La lente transition des groupes pétroliers vers les énergies renouvelables

Publié le 10 octobre 2020 à 22h22

Source : TF1 Info

ENQUÊTE - Dans de nombreux secteurs d'activité, la transition écologique est devenue une priorité pour les années à venir. Pointés du doigt, comment les groupes pétroliers abordent ce virage vers une production plus verte ?

A la fin de l’été, un petit séisme a eu lieu sur la place financière américaine. Exxon Mobile, première compagnie pétrolière des Etats-Unis, a été éjectée du Dow Jones, l’indice boursier regroupant les trente plus grandes entreprises du pays. Une disgrâce, symbole d’un monde qui ne veut plus miser sur l’or noir, et qui force les majors pétrolières à s’adapter.

Une collecte du pétrole de plus en plus compliquée

Le mois dernier, le groupe Total a annoncé que la raffinerie de Grandpuits, en Seine-et-Marne, allait être reconvertie en usine de biocarburants, passant ainsi du pétrole brut à des huiles végétales, animales et de cuisson recyclées. "On a du personnel déjà formé pour exploiter les futures unités" explique Jean-Marc Durand, directeur de la raffinerie. Sur ses cinq raffineries, Total continuera de produire du pétrole sur trois sites, l’usine de La Mède, en Provence, ayant déjà franchi le pas des biocarburants l’an dernier.

"La raison fondamentale pour laquelle Total s’intéresse peut-être à autre chose que le pétrole, c’est que Total a du mal à maintenir sa production de pétrole. Aujourd’hui, un pétrolier n’a pas d’autre choix que d’aller chercher le pétrole, par exemple, à dix kilomètres sous la surface des flots, au large de Rio, à des endroits de plus en plus extrêmes, de plus en plus inhospitaliers et donc de plus en plus coûteux et risqués" explique Matthieu Auzanneau, directeur du think tank de la transition énergétique "The Shift Project".

Les géants américains pas décidés à abandonner le pétrole

Cela signe-t-il la fin du pétrole dans 10, 20 ou 30 ans ? Les spécialistes ne sont pas tous d’accord sur la date mais les compagnies pétrolières prennent des directions opposées. Ainsi, les compagnies américaines continuent de miser sur l’or noir, quitte à augmenter leurs émissions de CO², alors que les compagnies européennes annoncent, elles, presque chaque jour de nouveaux investissements dans le renouvelable, notamment dans un secteur qui n’en est qu’à ses débuts : l’éolien flottant.

Ainsi, le potentiel de l’éolien en mer n’a pas échappé au géant Shell, qui prévoit d’en installer prochainement au large de la Bretagne. "On n’est pas gêné par l’endroit de la construction car nous allons les mettre en mer, loin des côtes. De plus, c’est à cet endroit que les conditions sont optimums au niveau de la qualité du vent, de la constance du vent" explique Vincent Baril, président de Shell France.

Tout cela ne va pas se faire en une nuit.
Patrick Pouyanné, PDG de Total.

L’enjeu est majeur pour ces grands groupes, à savoir conserver leur rentabilité tout en répondant au défi climatique. Chaque année, Total réalise plus de 200 milliards d’euros de chiffre d’affaires, tout en investissant 2 milliards dans le renouvelable. Mais pourquoi Total ne se désengage-t-il pas plus vite du pétrole ? Pour Patrick Pouyanné, PDG du groupe depuis cinq ans, la transition sera lente : "Tout cela ne va pas se passer en une nuit. Si on arrête de faire du pétrole, tous les grands pays producteurs vont le faire à notre place, donc nous n’aurons rien réglé du problème du climat. (…) La chance qu’on a, c’est qu’on va chercher l’argent récolté grâce au pétrole pour le réinvestir dans les énergies vertes."

Aujourd’hui, dans son mix énergétique, Total vend 55% de pétrole, 40% de gaz et seulement 5% d’électricité. Le groupe veut inverser la tendance d’ici 30 ans, en passant à 40% d’électricité, 40% de gaz et seulement 20% de pétrole en 2050. Le but est d’être prêt pour alimenter un secteur automobile qui va passer de plus en plus à l’électrique, alors que la France a voté l’interdiction de vendre des véhicules fonctionnant à l’essence et au diesel en 2040.


La rédaction de TF1info

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