Téléchargement illégal de séries et de compétitions sportives : le Sénat propose une amende de 350 euros

par Maëlane LOAËC
Publié le 20 mai 2021 à 13h37, mis à jour le 21 mai 2021 à 9h27
Un fichier comportant des données médicales sensibles pour une liste de près de 500.000 personnes en France circule sur internet depuis mi-février.
Un fichier comportant des données médicales sensibles pour une liste de près de 500.000 personnes en France circule sur internet depuis mi-février. - Source : iStock

PIRATAGE - Une commission sénatoriale propose de sanctionner des internautes accusés de téléchargement illégal d’une amende de 350 euros maximum. Un amendement dans ce sens sera examiné au Palais du Luxembourg à partir de ce jeudi.

Payer une transaction de 350 euros pour éviter de passer à la barre à cause de téléchargements illégaux répétés : c’est l’une des propositions formulées par la commission de la Culture du Sénat le 5 mai dernier dans le cadre du projet de loi contre le piratage. Ce texte reprend une partie de la réforme sur l'audiovisuel portée à l’automne 2019 par l’ancien ministre de la Culture, Franck Riester, avant d’être abandonnée à cause de la crise sanitaire. Il doit être examiné ce jeudi par l’hémicycle du Palais du Luxembourg, ainsi que les quelque 90 autres amendements adoptés par cette commission sénatoriale, avant de partir à l'Assemblée Nationale. 

Dissuader les pirates et désengorger les tribunaux

Comment cette sanction se mettrait-elle en place ? Un internaute reconnu coupable à plusieurs reprises de téléchargement illégal de contenus audiovisuels pourrait se voir proposer de payer une amende d'un montant de 350 euros - un plancher qui monte à 1050 euros pour les personnes morales. S’il refusait cette “transaction pénale”, il deviendrait passible de poursuites judiciaires. Ce n’est pas la première fois que cette proposition est mise sur la table, puisque la députée LREM des Yvelines Aurore Bergé ayant rédigé cet amendement au projet de loi sur l’audiovisuel.

Actuellement, c’est la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi) qui lutte contre le téléchargement illégal, principalement par l’envoi d’avertissements aux internautes délictueux. Au bout de trois courriers, le dossier peut être porté devant le tribunal de police, avec à la clé une peine maximale de 1500 euros d’amende. 

Le dispositif actuel d'Hadopi jugé inefficace

Selon le dernier rapport annuel de l’institution, celle-ci a envoyé 13 millions d’avertissements depuis sa création en 2009, tandis que le montant cumulé des amendes prononcées s’élève à 87 000 euros. En 2019, 1748 dossiers ont été transmis au procureur de la République, soit environ 42% des 4210 constats de négligence caractérisée, autrement dit des troisièmes avertissements. 

Un dispositif jugé inefficace par le rapporteur sénatorial LR de la commission, Jean-Raymond Hugonet, qui affirme à l’inverse que cette nouvelle amende aurait pour objectif de dissuader plus facilement les pirates en leur retirant leur “sentiment d’impunité”, tout en désengorgeant les cours de justice. À noter tout de même : les parties civiles pourraient toujours intenter un procès contre l’internaute pour récupérer des dommages et intérêts. 

L’institution en charge de ces transactions pénales serait cette fois l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique : c’est l’organe qui doit naître de la fusion entre Hadopi et le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel, chantier central de ce projet de loi. 

Une proposition loin d'être retenue

Mais face à la réticence du Ministère de la Culture, l’amendement ne semble pas prêt de figurer dans le texte final de la réforme. La répression accentuée qu’il propose ne convainc pas Roselyne Bachelot, qui juge ce durcissement “inopportun” auprès de l’AFP, “surtout dans le contexte actuel”.  

Cette position n’est pas nouvelle : le prédécesseur de Roselyne Bachelot, Franck Riester, avait déjà opposé un non catégorique aux réclamations de 26 organisations professionnelles du cinéma, de la musique et de l’audiovisuel, dont la Sacem, qui plébiscitaient une amende dans une tribune parue en février 2020.  “On ne veut pas avoir un dispositif qui renforcerait des sanctions sur les internautes”, avait fait savoir l'ancien ministre. 

En 2020, un quart des Français ont consulté des sites de streaming illégal

Le débat se poursuit donc, tandis que le streaming illégal a progressé en 2020, selon un rapport remis par Hadopi le 6 mai dernier. Un quart des internautes français ont consulté des sites illicites chaque mois tout au long de l’année, soit 12,7 millions de personnes. Ce piratage représente un manque à gagner d’un milliard d’euros pour les offres légales de l’audiovisuel et du sport, révélait l’autorité en décembre dernier. 

 Ce sont surtout les compétitions sportives, diffusées illégalement en live streaming, qui attirent ces internautes, tandis que le cinéma et les séries sont davantage consommées sur les plateformes légales et payantes de service vidéo à la demande. Netflix et consorts ont quasi doublé leur nombre d’abonnés en 2020, avec 8,3 millions d’utilisateurs contre 4,5 millions l’année précédente, selon une étude de Hadopi et du CSA publiée en mars dernier. Un chiffre sous-évalué, à cause des nombreux partages de codes dans l’entourage d’un abonné.

Pour autant, le streaming légal peine à endiguer le piratage : les abonnés aux plateformes de SVOD sont aussi ceux qui piratent le plus, pour éviter de payer plusieurs abonnements, précise l’étude. 

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Maëlane LOAËC

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