Vidéo d'une interpellation à Grasse : un policier a-t-il tenu des propos racistes ?

Anaïs Condomines
Publié le 29 mars 2019 à 18h21
Vidéo d'une interpellation à Grasse : un policier a-t-il tenu des propos racistes ?
Source : Facebook

A LA LOUPE - Une vidéo virale met en cause des policiers municipaux de Grasse (Alpes-Maritimes), dont au moins un aurait tenu des propos racistes durant une interpellation dans le centre-ville. LCI a pu s'entretenir avec l'homme interpellé sur la vidéo, qui confirme les insultes. D'après nos informations, la procureure de Grasse a ouvert une enquête.

La vidéo, mise en ligne par le collectif "Urgence notre police assassine", cumule 82.000 vues. Postée le 26 mars, elle a pour légende : "Ecoutez les propos de ce policier municipal, insultes racistes. La scène s'est produite dans la soirée du vendredi 15 mars à Grasse dans les alpes maritimes." 

En effet, ces images donnent à voir - et surtout à entendre - des propos racistes lâchés lors de l'interpellation d'un individu. Dans cette vidéo, on peut voir une voiture de police arrêtée au milieu de la route. Juste devant, une personne est maintenue au sol par deux hommes, vraisemblablement des policiers. Trois autres fonctionnaires arrivent en renfort. En fond sonore, on entend des bruits de menottes. Et puis ces paroles : "Ta gueule, ta gueule je te dis. Sale chien va. Sale race, ta gueule." Alors qu'un collègue palpe les jambes de l'interpellé, un fonctionnaire de police poursuit encore : "Il y a quoi sur toi ? (...) vas-y dis moi ce que t'as choco, t'as des papiers ? Ils sont où ?" Réponse indistincte de la part de l'homme à terre. 

Interpellation en centre-ville

D'après nos vérifications, la scène se déroule bien dans le centre-ville de Grasse, au niveau du 10, boulevard du Jeu de ballon, à deux pas de la rédaction du journal local Nice-Matin. Notre enquête de voisinage n'a rien donné mais, contactée par LCI, la fondatrice du collectif "Urgence notre police assassine", Amal Bentounsi, assure être en contact avec l'auteur de ces images qui s'est présenté au collectif afin de rendre la vidéo publique.  Mais ne souhaite pas communiquer son identité. 

Google Maps

Quand j'ai entendu 'sale race', j'ai voulu me retourner
L'homme interpellé

Si le lieu où s'est tenue cette interpellation ne semble faire l'objet d'aucun doute, il n'en va pas de même pour la bande son, qui, elle soulève plusieurs questions. De nombreux commentaires sur Facebook dénoncent "un fake", un "doublage grossier"  car à l'écoute, il existe effectivement un important décalage entre l'image, captée au zoom à quelques dizaines de mètres de distance, depuis un balcon, et le son, très propre, résonnant comme à l'intérieur d'une pièce fermée. Sur ce point, nous n'avons pas réussi à démêler l'origine de cet enregistrement, ni les conditions de sa captation. 

Cela ne signifie pas pour autant que la vidéo montre une scène tronquée. En effet, LCI est parvenu à entrer en contact avec l'homme interpellé, un Cannois originaire du Cap-Vert, âgé de 35 ans. Très remonté contre la police, il nous raconte qu'il passait sa soirée dans un bar, le 15 mars dernier, un peu plus haut dans la rue. Alcoolisé, il s'est disputé et battu avec un ami. C'est alors que les policiers municipaux l'interpellent. "Ils m'ont rentré dedans, ils m'ont mis les menottes. Quand j'ai entendu l'un d'entre eux me dire 'sale race', j'ai essayé de me retourner." Il indique par ailleurs que, sur la route pour l'hôpital, il aurait reçu "des gifles". L'homme a ensuite passé la nuit en cellule de dégrisement avant d'être libéré le lendemain. 

Nos confrères de Nice-Matin indiquent par ailleurs que cet individu est connu des services de police pour des faits d'ivresse sur la voie publique, outrage, dégradations et violences. Pas au courant que son interpellation avait été filmée, il a découvert la vidéo par son frère, qui lui envoyé un lien Facebook. "Au début je voulais pas parler", nous dit-il, "mais pour une fois que c'est filmé..." Il ajoute qu'il souhaite désormais faire les démarches nécessaires pour porter plainte.

Une enquête ouverte

Les autorités, de leur côté, prennent l'affaire au sérieux. Le maire de Grasse, Jérôme Viaud (LR) a réagi par voie de communiqué. Il évoque "une interpellation au cours de laquelle sont tenus les propos d'un policier municipal a priori inacceptables. Enregistré par une tierce personne et mis en ligne plus de dix jours après les faits, ce film ne montre qu'une partie de l'interpellation et occulte les menaces de mort proférées à l'encontre des policiers municipaux." Et d'ajouter : "Lorsque j'ai eu connaissance des faits au moment où ils se sont produits, j'ai immédiatement demandé au directeur général adjoint en charge de la police municipale de mener en interne, sans attendre, une enquête pour que tout la lumière soit faite et en conséquence que les mesures soient prises pour qu'un tel comportement ne se reproduise plus."

L'édile indique également avoir prévenu la procureure de la République de Grasse. Auprès de LCI, le parquet explique en effet avoir ouvert une enquête, confirmant une information de nos confrères de Nice-Matin

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