Braquage aux Champs-Elysées : un an après, le casse parfait de la banque Milleis conserve ses mystères

par Georges BRENIER Georges Brenier
Publié le 22 janvier 2020 à 17h31

Source : JT 20h Semaine

ENQUÊTE - Au palmarès des plus "beaux" braquages des 20 dernières années, ils sont montés sur le podium, une médaille autour du cou. Il y a un an jour pour jour, le 22 janvier 2019, quatre malfaiteurs repartaient de la banque Milleis avec un butin qui pourrait se chiffrer en dizaines de millions d’euros. Le commando perceur de coffres, lui, reste introuvable.

Même les policiers les plus rôdés aux exploits du grand banditisme s’avouent "bluffés". Un enquêteur parisien qui s’est lancé aux trousses de nombreux "beaux mecs" le reconnaît sans détour : "C'est un coup de maître. Ces braqueurs ont réussi leur coup de A à Z. Avec un tel jackpot, ils ont sûrement pris une retraite dorée, on ne les reverra plus."

Ce 22 janvier 2019, une épaisse couche de neige recouvre peu à peu les rues de la capitale. La circulation est chaotique, les trottoirs glissants. Les intempéries n’ont pourtant pas fait changer d’avis quatre hommes, perruque vissée sur le crâne et pistolet automatique fermement tenu en main. Un peu avant 9h, ils prennent en otage le directeur et une employée de l’agence bancaire Milleis (ex-Barclays), située sur le rond-point des Champs-Elysées. Le quartier est pourtant l’un des plus surveillés de Paris : le palais de l’Elysée et le ministère de l’Intérieur ne sont qu’à quelques encablures de là. 

Panneau bidon, spray à mousse et javel

Le commando est culotté. Il est aussi du genre taquin. Sur la devanture de la banque, l’un des voyous a déposé une pancarte sur laquelle est écrit : "Fermeture exceptionnelle, suite à des problèmes techniques". L’écriteau bidon précise même que les portes de l’agence seront closes de 9h à 14h ce jour-là. L’équipe n’en aura besoin que d’un peu plus de trois pour accomplir sa mission. Au sous-sol, à l’abri des regards, ils réussissent à percer une soixantaine de coffres-forts. Certains sont pleins à craquer de bijoux de luxe et d’imposantes liasses de billets. 

Les braqueurs ont opéré le plus tranquillement du monde, sans jamais être inquiétés. Les systèmes d’alarme ont été désactivés. Les caméras de vidéo-surveillance de l’établissement ont été rendues aveugles grâce un banal spray à mousse, sûrement acheté dans un magasin de bricolage. Les clients de Milleis avaient cru – à tort – pouvoir mettre à l’abri leur trésor, persuadés qu’aucun voyou ne viendrait à bout des épaisses parois métalliques de leur coffre et de leur serrure blindée. 

Vers 12h30, les quatre hommes repartent à pied de l’agence, ni vu, ni connu. Ils ont en grande partie recouvert le sol et les murs de l’établissement avec du liquide javel afin d’effacer au maximum les traces de leur passage. Les deux salariés, eux, sont retrouvés un peu plus tard par les policiers, sains et saufs mais choqués. Le directeur de l’agence avait été forcé par les braqueurs à revêtir une ceinture explosive, qui s’avérera finalement factice. 

Les braqueurs introuvables, le montant du casse inestimable

Un an plus tard, le casse a conservé l'essentiel de ses mystères. Les hommes de la Brigade de répression du banditisme de la PJ parisienne s’acharnent toujours à mettre la main sur le commando. Plusieurs pistes ont été exploitées par les limiers de la BRB ces douze derniers mois, mais sans succès jusqu’à présent. A croire que les suspects, prudents et philosophes, ne remonteront pas de sitôt au "braquo", bien décidés à profiter des joies de leur pactole. "L’équipe était évidemment très bien rencardée, confirme un responsable policier. Le pari fait par ces types était risqué, mais il s’est avéré gagnant. Sans doute bien plus qu’ils ne l’imaginaient eux-mêmes." Une preuve qui en dit long : dans leur fuite, les malfaiteurs n’ont même pas estimé nécessaire d’emporter des liasses entières de billets, qui s’offraient pourtant à eux.

Fait rarissime, le montant précis du butin reste d’ailleurs inconnu, et le restera sans doute à jamais. Certes, certains clients de de l’agence ont déposé plainte et ont fourni aux compagnies d’assurance le listing des objets de valeur qu’ils conservaient dans leur coffre. Mais la plupart des victimes ont sans doute considérablement minimisé la valeur de leurs biens. "Généralement, beaucoup de riches clients se gardent bien de dire qu’ils stockaient des milliers d’euros en liquide, soupire un magistrat habitué aux faits d’armes du Milieu.  Sans doute parce qu’ils avaient malencontreusement 'oublié' de déclarer cet argent aux impôts…"

Les proches de l’enquête estiment que le préjudice total, au vu des déclarations des victimes et des estimations, pourrait se chiffrer en dizaines de millions d’euros. De quoi peut-être faire de l’attaque de la banque Milleis un jour de neige l’un des plus beaux "casses" de l’Histoire… 


Georges BRENIER Georges Brenier

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