Extension du délai de recours à l'IVG : le texte de retour au Sénat ce mercredi

Publié le 19 janvier 2022 à 14h18
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ILLUSTRATION - Source : MARTIN BUREAU / AFP

DÉBAT - Déposée en août 2020, la proposition de loi prévoyant l'allongement du délai légal, de 12 à 14 semaines, pour recourir à une interruption volontaire de grossesse fait son retour au Sénat ce mercredi. Adopté à deux reprises par l'Assemblée nationale, le texte a déjà été, une première fois, rejeté par la chambre haute.

Un texte loin de faire l'unanimité. La proposition de loi de la députée (ex-LREM) Albane Gaillot sur l'interruption volontaire de grossesse va être examinée en séance publique ce mercredi 19 janvier au Sénat. C'est la deuxième fois que les élus de la chambre haute vont être amenés à se prononcer sur ces modifications de la loi Veil. En effet, après avoir été adopté en première lecture, avec modifications, par l'Assemblée nationale le 8 octobre 2020, il a été rejeté par le Sénat le 20 janvier 2021. Aucun accord n'a, dans la foulée, été trouvé en commission mixte paritaire. Le 30 novembre 2021, l'Assemblée nationale a de nouveau donné son aval, en effectuant de nouvelles modifications. La suppression de la clause de conscience spécifique, qui permet aux médecins et aux sages-femmes de refuser de pratiquer une IVG, a ainsi été enlevée. 

Allongement du délai légal mais pas seulement

Cette proposition de loi vise à "renforcer le droit à l'avortement", en allongeant notamment le délai légal pour y recourir de 12 à 14 semaines. D'autres dispositions y figurent, à l'instar de la suppression du délai de réflexion de deux jours, imposé afin de confirmer une demande d’avortement à la suite d'un entretien psychosocial, ou de la création d'une faute professionnelle pour un pharmacien refusant de délivrer un moyen contraceptif en urgence. Le texte pérennise également l'allongement du délai de recours à l'IVG médicamenteuse en ville jusqu'à 7 semaines (au lieu de 5 actuellement). Dans les faits, cette disposition est déjà appliquée depuis l'avis de la Haute Autorité de santé du 12 avril 2021 qui en faisait la recommandation. Il s'agit juste de la graver dans le texte de la loi. Enfin, cette proposition de loi vise à donner la permission aux sages-femmes de pratiquer des IVG chirurgicales (par aspiration) dans les hôpitaux et cliniques, pour faire face à l'important manque de praticiens médecins. 

Le Sénat va (encore) rejeter cette réforme

Logiquement, la majorité de droite au Sénat devrait, de nouveau, rejeter cette proposition de loi. Son président, Gérard Larcher, l'a confirmé ce mercredi, en direct sur LCI. "Moi qui suis favorable à l'intervention volontaire de grossesse, le vrai sujet, nous ne cessons de repousser les délais parce que nous sommes sortis de l'esprit de la loi Veil", a-t-il affirmé. "Nous sommes déjà passés de 10 à 12 semaines. Nous avons raccourci le délai de réflexion proposé à la femme. L'IVG, c'est toujours un moment difficile. [...] Ce n'est pas un acte banal", ajoute-t-il. L'élu LR privilégie plutôt un meilleur "accueil et accompagnement" des femmes qui souhaitent pratiquer l'interruption. 

Revirement de l'exécutif

Ce scepticisme a longtemps été partagé par l'exécutif. Un tel allongement du délai d’accès à l’IVG "n’est pas neutre pour les femmes", avait notamment souligné Emmanuel Macron dans les colonnes de La Croix. C'est pourtant le gouvernement qui a repris la main en décembre dernier, après l'adoption en deuxième lecture du texte à l'Assemblée nationale. Il a ainsi fixé au 19 janvier l’examen de la proposition de loi au Sénat, puis en commission mixte paritaire le lendemain. Les députés de la majorité ont pesé de tout leur poids pour forcer ce revirement. C'est également une manière pour le président de la République de tendre la main vers la gauche, à quelques mois de l'élection présidentielle. "Au-delà d’un progrès pour les droits des femmes, ce texte, qui est un marqueur social fort, une mesure progressiste, permet au gouvernement de se démarquer des relents conservateurs que l’on voit s’exprimer actuellement", confirme la députée Albane Gaillot. 

À noter que le Comité consultatif national d’éthique (CCNE), saisi par le ministre de la Santé, a donné son feu vert à cette réforme le 8 décembre 2020. Selon l'instance, il n'existe pas d'objection éthique à allonger de deux semaines le délai légal d'avortement. Il a toutefois mis l'accent sur la nécessité d'avoir une meilleure information dès l'école sur la sexualité et l'éducation affective ainsi qu'une meilleure prise en charge des IVG en France et l'amélioration des parcours de soins des femmes concernées. 

Le calendrier pour l'adoption de la loi est serré : avec l’élection présidentielle, la session parlementaire s’achève le 28 février. 


Maxence GEVIN

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