DECRYPTAGE – A trois mois de la conférence international sur la climat, François Hollande a sifflé ce matin l’appel à la mobilisation générale. Une réunion s’est déroulée à l’Elysée, en présence de 400 convives, pour expliquer les enjeux de ce grand raout qui ne séduit guère les foules. Pourtant, il existe plusieurs raisons pour s’y intéresser, comme nous l’explique Jean-François Julliard, le président de Greenpeace France.
Vous ne pourrez pas y échapper. D’ici trois mois, la France va mettre les petits plats dans les grands pour accueillir la Cop 21 à Paris. Quelque 195 Etats et 20.000 personnes tenteront, sous l'égide de l'ONU, de s'accorder pour limiter le réchauffement planétaire, lié aux émissions de gaz à effet de serre. Un défi crucial mais guère enthousiasmant auprès des foules. En mars dernier, un sondage BVA mettait en évidence que la lutte contre le réchauffement est une priorité pour seulement 13% des sondés. A regarder de plus près, il existe malgré tout quelques arguments pour y jeter un œil en décembre. Explications avec Jean-François Julliard*, le président de Greenpeace France.
► Oublier l’échec de Copenhague en 2009
Un accord sans ambition... et sans contrainte. Après 12 jours de négociations, le sommet de Copenhague – auquel succède celui de Paris – avait marqué les esprits en s’achevant par un texte a minima. Négociations dans la confusion, refus de la Chine et des Etats Unis de s’aligner, refus d’autres de tout simplement signer... rien n’a tourné rond. Quant à la nécessité de limiter le réchauffement planétaire à 2°C, elle a été validée, mais sans engagement chiffré ni calendrier. "Le problème de Copenhague, c’est qu’on en attendait tout !", se souvient Jean-François Julliard. Un risque qui plane selon lui sur Paris : "J’ai le sentiment qu’on risque de retomber dans le même travers. Non, clairement non : la Cop 21 ne va pas être la baguette magique qui nous sauvera du dérèglement climatique."
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► Un accord a minima serait dramatique
La perspective de catastrophes climatiques d'ici à quelques dizaines d'années seulement pousse à un accord à la hauteur de l'enjeu. Les scientifiques ont clairement averti que si rien n'était fait, le réchauffement se traduirait par de violentes tempêtes, des sécheresses, des guerres pour l'eau et des migrations massives. "La Cop 21 a la possibilité d’accélérer les choses pour ne pas en arriver là", estime-t-on chez Greenpeace France, où
on observe de plus en plus de phénomènes météorologiques extrême
s (inondations, sécheresse intense...).
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► Le dérèglement climatique accentue les crises humanitaires
La planète n’est pas la seule à pâtir du changement climatique. Ses habitants aussi, selon plusieurs ONG : le réchauffement devrait favoriser par exemple la propagation de maladies comme le paludisme, aggraver les crises liées à l'insécurité alimentaire et hydrique, les conflits liés à l'accès aux ressources naturelles, et provoquer des déplacements de population. "Oui, à l’avenir de plus en plus de réfugiés auront à fuir les pays dans lesquels l’agriculture est devenue impossible, où l’eau potable est devenue inaccessible, où leur territoire aura disparu à cause de la montée des eaux. D’ici 20 ou 30 ans, certains pays, notamment insulaires au Pacifique, risquent de disparaître totalement", assure-t-on chez Greenpeace.
► Une attente croissante au sein de l’opinion publique
En quelques années, le dérèglement climatique est devenu une réalité. Et les citoyens n’attendent plus nécessairement que les pouvoirs publics se mobilisent à leur place. "Contrairement à 2009, les citoyens peuvent désormais être acteurs et pas seulement observateurs, assure Jean-François Julliard. Chacun peut agir à son niveau avec un réel impact."
► Le leadership de la France à l’épreuve
Longtemps critiqué pour ne pas assez être "vert", François Hollande joue gros à l’occasion de la Cop 21. Un sujet sur lequel planche depuis plusieurs mois l’Elysée, entre déplacements à l’étranger (en Océanie fin 2014) et équipe renforcée (nomination de Nicolas Hulot comme "envoyé spécial pour la protection de la planète"). Pas sûr que cela suffise à convaincre les délégations des 195 pays présents à Paris : "François Hollande et Laurent Fabius ne peuvent pas convoquer le monde à Paris si la France n’est pas exemplaire dans le domaine de la transition énergétique. Or le problème, c’est que elle ne l’est pas : elle a beaucoup de retard dans le développement des énergies renouvelables, elle n’arrive pas à se débarrasser de l’énergie nucléaire. Comment la France pourrait-elle demander à la Chine de faire plus alors qu’elle développe ses énergies renouvelables plus rapidement qu’elle ?"
*"Les veilleurs du ciel", de Jean-François Julliard, à paraître le 17 septembre (ed. Don Quichotte).
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