Comptes de campagne de Mélenchon, emplois présumés fictifs : ce qu’on lui reproche, ce qu’il répond

Publié le 19 octobre 2018 à 13h53, mis à jour le 19 octobre 2018 à 15h42
Comptes de campagne de Mélenchon, emplois présumés fictifs : ce qu’on lui reproche, ce qu’il répond

JUSTICE - Le patron de la France Insoumise a été perquisitionné mercredi matin, ainsi que le siège de son mouvement et certains de ses membres. Une "manœuvre politique", a dénoncé le député. Quelles sont ces enquête en cours et que répond Mélenchon ? LCI fait le point.

Deux jours après la fronde des "Insoumis" lors de perquisitions houleuses, Jean-Luc Mélenchon a toujours la dent dure. Après avoir été entendu pendant 5 heures par la police jeudi, le député des Bouches-du-Rhône a de nouveau dénoncé vendredi une "une  campagne d'affabulations". En cause : des enquêtes sur les assistants d'eurodéputés de son parti, et sur ses comptes de campagne. Deux affaires que LCI vous aide à comprendre.

Que reproche-t-on à Jean-Luc Mélenchon ?

L'affaire ne concerne pas seulement sa personne, mais aussi des élus de son mouvement. En effet, deux enquêtes préliminaires ouvertes par le parquet de Paris, l'une sur des emplois fictifs présumés au Parlement européen, l'autre sur des comptes de campagne.

La première concerne des présumés emplois fictifs d'assistants parlementaires européens, ouverte à la suite de signalements de l'eurodéputée Sophie Montel. Quand le Front national avait été épinglé par les instances européennes, cette élue frontiste avait contre-attaqué en dénonçant d'autres formations : le MoDem, et la France Insoumise. Dans le détail, les enquêteurs cherchent à savoir si des assistants parlementaires, financés par le Parlement européen pour travailler auprès des eurodéputés, auraient en réalité été affectés à des tâches en rapport avec le parti auquel ils sont affiliés.

La seconde enquête, elle, porte sur les comptes de campagne de Jean-Luc Mélenchon pendant la présidentielle. Elle a été lancée après deux signalements à la justice: l'un du président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP), l'autre de la cellule française de renseignement financier Tracfin. La CNCCFP, qui a validé fin 2017 les comptes des onze candidats malgré certaines dépenses retranchées - 434.939 euros sur 10,7 millions déclarés concernant Jean-Luc Mélenchon - avait justifié ce signalement adressé mi-mars par des "interrogations", notamment sur les dépenses facturées par deux associations, L'Ere du peuple et Mediascop.

Pourquoi ces associations intéressent-elles les enquêteurs ?

La commission avait constaté que L'Ere du peuple, association sans activité commerciale déclarée, avait facturé à la campagne 440.027 euros correspondant à des locations de salles, de matériels informatiques et audiovisuels, et à des prestations intellectuelles de quatre de ses salariés, dont trois étaient également membres de l'équipe de campagne. Elle avait retranché une partie des dépenses.

Mediascop est quant à elle au cœur de l'enquête : cette société est dirigée par Sophia Chikirou, qui était responsable de la communication du candidat. La société avait pour sa part facturé 54.600 euros, et la commission en avait retranché 35.250 euros au motif d'"écarts significatifs" entre les montants et "la grille tarifaire de cette entreprise". Ce vendredi, Radio France avance des chiffres d'une tout autre ampleur selon lesquels, Sophia Chikirou a facturé "pour près de 1,2 million d'euros de prestations, soit 11% du budget total de la campagne" par le biais de son agence de communication.  Sophia Chikirou était entendue vendredi matin à Nanterre par les policiers en charge de  l'enquête sur les comptes de campagne de LFI. 

Qui est Jean-Guy de Chalvron, contre qui LFI porte plainte ?

Son nom revient en boucle dans le dossier des comptes de campagne. Jean-Guy de Chalvron était l'un des deux rapporteurs chargé d'examiner les comptes de campagne de LFI. Après ses constatations, il avait claqué la porte de la  commission, estimant que ses réserves portant sur 1,5 million d'euros n'avaient  pas été prises en compte et n'auraient pas dû être remboursées par l'Etat.  Aujourd'hui, Jean-Guy de Chalvron est dans le viseur de LFI qui a porté plainte contre lui en septembre dernier pour dénonciation calomnieuse. "Mon métier, c'est de contrôler, je n'ai pas fait ça légèrement", s'est défendu Jean-Guy de Chalvron sur LCI, estimant que certaines des surfacturations relevaient du pénal. 

Pourquoi une troisième enquête a-t-elle été ouverte jeudi ?

En raison de la tension qui a régné mercredi, lors des perquisitions. Des magistrats du parquet de Paris ayant été pris à partie, le procureur de Paris François Molins avait demandé au procureur général d'être dessaisi de cette procédure au profit du procureur du tribunal de grande instance le plus proche, "dans un souci d'impartialité", avait indiqué le parquet mardi. Une enquête pour "actes d'intimidation contre l'autorité judiciaire" et "violences sur personnes dépositaires de l'autorité publique" a donc été ouverte.

Que répondent Jean-Luc Mélenchon et les protagonistes de la France Insoumise ?

Jean-Luc Mélenchon a dénoncé jeudi une "manœuvre politique" à la sortie de cinq heures d'audition par la police dans les enquêtes sur ses comptes de campagne présidentielle et sur les assistants d'eurodéputés de son parti. Estimant avoir été interrogé "cinq heures pour enfoncer des portes ouvertes", Jean-Luc Mélenchon a affirmé avoir déjà répondu par écrit à l'administration du Parlement européen aux questions sur les emplois présumés fictifs d'assistants d'eurodéputés, au cœur d'une enquête préliminaire du parquet de Paris.  Sur l'enquête préliminaire qui le vise, cette fois sur ses comptes de campagne de la présidentielle 2017, M. Mélenchon a aussi estimé qu'il n'avait rien à dire de plus, rappelant que ceux-ci avaient été "validés".

Pour l'ancien candidat de la présidentielle de 2017, cette enquête, qui "assure le service après-vente du pouvoir dans sa campagne contre La France insoumise", "accuse calomnieusement" la société Mediascop et sa responsable Sophia Chikirou de surfacturation dans la campagne. "Mediascop et Sophia Chikirou sont dans cette affaire des boucs émissaires", tranche-t-il dans un communiqué. Et de marteler : "Chaque point sera démenti, toutes les poursuites judiciaires nécessaires seront engagées". 

Et les accusations de Jean-Guy de Chalvron ? Jean-Luc Mélenchon les balayent. "Toutes ces enquêtes sont déclenchées sur l'initiative de  gens politiquement engagés et déjà eux-mêmes sous le coup de procédures  judiciaires comme M. (Jean-Guy) de Chalvron, rapporteur de notre compte de  campagne", a-t-il expliqué vendredi, en évoquant "une nouvelle campagne d'affabulation".

Questionné sur ces mêmes faits, le député LFI du Nord Adrien Quatennens  a dénoncé vendredi les "supputations" des chiffres avancés par Radio France.  "Il n'y a pas eu de surfacturation", a asséné le député sur LCI dénonçant un "deux poids, deux mesures" face à d'autres comptes de campagne notamment ceux d'Emmanuel Macron. Il avait confirmé un peu plus tôt dans la matinée que le "conseil" apporté par Mediascop pendant "toute la  campagne" à LFI avait été facturé "80.000 euros", quand "l'agence de  communication qui a travaillé pour Emmanuel Macron, Jésus et Gabriel", les a  facturées "pour huit mois 103.500 euros".  "Toute cette affaire qui n'en est pas une, c'est de la politique déguisée".


La rédaction de TF1info

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