Pauvreté : "On restera en situation d’échec si on investit pas dans l’accompagnement", affirme Olivier Noblecourt

Publié le 26 novembre 2019 à 14h19

Source : TF1 Info

L'INTERVIEW POLITIQUE - Olivier Noblecourt, le délégué interministériel à la prévention et la lutte contre la pauvreté, était l'invité ce mardi 26 novembre 2019 de l’interview politique d’Elizabeth Martichoux dans la matinale de LCI. Il est notamment revenu sur la politique du gouvernement en matière de pauvreté.

Olivier Noblecourt, délégué interministériel à la prévention et la lutte contre la pauvreté, était l'invité politique d'Elizabeth Martichoux ce mardi 26 novembre 2019. Il a longuement évoqué les questions de précarité et de pauvreté en France. Passage en revue de ses réponses.

Sur l'évolution de la pauvreté en France

"On observe bien sûr une grande diversité territoriale, mais la pauvreté a aussi évolué dans sa forme ces dernières années et pris de nouveaux visages. Elle s’est concentrée sur les âges les plus précoces, les enfants sont de plus en plus touchés, les familles monoparentales également, les étudiants, les salariés sont aussi de plus en plus présent et enfin, on observe un retour de la pauvreté dans le grand âge, avec des problèmes d’argent mais également un grand isolement. (...) Les plus pauvres ne faisaient pas parti de la contestation des Gilets jaunes, c’était une autre catégorie, de gens qui travaillent mais n’arrivent pas à boucler la fin de mois, qui ont le sentiment que finalement le travail ne payait plus, qu’ils n’avaient pas la qualité de vie en attendue. Mais les plus pauvres ne sont pas venus."

Sur l'effet des aides promises par Macron pour les plus démunis

"La prime d’activité permet d’avoir un bonus pour ceux qui ont un travail mais des ressources limitées. Il faut aussi parler de la revalorisation handicapé et du minimum vieillesse. Les dépenses de prévention et d’accompagnement sont le principal objectif, on a déshumanisé la relation avec les plus vulnérables. Aujourd’hui, c’est la limite dans laquelle nous sommes : on a de l’argent, mais on pourra augmenter sans cesse les cotisations, on restera en situation d’échec si on investit pas dans l’accompagnement et dans les projets du quotidien. Nous sommes en échec depuis 30 ans sur la pauvreté."

"Malgré un système social parmi les plus redistributifs et plus généreux, nous avons un niveau et une forme de pauvreté inacceptable pour un pays comme le nôtre, aussi riche. Nous sommes confrontés à la privation de la santé, aux difficultés d’accès au logement, les associations y sont confrontées chaque jour et les Restos du cœur ne veulent plus uniquement distribuer des repas."

Sur l'absence de baisse de la pauvreté en 2018

"Il y a une colère sociale et démocratique car il y a une impression que les politiques sociales sont impuissantes à agir réellement sur la vie du quotidien. Les gens en ont marre des effets d’annonces, mais les résultats sont longs car ce que nous faisons est un travail de profondeur, plus exigeant, qui prend plus de temps que simplement envoyer de l’argent. C’est un travail de fourmi, l’action social est une école d’humilité. On ne peut pas considérer que l’aide monétaire règle les problèmes de pauvreté. Il faut aider ces gens à retrouver le marché du travail, il faut bosser avec les départements, sur le terrain."

"Aujourd’hui sur deux millions de bénéficiaires du RSA, un million sont en difficulté sociale, ce sont eux les plus fragiles, ils nous disent que la société a décidé à leur place qu’ils étaient inemployables. Aujourd’hui, il faut six mois pour bénéficier d’un suivi quand on a le RSA, nous avons comme objectif de le ramener à 30 jours, avec quelqu’un qui vous aide à avoir des démarches, un parcours de formation, donne des outils pour un entretien d’embauche. Aujourd’hui, il y a un sentiment de dépossession des choix de leur vie, ils se sentent infantiliser, du type 'prends l’argent et laisse nous tranquille', mais eux souhaitent accéder au travail. Donc nous mettons 15 milliards d’euros pour l’accompagnement à la formation et 9 milliards contre la pauvreté."

Sur le timing des résultats des mesures mises en place

"Le plan a démarré en janvier 2019, nous aurons des résultats tangibles en fin d’année. En particulier, nous aurons des chiffres sur les sorties sèches de l’aide sociale à l’enfance, ces jeunes, qui à 18 ans, sont jetés hors de l’aide sociale. Nous nous rendrons compte de la réalité sociale de ces jeunes dès le 1er trimestre 2020, nous saurons ce qu’ils deviennent et comment agir pour ne plus les lâcher dans la nature. Nous aurons aussi des informations sur le taux de privation matérielle des enfants." 


La rédaction de TF1info

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