Ce qu'il faut retenir du rapport de l'IGPN sur l'affaire Benalla

Anaïs Condomines
Publié le 27 juillet 2018 à 19h04, mis à jour le 27 juillet 2018 à 19h23
Ce qu'il faut retenir du rapport de l'IGPN sur l'affaire Benalla
Source : Ludovic MARIN / POOL / AFP

RÉSUMÉ - La police des polices a publié ce vendredi 27 juillet son rapport sur le statut des observateurs dans la police et l'affaire Benalla. Outre plusieurs recommandations, il donne des précisions sur la présence de l'ex-collaborateur d'Emmanuel Macron dans le dispositif policier du 1er mai, à Paris, et sur ses agissements.

Il était très attendu : le rapport de l'IGPN sur le statut d'observateur dans la police - et plus largement sur la présence et les agissements d'Alexandre Benalla au sein du dispositif de la manifestation du 1er mai - a finalement été rendu public ce vendredi 27 juillet sur le site du ministère de l'Intérieur

A l'issue d'une semaine particulièrement riche dans cette affaire qui tourne à la crise au sommet de l'Etat, voici les points importants à retenir de ce rapport rédigé par la police des polices : 

Benalla : un "statut" qui en impose

Il ressort clairement du rapport de l'IGPN que le "statut" d'Alexandre Benalla, collaborateur auprès d'Emmanuel Macron, le rendait plus ou moins intouchable aux yeux des policiers présents le 1er mai sur la place de la Contrescarpe. Une influence qui s'étend aussi sur celui qu'il présente comme un collaborateur, Vincent Crase, lui aussi impliqué dans les violences. Le rapport cite ainsi : "Le major Mizerski ne connaît pas monsieur Crase, mais ne demande pas d'explication, compte tenu 'du statut' de monsieur Benalla, représentant affiché, et reconnu comme tel par sa hiérarchie, de la présidence de la République."

Un peu plus loin : "Bien qu’embarrassé par la tournure que prenaient les choses, il ne concevait pas, compte tenu de son grade, faire la moindre observation à celui qui était, à ses yeux, un personnage de première importance, recommandé par le chef-adjoint d'état-major de la DOPC. (...) Quant au brassard de police arboré par Alexandre Benalla, il a considéré que son statut de 'haut responsable' de la sécurité de la présidence de la République l'autorisait certainement à le porter et s'est gardé de lui faire la moindre remarque."

La version de Gibelin confortée

Ce fut un des points charnière des diverses auditions des commissions d'enquête parlementaires. Alain Gibelin, chef d'état-major de la DOPC (direction de l'ordre public et de la circulation) a-t-il été informé en amont de la présence d'Alexandre Benalla sur le terrain, le 1er mai dernier ? Lui, sous serment, a assuré aux parlementaires que, lors de son déjeuner de travail avec Alexandre Benalla et le général Bio-Farina (commandant militaire de l'Elysée), la date du 1er mai n'avait pas spécifiquement été abordée. Et qu'à aucun moment il ne s'était préoccupé de savoir si le collaborateur du Président avait bien reçu ses équipements. Une version contredite par Alexandre Benalla dans son interview au Monde, où il affirme exactement l'inverse. 

Dans son rapport, l'IGPN s'accorde à la version d'Alain Gibelin. Et charge son subalterne, Laurent Simonin, chef d'état-major adjoint, au niveau duquel l'information de la venue d'Alexandre Benalla semble être restée bloquée. Il est ainsi écrit : "Alexandre Benalla, arguant du fait qu'il avait toutes les autorisations nécessaires, aurait convenu téléphoniquement, avec Laurent Simonin, des modalités de sa présence sur le service d'ordre prévu à l'occasion des manifestations du 1er mai. Sans solliciter d'autres garanties, convaincu de la véracité des dires de son interlocuteur et sans évoquer plus avant sa présence en tant qu'observateur sur le service d'ordre avec ses supérieurs hiérarchiques, monsieur Laurent Simonin lui a donné rendez-vous le 1er mai, en début d'après-midi, à la préfecture de police."

Néanmoins, le rapport de l'IGPN prend des précautions : "Beaucoup de ces déclarations ont été faites à chaud et des évolutions sont possibles dans le cadre de l'enquête." Par ailleurs, concernant la présence d'Alexandre Benalla sur le dispositif ce jour précis, il est indiqué ceci : "Il lui a été suggéré le service du 1er mai, dont tout laissait penser qu'il allait être difficile." Une formulation trop évasive pour permettre de savoir qui, précisément, a proposé au collaborateur de l'Elysée de se déplacer ce jour-là. 

Benalla n'aurait pas fait usage de sa radio

C'est un équipement qui lui a été reproché, au même titre que le brassard police passé autour du bras. Dans le rapport de l'IGPN, il est mentionné qu'Alexandre Benalla n'aurait pas fait usage de la radio pendant la manifestation. "Durant l'après-midi, le major Mizerski assure que monsieur Benalla, s'il écoutait le trafic radio de la police, après qu'il lui eut indiqué la bonne fréquence, n'a jamais passé de message, ni donné la moindre instruction", indique ainsi le rapport de l'IGPN. 

Deux recommandations de l'IGPN sur le statut d'observateur

Enfin, l'IGPN s'attarde sur deux recommandations particulières afin de clarifier le statut des observateurs en accompagnement des forces de police. Le port d'un signe distinctif par l'observateur d'une part, se traduisant par exemple par la création d'un brassard spécifique dont la couleur et le graphisme se distingueraient de ceux de la police. Une convention type et une charte de l'observateur, d'autre part, qui rappelleraient "les grands principes" de leur rôle, comme l'obligation de discrétion, la non-divulgation des faits observés ou encore l'obligation de se conformer aux directives du référent. 

Gérard Collomb, par voie de communiqué, a d'ores et déjà indiqué qu'il souhaitait voir ces recommandations mises en pratique. 


Anaïs Condomines

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