Benjamin Griveaux victime d’un "kompromat" ? Une technique de discrédit venue de Russie

Publié le 16 février 2020 à 17h13, mis à jour le 17 février 2020 à 9h30
Benjamin Griveaux victime d’un "kompromat" ? Une technique de discrédit venue de Russie
Source : LIONEL BONAVENTURE / AFP

RÉPUTATION – Le "kompromat", ou "dossier compromettant", vise à discréditer une personne en divulguant des vidéos à caractère sexuel volées ou tournées à l’insu de la victime. Technique inspirée par les modes d’action des services secrets russes pendant la guerre froide, elle pourrait avoir été utilisée à l’encontre de Benjamin Griveaux.

L’enquête sur la diffusion des vidéos ayant conduit au retrait de Benjamin Griveaux ne fait que commencer. Au cœur de l’affaire : l’activiste russe Piotr Pavlenski et sa compagne, tous deux placés en garde à vue. Cette dernière pourrait avoir été la destinataire des vidéos dont la publication la semaine dernière a conduit au retrait du désormais ex-candidat à la mairie de Paris. Celui-ci a déposé plainte pour "atteinte à l’intimité de la vie privée" et "diffusion sans l'accord de la personne  d'images à caractère sexuel". Les enquêteurs de la police judiciaire parisienne vont tenter de déterminer précisément les responsabilités dans cette affaire qui n’est pas sans évoquer d’autres scandales rassemblés sous terme de "kompromat"  

La mise au jour et la publication des vidéos à caractère sexuel évoque en effet une technique venue de Russie à l’époque où le KGB avait fait de la compromission de responsables occidentaux une spécialité. Plusieurs cas sont restés célèbres. Photographié avec un partenaire du même sexe alors que l'homosexualité était interdite au Royaume-Uni, John Vassall, attaché naval britannique à Moscou de 1954 à 1956, fut ainsi obligé de devenir l'un des plus célèbres espions de l’URSS d’alors au Royaume-Uni faute de quoi tout aurait été révélé. En 1964, l’ambassadeur français Maurice Dejean en fit également les frais après que des agents secrets l’avaient filmé en plein ébats avec une jeune actrice russe. De mauvais genre pour un diplomate marié : il fut aussitôt rappelé à Paris par le général de Gaulle avant d’être congédié.

Chantages et confessions sur l’oreiller

Après la chute de l'Union soviétique, dans le chaos des années 1990, le "kompromat" est ensuite devenu un instrument de choix pour mener des campagnes de discrédit contre des hommes politiques, des businessmen ou des hauts fonctionnaires. Ou, parfois, pour obtenir des confessions sur l’oreiller. "Tous les services secrets du monde le font, et nous ne sommes pas une exception", admettait Mikhaïl Lioubimov, ancien agent du KGB, dans un entretien à l’AFP en début d’année. 

La "guerre des kompromat" a notamment fait rage entre les oligarques russes en lutte pour le contrôle des grandes entreprises du pays, utilisant leurs empires médiatiques pour se lancer les pires accusations. Au printemps 1999, alors qu'il enquêtait sur des faits présumés de corruption contre le président de l’époque, Boris Eltsine, le procureur général Iouri Skouratov tomba à son tour. Après une "enquête" du chef du FSB (ex-KGB) d’alors, un certain Vladimir Poutine, la télévision diffusa une vidéo, dont l'authenticité n'a jamais été prouvée, présentée comme montrant le magistrat avec des prostituées. 

Signe que la pratique perdure, plus récemment, en 2009, un diplomate britannique en poste en Russie avait démissionné après la diffusion sur internet d'une vidéo le montrant avec deux prostituées. Un an plus tard, en 2010, une certaine "Katia" avait quant à elle séduit plusieurs opposants au Kremlin et filmé en secret leurs ébats, qu'elle avait ensuite diffusés en ligne. L'affaire avait provoqué un séisme dans le pays et désintégré l'unité (de façade ?) des challengers de Vladimir Poutine. 


La rédaction de TF1info

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