En Amazonie, la déforestation n'a jamais été aussi importante depuis dix ans

Publié le 19 novembre 2019 à 14h35, mis à jour le 19 novembre 2019 à 14h47
En Amazonie, la déforestation n'a jamais été aussi importante depuis dix ans
Source : Ricardo Beliel / Greenpeace

AMAZONIE - Entre août 2018 et juillet 2019, la déforestation en Amazonie brésilienne a bondi de près de 30 % par rapport à l’année précédente. En un an, l'équivalent de 93 fois la surface de Paris a disparu. Du jamais vu depuis dix ans.

L’INPE, l’institut national de recherche spatiale, a divulgué ses données annuelles estimant l’état de la déforestation en Amazonie brésilienne. Si elle est en hausse quasi-constante depuis 2012, celle-ci n’a jamais été aussi importante depuis dix ans, avec une hausse de 29,5 % entre août 2018 et juillet 2019, par rapport à la même période l’année précédente. Le dernier record remontait à la période 2007-2008, où le Brésil avait vu 12 911 km2 de sa forêt détruite. 

Une montée en flèche qui était à prévoir d’après Cécile Leuba, chargée de campagne Forêts pour Greenpeace France : "Tous les chiffres publiés par l’INPE chaque mois étaient très mauvais, en particulier cet été". Au total, 9 762 km2 des neufs Etat brésiliens couvrant la forêt tropicale ont été déboisés sur cette période. Soit "93  fois la superficie de Paris intra-muros", détaille la responsable de Greenpeace. Dans le détail, c’est l’Etat du Para qui se trouve le plus impacté avec 3 862 km2 de forêt ravagés, suivi du Mato Grosso avec 1 685 km2, de l’Amazonas avec 1 421 km2 et du Rondônia avec 1 316 km2. Ces quatre Etats représentent à eux-seuls 84,13 % de la déforestation dans le pays.  

Un aperçu de la déforestation sous la présidence Bolsonaro

Pour la première fois, ces chiffres donnent un aperçu de l’état de la déforestation sous la présidence de Jair Bolsonaro. Si la totalité de la déforestation n’a pas eu lieu sous son gouvernement, le chef de l’Etat étant au pouvoir seulement depuis janvier dernier, l’état de l’Amazonie est dû pour beaucoup à sa politique anti-environnementale. D’autant qu’une hausse significative de la déforestation se constate à partir du mois de juin, période de saison sèche au Brésil ayant été marquée par une recrudescence des feux en Amazonie. "Jair Bolsonaro a un discours qui légitime les invasions dans les territoires indigènes", avance Cécile Leuba. "Le Brésil a un président qui ne s’est jamais caché de vouloir développer des agro-industries en Amazonie. Ce qui est très inquiétant, c’est que l’on n’est pas face à un gouvernement qui prend le problème à bras le corps, loin de là."

"Tous les dix jours, des cargos de soja entrent en Europe et en France dont on ne connait pas la provenance"

Dernièrement, Jair Bolsonaro a acté le rétablissement des plantations de canne à sucre, responsables de la déforestation, en Amazonie et au Pantanal, écorégion d'Amérique du Sud. Pour obtenir des terrains vierges adaptés à la culture, les agriculteurs pratiquent la technique du brûlis qui a occasionné de multiples départs de feu dans la forêt tropicale. "Près de 20 % de l’Amazonie a déjà été dévastée et nous nous rapprochons du point de non-retour, quand elle se transformera en savane", s’est alarmé auprès de l’AFP Mauricio Voivodic, directeur de l’antenne brésilienne Fonds mondial pour la nature (WWF). 

De son côté, Greenpeace dénonce la responsabilité de Paris dans le dossier amazonien. "Cet été, Emmanuel Macron a eu des mots très forts en dénonçant la complicité de la France dans la déforestation en Amazonie", explique Cécile Leuba. "Et aujourd’hui, le gouvernement ne prend aucune mesure pour s’assurer que le soja importé n’est pas lié à la déforestation. Tous les dix jours, des cargos de soja entrent en Europe et en France dont on ne connait pas la provenance. Il y a un gros problème de traçabilité." En 2018, la France a importé 700 000 tonnes de graines de soja, dont 330 000 tonnes en provenance du Brésil, d'après le ministère de l'Agriculture. 


Caroline QUEVRAIN

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