La justice se penche sur les détournements de fonds présumés au Sénat : de quoi s'agit-il ?

Publié le 6 novembre 2017 à 11h52
La justice se penche sur les détournements de fonds présumés au Sénat : de quoi s'agit-il ?

DÉCRYPTAGE - Cinq anciens sénateurs contestent ce lundi, devant la cour d'appel de Paris, leur mise en examen dans l'enquête sur des détournements de fonds présumés au profit du groupe ex-UMP. LCI vous résume cette affaire au long cours.

C'est une audience cruciale dans l'enquête sur les détournements de fonds présumés au Sénat au profit de l'ancien groupe UMP du Palais du Luxembourg. Lundi, cinq anciens sénateurs contestent devant la cour d'appel de Paris leur mise en examen dans cette affaire, estimant notamment que la qualification pénale de "détournements de fonds publics" serait inapplicable aux parlementaires. LCI vous résume l'affaire. 

Un signalement de Tracfin

En juillet 2012, un signalement de Tracfin, la cellule antiblanchiment de Bercy, dévoilé par Mediapart, révèle que l'Union des républicains au Sénat (URS), association liée à l'UMP, a reçu plus de 450.000 euros du groupe UMP au Sénat entre novembre 2009 et mars 2012. Sur cette somme, 206.000 euros ont été versés sous forme de chèques à 27 sénateurs, et 112.000 euros débités en espèces. 

Plus tard, en juin 2015, d'autres versements sont retracés sur la période 2012-2015, dont une somme de 130.000 euros au profit du sénateur-maire de Marseille, Jean-Claude Gaudin. 

Comment ce système fonctionnait-il ?

Selon Mediapart, le système remonte à avant 2009. D'après l'enquête, les sénateurs, qui bénéficient d'un crédit mensuel de 7.600 euros pour rémunérer leurs collaborateurs, pouvaient, lorsqu'ils n'épuisaient pas la totalité de ce crédit, en déléguer une partie au groupe UMP du Sénat, afin que ce dernier embauche du personnel. Certains élus récupéraient ensuite le tiers de la somme versée au groupe UMP via l'URS. D'autres élus auraient été payés directement par le groupe UMP, bénéficiant ainsi d'un confortable "complément de revenu", en plus de leurs indemnités de 5.300 euros nets par mois. 

Selon une source proche des cinq sénateurs qui contestent leur mise en examen, "aucun n'avait conscience de commettre une infraction" à travers ce mécanisme de rétrocession. Mediapart a affirmé que François Fillon, alors sénateur, avait bénéficié de certaines sommes avant la période qui intéresse aujourd'hui la justice, ainsi que le sénateur Bruno Retailleau, dont il est proche. Dans cette enquête, neuf personnes, dont sept élus, ont été mises en examen par les juges financiers. 

Pourquoi contestent-ils leur mise en examen ?

Les cinq ex-sénateurs mis en examen, dont l'ancien trésorier du groupe UMP Jean-Claude Carles et l'ex-sénateur Henri de Raincourt, nient tout détournement et demandent la nullité de leur mise en examen. Une requête qui a poussé la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris - fait rarissime - à suspendre toute nouvelle investigation pour pouvoir se prononcer sur cette ligne de défense qui pourrait remettre en cause l'ensemble de l'enquête. 

Lundi, la cour d'appel doit se prononcer sur l'argumentaire des anciens sénateurs, qui invoquent la séparation des pouvoirs et l'autonomie des groupes politiques parlementaires garantie par la Constitution. Cela empêcherait selon eux au pouvoir judiciaire de s'immiscer dans la gestion de ces groupes politiques. En outre, selon les mêmes principes, la qualification pénale de détournements de fonds publics serait inapplicable aux parlementaires. 


Vincent MICHELON

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