Que dit l'article 73 du code de procédure pénale, qu'invoque Alexandre Benalla pour justifier les violences du 1er mai ?

Publié le 21 janvier 2019 à 14h25, mis à jour le 21 janvier 2019 à 14h38

Source : Sujet TF1 Info

DROIT - Pour justifier son intervention place de la Contrescarpe, prêtant main forte aux forces de police le 1er mai dernier, Alexandre Benalla et ses avocats invoquent l'article 73 du code de procédure pénale. Que dit-il ?

L'article 73 du code de procédure pénale peut-il sauver le soldat Benalla ? C'est en tout cas derrière lui que se retranchent Alexandre Benalla et ses avocats pour justifier les agissements du premier place de la Contrescarpe le 1er mai dernier. Une ligne de défense entamée le 23 juillet par communiqué de ses avocats : "Cette initiative personnelle de monsieur Benalla, qui s’inscrit dans le cadre des dispositions de l’article 73 du code de procédure pénale et n’a eu aucune conséquence pour les personnes interpellées, sert manifestement aujourd’hui à porter atteinte à la Présidence de la République dans des conditions qui défient l’entendement." 

"Je n'ai pas fait une arrestation"

Sur LCI le soir même, maître Laurent-Franck Lienard, qui a depuis quitté la défense de Benalla, avait récidivé en assurant que son ex-client "n’avait pas le mandat mais tous les citoyens ont le mandat, parce que l’article 73 du code de procédure pénale nous accorde à tous la possibilité d’interpeller des auteurs d’infractions flagrantes, à tous."

Au Monde, l'intéressé, tout en reconnaissant sa faute "politique", reste droit dans ses bottes, jugeant que les CRS "n'arrivaient pas à les maîtriser" : "Je n'ai pas fait une arrestation, j'ai appréhendé quelqu'un et l'ai remis aux policiers. Les gens ont des agissements délictueux, ils cassaient en toute impunité. [...] Si je n'étais pas collaborateur de l'Elysée, je referais la même chose". Rebelote le 21 janvier, quand, devant la commission d'enquête parlementaire du Sénat, il réaffirme : "Les personnes qu'on m'a reproché d'avoir tabassé n'étaient pas de gentils manifestants. C'étaient des délinquants et j'ai cru être dans mon droit en faisant usage de l'article 73 du code de procédure pénale."

Est-ce vrai ? Que dit cet article 73 ? "Dans les cas de crime flagrant ou de délit flagrant puni d’une peine d’emprisonnement, toute personne a qualité pour en appréhender l’auteur et le conduire devant l’officier de police judiciaire le plus proche" lit-on sur Legifrance. "Lorsque la personne est présentée devant l’officier de police judiciaire, son placement en garde à vue, lorsque les conditions de cette mesure prévues par le présent code sont réunies, n’est pas obligatoire dès lors qu’elle n’est pas tenue sous la contrainte de demeure à la disposition des enquêteurs et qu’elle a été informée qu’elle peut à tout moment quitter les locaux de police ou de gendarmerie. Le présent alinéa n’est toutefois pas applicable si la personne a été conduite, sous contrainte, par la force publique devant l’officier de police judiciaire" continue l'article.

L'article peut-il s'appliquer à Alexandre Benalla ?

Sur LCI, maître Sahand Saber, l'avocat du couple qui a subi les violences d'Alexandre Benalla le 1er mai dernier, et qui avait été effectivement filmé en train de jeter des objets divers en direction des CRS, avait estimé que cette défense ne tenait pas. "Alexandre Benalla n’est pas quelqu’un qui est appelé par le devoir et qui veut apporter son concours aux forces de l’ordre. C’est quelqu’un qui est venu avec un casque, avec des gants, un brassard de police pour faire le travail de la police. (…) Penser que nos forces de police n’étaient pas en mesure de contenir la manifestation, c’est un propos qui est un peu osé" a-t-il estimé.

Auditionné par le Sénat, le chef de cabinet de Gérard Collomb Jean-Marie Girier était allé dans le même sens : le contexte tendu du 1er mai et la violence de certains manifestants ne doivent "en aucun cas [...] être rapproché de l'intervention d'Alexandre Benalla". Le commandant Leleu, à la tête de la compagnie de CRS intervenant place de la Contrescarpe le 1er mai, s'était quant à lui contenté de dire que l'intervention du futur ex-chargé de mission et de Fabien Crase n'avaient pas apporté "de plus-value significative" à l'opération menée par ses hommes.

Interrogé sur RMC, Florent Boitard, de l'Union syndicale des magistrats, avait également pensé que l'invocation de l'article 73 ne pouvait pas être faite dans le cas d'Alexandre Benalla. "Cet article semble plutôt conçu pour des gens qui ne sont pas du tout en présence des services de police ou de gendarmerie. (…) Dans ce cas-là, on est dans un dispositif de sécurité publique où des policiers sont présents. Ce n’est pas l’esprit du texte de pouvoir être appliqué quand des policiers ou des gendarmes sont juste à côté." Alexandre Benalla devra donc peut-être chercher autre chose pour sa défense.


La rédaction de TF1info

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