Gilets jaunes : Taubira dénonce la "très lourde" responsabilité de la gauche

Publié le 16 décembre 2018 à 9h40
Gilets jaunes : Taubira dénonce la "très lourde" responsabilité de la gauche

REGRETS - Critique envers la réponse d'Emmanuel Macron à la crise des Gilets jaunes, Christiane Taubira n'épargne pas pour autant son propre camp. Courtisée par Benoît Hamon ou les écologistes pour les Européennes, elle attend un sursaut de la gauche et estime qu'il est encore temps pour qu'elle offre un débouché politique au mouvement des Gilets jaunes.

Elle s'exprime peu. Mais elle observe et analyse. Que pense Christiane Taubira des Gilets jaunes ? L’ancienne ministre de François Hollande juge que le mouvement est "ambigu" mais doit avoir selon elle avoir un débouché politique. Dans une interview accordée au journal du Dimanche, l'ancienne députée - désormais courtisée par plusieurs parti en vue des Européennes de 2019 - dit espérer que la gauche devienne "transformatrice" et non plus seulement critique, mais elle ne cache pas son peu d'espoir en sa famille politique qu'elle juge "désespéré(e) et désespérant(e)".

"Un réveil salutaire"

Le mouvement des Gilets jaunes  "ne s’est pas construit autour d’un projet, il vient d’une exaspération", explique-t-elle. De fait, "on y trouve de tout", autant de positif - "des citoyens, constatant que les espaces traditionnels d’expression démocratique n’existent plus, prennent d’assaut l’espace public pour faire monter leur parole, (...) ils font vivre la démocratie, et c’est une chance - que du négatif - "il y a incontestablement dans ce mouvement des personnes sexistes, racistes, homophobes, xénophobes, antisémites".

L'ancienne candidate à la Présidentielle estime pourtant qu'il s'agit d'un "réveil salutaire" et elle espère bien qu'il débouche sur un programme politique. "Un mouvement social sans débouché politique ne laisse que le sillage d’une révolte", dit-elle. "Il n’aura permis que de satisfaire des demandes conjoncturelles vite dépassées."

La gauche ne peut s’offrir le luxe de l’impuissance, elle ne peut manquer le rendez-vous des détresses et de l’espoir
Christiane Taubira

La gauche peut-elle y contribuer ? Elle le souhaite, d'autant plus qu'elle estime que "sa responsabilité est lourde, très lourde, sur le passé, sur le présent". "Elle peut l’être plus encore si la gauche ne comprend pas que c’est à elle qu’il revient d’offrir un débouché politique à ce mouvement", poursuit-elle. "La justice sociale, les conditions de travail, le niveau de vie, la mobilité, l’exclusion, la paupérisation, l’urbanisme qui isole : tous ces sujets sont ceux de la gauche."

Si elle veut une réponse de la gauche, pourquoi donc reste-elle en retrait ? Elle avoue avoir été sollicitée par les différents mouvements de gauche pour conduire une liste aux Européennes. "Mais c’est encore une fois chacun dans son couloir ! Il est tragique que la gauche ne se rende pas compte que l’enjeu, aujourd’hui, n’est plus de mener une liste", ajoute-t-elle. En attendant une prise de conscience, elle se montre patiente, se "réfrène" faute d'avoir les moyens d'agir. 

"Si la gauche ne comprend pas qu’elle a un rendez-vous à honorer, je ne veux pas être là juste pour lui maintenir la tête hors de l’eau", se défend-elle. "Je ne serai ni une caution ni un instrument."

Une réponse qui vient après deux journées de violences ! C’est très pernicieux : cela nourrit l’idée que c’est la bonne façon de se faire entendre. Le gouvernement aurait dû réagir plus vite.
Christiane Taubira

Si elle se montre dure envers sa famille politique, elle n'est évidemment pas tendre non plus avec celui qui a "jeté les manifestants dans la rue". L'erreur du président ? "Sa vision", répond Christiane Taubira. "Le chef de l’État ne semble pas accorder d’importance à des choses qui n’ont pas le statut de marchandises, comme l’accès aux droits ou aux soins… Il raisonne en termes de performance, de productivité, de résultats lucratifs."

Les propositions d'Emmanuel Macron face aux revendications des Gilets jaunes sont arrivées trop tardivement, selon elle et surtout "après deux journées de violence". Un mauvais signal : "C’est très pernicieux : cela nourrit l’idée que c’est la bonne façon de se faire entendre. Le gouvernement aurait dû réagir plus vite."


La rédaction de TF1info

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