Attaque à Paris : Youssef, le "héros" pris à tort pour un complice, raconte son incroyable histoire

Publié le 28 septembre 2020 à 7h30

Source : TF1 Info

TÉMOIGNAGE - Il a courageusement poursuivi le terroriste de l'attaque des anciens locaux de Charlie Hebdo, avant d'être interpellé, menotté et placé durant 10 heures en garde à vue. Youssef, 33 ans, a accepté de nous livrer son récit.

Le "suspect numéro 2" est en réalité un "héros". Youssef, un homme d'une trentaine d'années, se remet à peine de sa folle journée de vendredi. Après avoir tenté d'arrêter Ali H., le terroriste de l'attaque devant les anciens locaux de Charlie Hebdo, il a été interpellé et placé en garde à vue pendant près de 10h. Une longue attente, angoissante, avant finalement d'être mis hors de cause et relâché dans la soirée,"libre et sans poursuite". De suspect, Youssef est passé au statut de témoin du drame. Sa version a été confirmée par les images de vidéosurveillance et par l'enquête. Il a raconté à TF1 l’enchaînement des faits. 

"Un jeune homme héroïque"

Deux jours après les faits, les circonstances dans lesquelles Youssef s'est retrouvé embarqué dans ces événements se sont éclaircies. "Je voulais être un héros, je me suis retrouvé derrière les barreaux", résume l'intéressé devant les caméras de TF1. 

Après avoir croisé le terroriste, Youssef s'est présenté à la police pour témoigner. C'est son avocate - Lucie Simon - qui, la première, a dénoncé le sort de son client.  

"Le deuxième suspect n'est autre qu'un jeune homme héroïque qui a tenté d'arrêter l'assaillant", a-t-elle fait savoir sur son compte Twitter. "Il s'est présenté à la police pour témoigner, on l'a menotté, cagoulé devant les caméras, placé en garde à vue malgré les témoins et les vidéos. Il sort ce soir épuisé et choqué.

Youssef était en train de monter dans sa voiture lorsqu'il a entendu les cris d'une femme, puis d'un homme, avant de voir l'assaillant s'enfuir et s'engouffrer dans la bouche du métro Richard Lenoir. "Il a décidé, dans un geste spontané très courageux, de le suivre pour l'arrêter", raconte maître Simon. "Il le poursuit dans le métro, saute le portique, va sur le quai et lui hurle 'bouge pas, j'arrive'. Il va vers lui pour l'arrêter et l'assaillant sort un cutter pour le menacer, et rentre dans le métro. La poursuite s'arrête là." Youssef se souvient qu'il ne comprenait pas la langue de l'assaillant, mais que ce dernier avait un air "dépressif" et semblait "étonnamment calme". 

Sauf que l'histoire ne s'arrête pas là pour Youssef. Il ressort du métro, croise les policiers et leur conseille de se diriger vers Bastille, station vers laquelle l'assaillant s'est dirigé en métro. Il repart vers les victimes, indique aux policiers qu'il est témoin, mais ceux-ci lui intiment de "dégager". Il va chercher sa carte d'identité à son domicile, afin de revenir témoigner.

"Je les ai entendus dire : "on l'a choppé". Quoi, vous m'avez chopé ? Je suis venu témoigner moi !"

Lorsqu'il se présente aux policiers pour la seconde fois, les policiers le confrontent "à une photo de lui qui semblait déjà tourner, une capture de la vidéosurveillance du métro", raconte l'avocate. Ces images auraient fait penser aux policiers que les deux hommes se connaissaient. Youssef est alors interpellé, menottes au poignet, masque occultant sur le visage. "Je les ai entendus dire : "on l'a choppé". Quoi, vous m'avez chopé ? Je suis venu témoigner, moi!", tente-t-il d'expliquer.   

Après sa libération, son client a été "très peiné des réactions sur Internet, de la manière d'être présenté comme un terroriste dans les médias", affirme l'avocate, pour qui la garde à vue aurait pu être évitée car les policiers avaient des images de ce qu'il s'était passé dans le métro.  Mais Youssef l'assure, il n'a aucun ressentiment envers les forces de l'ordre : "Je ne suis pas en colère contre les policiers. Ils ont fait leur travail, c'est normal. C'est juste que je ne suis pas habitué. C'est tout." Et si, un jour, une telle scène venait à se reproduire ? "Si ça recommence demain ? J'y retourne ! (...)Je suis comme ça, moi : quand je vois un criminel, quelqu'un qui a mal agi, je dois intervenir pour le rattraper. Je fonce. C'est comme ça."

Le récit de Youssef rappelle fortement celui de Lassana Bathily, le "héros" de l'Hyper Cacher. Lors de son témoignage au procès des attaques de janvier 2015, ce dernier a raconté avoir été interpellé à la sortie du magasin et retenu durant 1h30, avant que les forces de sécurité ne comprennent qu'il était au contraire du côté des otages. 


La rédaction de TF1info

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