INVENTAIRE – Si sur le plan économique, le bilan de François Hollande est loin d’être catastrophique, la Fondation Jean Jaurès pointe un quinquennat "gangrené par le flou idéologique et politique".
Un an et demi après le départ de l’Élysée de François Hollande, la Fondation Jean Jaurès - fondation politique proche du PS - publie ce jeudi un bilan approfondi de son quinquennat. Cet inventaire, fruit de huit mois de travail auquel ont collaboré près de 70 personnes, tente de poser un "regard nuancé" sur les cinq années de cette présidence "anormale".
Sans ironie, ni provocation, le rapport commence par lister toutes les réalisations de ce quinquennat. Et elles sont nombreuses : du mariage pour tous au non-cumul des mandats, en passant par la retraite à 60 ans pour ceux qui ont commencé tôt et la création de 54.000 postes dans l’Éducation nationale.
Avant tout, les auteurs de ce rapport tiennent à "regarder froidement" ce qui a été fait. Avant de s’interroger sur ce paradoxe. Si "l’action a été largement conforme au programme – deux tiers des promesses ont été tenues, totalement ou partiellement", pourquoi "la perception est diamétralement opposée" ?
Un bilan économique honorable
Il est vrai qu’en comparant la situation économique de la France en 2012 à celle de 2017, les chiffres plaident globalement pour François Hollande. "Le déficit public : réduction de 5,2 % à 2,7 %. Les comptes de la Sécurité sociale : du déficit du régime général de 17,4 milliards d’euros à quasiment l’équilibre. Le taux de marge des entreprises : augmentation de deux points pour retrouver son niveau d’avant 2008, à 32,1 %. Le nombre de créations nettes d’emplois : 550 000 cumulés en 2016 et 2017. Le taux de croissance : de 0,3 % en 2012 à 2,2 % en 2017", rappellent les auteurs.
Malheureusement, le prédécesseur d’Emmanuel Macron avait choisi comme seule boussole de son action la lutte contre le chômage. Or, dans ce domaine, "la situation n’a guère changé" entre 2012 et 2017. Et finalement, derrière ce bilan économique loin d’être indigne, persiste l’idée que l’action du gouvernement n’a pas amélioré le sort des Français. D’où ce constat fait par la Fondation Jean Jaurès : "la situation de la France s’est davantage améliorée que celle des Français".
"Un excès d’irresponsabilité collective"
Alors pour comprendre l’amertume des Français à l’égard de François Hollande, les auteurs ont donc décortiqué son quinquennat sous toutes ses coutures. Campagne présidentielle, programme, exercice du pouvoir… Et dans ce domaine, l’examen se révèle relativement... désastreux. Il y a tout d’abord les promesses imprudentes comme celle de la "présidence normale" ou encore celle de taxe à 75 % sur les plus hauts revenus.
Il y a ensuite les innombrables fautes politiques. De la fiscalité des plus modestes alourdie avant d’être allégée à la taxe sur les poids lourds mise en place avant d’être supprimée, ce gouvernement s’est trop souvent contredit. A ce titre, la gestion du cas Notre-Dame-des-Landes est exemplaire. Décidée avant d’être reportée puis votée et finalement reportée sine die, la construction de cet aéroport illustre presque à lui seul le degré sidérant de tergiversation dont a été capable le pouvoir socialiste.
Mais si la responsabilité personnelle de François Hollande est indéniable dans cette gestion chaotique du pouvoir à l’image du débat lancé sur la déchéance de nationalité, la Fondation Jean Jaurès rappelle qu’il a été grandement aidé, pointant "un excès d’irresponsabilité collective" qui dépasse le cadre de la majorité. Les auteurs citent pêle-mêle certains partenaires sociaux comme le Medef, la CGT et FO, les écologistes d’Europe-Ecologie - Les Verts ou encore certaines "personnalités qui ont donné l’impression de jouer leur propre partition". Ils soulignent toutefois la "responsabilité particulière" des frondeurs du PS, "emportés dans une surenchère sans fin" et "contribuant à convaincre que les socialistes étaient divisés sur tout, y compris sur l’essentiel".
La Fondation Jean Jaurès évoque enfin l’absence d’un récit capable de rendre lisible et cohérent l’action politique de ces cinq années ainsi que le fait, de la part des socialistes, d’avoir "insuffisamment repensé quelques problématiques clés, qu’il s’agisse justement de son rapport à l’économie, à l’Europe, à la question sociale (à travers celle des banlieues, notamment) et à celle de l’islam" avant d’arriver au pouvoir.