par les entreprises paraissent bien ténus. 41% des sociétés n’ont ainsi mis en place aucune action, 23% ont diffusé des chartes de bonnes pratiques et seules 16% ont élaboré des règles de déconnexion.
Ce sont donc les salariés, à leur niveau, qui tentent de se préserver, en faisant spontanément des pauses pour diminuer le stress : un sur deux en fait régulièrement, en moyenne un peu plus de deux par jour. Pour lutter contre le sentiment de submersion, 27% se réservent un créneau horaire dédié exclusivement à la gestion de ces informations, et un sur quatre éteint ponctuellement certains outils ou s’impose des durées précises de consultation de ces derniers.
Le cabinet Eleas conseille de "mener des démarches d’accompagnement incitant les salariés à gérer des pauses plus efficaces leur permettant de déconnecter en peu de temps afin de mieux maîtriser la charge mentale liée à l’utilisation des outils numérique."