Gestion de la crise sanitaire par Macron : "Comme il n'a pas de convictions, il n'a pas de ligne", selon l'ancien ministre, Michel Sapin

Publié le 29 septembre 2020 à 10h08

Source : TF1 Info

INTERVIEW POLITIQUE - Invité politique mardi 29 septembre, Michel Sapin, ancien ministre de l'Economie et des Finances, analyse la situation économique du pays en pleine crise liée à la pandémie de Covid-19.

Le gouvernement a présenté lundi 28 septembre le budget 2021 qu'il souhaitait adopter, dévoilé dans un contexte inédit, à l'ère du Covid-19. Sur la table : pas moins de 460 milliards d'euros, qui vont pour l'essentiel servir à financer la relance. Un budget hors-norme. Mais un "budget zombie" comme le souligne Eric Woerth, le président de la Commission des finances à l'Assemblée aux Echos. "Quand on monte un budget, on fait des hypothèses économiques ; ce qui n'est jamais facile et au fond, tout le monde s'est toujours un peu trompé, reconnait l'ancien ministre de l'Economie Michel Sapin ce mardi. Soit parce que le gouvernement a prévu plus, soit parce qu'il a prévu moins que la réalité mais alors là, c'est le comble, s'étonne-t-il. C'est extrêmement difficile pour un gouvernement de faire des prévisions sur l'année en cours (on ne sait même pas comment elle va se terminer) et l'année prochaine. Donc je ne ferai aucune critique sur la difficulté à faire des prévisions. Mais oui, le gouvernement navigue à vue."

Le projet de loi de finances pour 2021 prévoit une croissance de 8% l'an prochain, après une récession de 10% attendue cette année. Pour Michel Sapin, "Après -10%, on a +8, soit 2% de PIB en moins en 2022 par rapport à 2019, ce sont des millions d'emplois en moins. C'est considérable. Même avec un optimisme sur le rebond de l'année prochaine, nous avons une France en très mauvais état fin 2021". 

L'ancien ministre déplore que les aides aux entreprises "ne soient pas ciblées"

Autre axe majeur de ce budget 2021 : la poursuite des baisses d’impôts. “Nous allons continuer à baisser les impôts comme nous l’avons fait depuis trois ans à hauteur de 45 milliards d’euros”, s’est félicité Bruno Le Maire qui décompte “la moitié pour les ménages, l’autre moitié pour les entreprises et la baisse de l’impôt sur les sociétés qui sera ramené à 25% d’ici 2022”, soit "la plus forte baisse d’impôts engagée en France depuis 20 ans”. Michel Sapin note de son côté qu'"il y a des baisses d'impôts qui sont décidées : elles sont critiquables dans le contexte d'aujourd'hui, où il faut un budget de survie". 

Selon lui, il faut avant tout aider les entreprises en survie : "Il faut mettre plus d'argent dans le capital des entreprises pour qu'elles puissent rebondir. Il y avait des mécanismes, aussi, pour faire rebondir l'activité". Et déplore que "les aides ne soient pas ciblées" : "On va aider des gens qui n'en ont pas besoin (...) Aujourd'hui, c'est la survie pour pouvoir rebondir : si vous n'êtes plus là, vous ne rebondissez pas. Le rebond ne passe pas par un arrosage systématique et général : c'est gâcher l'argent public".

Autre sujet abordé : le reconfinement "préventif" en décembre, préconisé par deux prix Nobel d'économie, afin de maximiser les chances pour les Français de pouvoir passer Noël en famille. Michel Sapin ne pense pas que ce soit une bonne option, le premier confinement ayant été "catastrophique d'un point de vue économique" et se situe en cela au diapason du gouvernement actuel. Reste qu'il juge sévèrement la manière dont le chef de l'Etat traverse cette crise liée au Covid-19, l'ancien ministre considérant qu'"il a changé continuellement de postures : guerrière, infantilisante, raisonnable. Comme il n'a pas de convictions, il n'a pas de ligne". "C'est son problème", conclut-il.


Romain LE VERN

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