Eborgné, Manuel C. refuse d'être entendu par l'IGPN et porte plainte contre le préfet de Paris

Publié le 21 novembre 2019 à 0h25

Source : TF1 Info

VIOLENCES - Le Gilet jaune grièvement blessé à l'œil par un projectile probablement tiré par la police a indiqué qu'il refuserait d'être auditionné par l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) et a annoncé qu'il portait plainte contre Didier Lallement, préfet de police de Paris.

Samedi 16 novembre, en plein milieu de l'après-midi, Manu C., 41 ans et habitant de Valenciennes, discute avec d'autres Gilets jaunes, pour l'anniversaire de la mobilisation du mouvement. Alors qu'il discute avec un "street medic" et son épouse, il reçoit une grenade lacrymogène à l’œil gauche. La séquence, filmée est diffusée sur les réseaux sociaux. Extrêmement violente, elle a été abondamment reprise sur de nombreux comptes Twitter. 

Le Préfet de police de Paris, Didier Lallement a annoncé ce lundi, qu'il allait saisir l'IGPN, "à la demande du ministère de l'Intérieur". Le lendemain, la femme de Manu C. indique que ce dernier a perdu l'usage de son œil. Mercredi 20 novembre, son avocat Arié Alimi a indiqué que son client refuserait d'être entendu par l'Inspection générale de la police nationale et qu'une plainte a été déposée. Elle vise notamment le préfet Didier Lallement. 

Le parquet de Paris a ouvert une enquête pour "violences par personne dépositaire de l'autorité publique avec armes ayant entraîné une interruption temporaire de travail de plus de huit jours" et confié les investigations à l'IGPN. Mais Manu C. refuse d'être entendu par la police des polices. Comme explication, son avocat fustige la "partialité [de l'institution] qui étouffe les affaires de violences policières". L'avocat attaque aussi le parquet de Paris, accusé de "blocage" sur les dossiers de violences policières.

Alors, pour contourner cette procédure, Me Alimi indique avoir déposé une plainte auprès du doyen des juges d'instruction pour réclamer une requalification criminelle en "violences" aggravées "ayant entraîné une mutilation permanente". Cette plainte vise nommément le préfet Didier Lallement, l'accusant de complicité pour avoir autorisé l'usage de lanceurs de grenade 56 mm. Manuel C. "refuse également de transmettre les vidéos de la scène et des fonctionnaires impliqués" et "demande la désignation immédiate d'un juge d'instruction compte tenu du caractère criminel de l'affaire", ajoute l'avocat. "Les vidéos des responsables seront diffusées au public dans un délai d'une semaine à défaut de désignation d'un juge", menace-t-il.

Des lanceurs très contestés

Depuis le début du mouvement, les lanceurs de grenades lacrymogènes, dits Cougar ou Chouka, font partie des armes de maintien de l'ordre contestées depuis le début du mouvement des Gilets jaunes, avec les lanceurs de balles de défense. Au total, 372 procédures judiciaires ont été enregistrées en France après des plaintes contre des forces de l'ordre, selon un décompte du ministère de la Justice transmis à l'AFP.  Parmi elles, 109 ont été classées sans suite et 29 ont mené à l'ouverture d'une information judiciaire. Trois renvois en correctionnelle de fonctionnaires - dont un CRS jugé ce jeudi à Paris - ont été ordonnés.

Interrogé par Mediapart, Manuel C. raconte de son côté, qu'il s'était réfugié de ce côté de la place, "où il n'y avait pas d'affrontements", alors que policiers et manifestants s'opposaient de l'autre côté de la place. "On a donc décidé d’attendre dans un coin plus calme. On était d’ailleurs en train de discuter et de se demander avec un 'street medic' pourquoi ils avaient choisi de nous bloquer sur une place en travaux avec des outils de chantier qui pouvaient être utilisés. C’était dangereux et je n’avais qu’une envie : c’était partir et protéger ma femme", dit-il. Cette dernière explique aujourd'hui qu'il est "sous perfusion pour diminuer ses douleurs" et que ces faits les plongent dans un avenir incertain. "Je venais de passer des tests d’embauche et je n’attendais plus que le jour du début de ma mission soit fixé pour commencer dans une usine d’automobile pour 1 500 euros (...)Je ne vais pas pouvoir subvenir aux besoins de ma famille".


La rédaction de TF1info

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