Face au FN, les errements stratégiques de Juppé et Sarkozy

GÉOMÉTRIE VARIABLE - Faut-il s'allier à la gauche pour faire "barrage au FN". Non, disent aujourd'hui en cœur Alain Juppé et Nicolas Sarkozy. En février dernier, le maire de Bordeaux disait pourtant autre chose. En fait, les deux responsables de la droite n'ont pas une doctrine très constante sur le sujet.
"La fusion non, le retrait non plus." La formule d'Alain Juppé, ce lundi, a le mérite d'être claire. Pas question, explique le maire de Bordeaux, à l'unisson de Nicolas Sarkozy, de pousser le candidat de la droite, Dominique Reynié, à retirer sa liste en Midi-Pyrénées pour faire "barrage au FN". Pas question de céder un pouce à la gauche, qui a pourtant, de son côté, annoncé qu'elle se retirait pour cette raison en Paca et dans le Nord.
Alain Juppé a toutefois ajouté une précision. Elle est de taille. Sa position vaut "pour cette élection", mais ne vaut pas "jurisprudence", dit-il. Le candidat potentiel à la présidentielle 2017 estime en effet que l'addition des voix de gauche suffirait à faire gagner la candidate socialiste dans cette région.
Du "cordon sanitaire" au "ni-ni"
Et puis, le maire de Bordeaux se sent probablement obligé de s'expliquer. Et pour cause : Alain Juppé fut, il y a vingt ans, l'un des apôtres
du "cordon sanitaire" face au Front national
… Et, il y a à peine 10 mois, il préconisait exactement cela lors de la législative partielle de dimanche dans le Doubs où le FN tentait de gagner un nouveau siège de député. "Si j'étais électeur dans la 4e circonscription du Doubs", martelait-il
sur son blog
,"je ne m’abstiendrais pas, je voterais pour le candidat qui l’affronte, c’est-à-dire le candidat PS". Tactiquement, il s'opposait alors frontalement à Nicolas Sarkozy, partisan du "ni gauche-ni FN".
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A bien y regarder, ni Sarkozy ni Juppé n'ont jamais eu de religion en la matière. Toujours hostile aux rapprochements avec le FN - le fameux "cordon sanitaire" - le maire de Bordeaux a pourtant eu, dans le passé, la main lourde contre ceux de son camp qui passaient la main à la gauche. En juin 1990, alors patron de l'ex-RPR, il avait même fait exclure du parti Alain Carignon, maire de Grenoble . Ce dernier avait commis le crime… d’appeler à voter pour la gauche lors de cantonales à Villeurbanne. "Nous n'avons pas du tout l'intention de faire la courte échelle au PS", claironnait Alain Juppé, alors adepte du fameux "ni, ni".
On le reverra beaucoup plus tard, fin 2013, optant carrément pour… le vote blanc en cas de duel gauche-FN, comme l'a repéré Le Figaro.fr . Et ce, bien qu'il ait affirmé quelques mois plus tôt qu'il soutiendrait de bon cœur un candidat socialiste, à condition qu'il fût "modéré" et "social-démocrate" .
En quête d'une doctrine
Quant à Nicolas Sarkozy, la devise du "ni-ni" peut difficilement faire loi si l'on s'en tient à son parcours. Dimanche, il martelait qu'il n'y aurait "ni fusion, ni retrait" de listes au profit de la gauche. En février dernier, il semblait, disait son entourage, sur le point d'adopter le principe du "barrage au FN" , avant d'adopter finalement une formule alambiquée pouvant s'apparenter au vote blanc. Lors des cantonales de 2011 , l'ex-Président avait en revanche clairement donné une consigne de vote "ni FN ni PS".
Au-delà du duel Sarkozy-Juppé, c'est bien toute la difficulté des Républicains à trouver une stratégie viable face au FN qui ressurgit à chaque scrutin. Au lendemain du premier tour de ces régionales, le "ni-ni" semble l'emporter. Début 2015, le député UMP Hervé Mariton affirmait toutefois à metronews que cette doctrine ne pouvait constituer "un viatique pour toutes les élections à venir". "Nous devrons trouver autre chose", reconnaissait-il. Mais quoi ? Chez Les Républicains, il faudra encore de nombreux bureaux politiques pour espérer trancher la question avant 2017.
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