Attaque au couteau à Nice : quelle protection pour les lieux de culte en France ?

ALG
Publié le 29 octobre 2020 à 16h57, mis à jour le 30 octobre 2020 à 13h14

Source : JT 13h Semaine

ZOOM - L’attentat dans une église de Nice ravive la question de la protection des lieux de culte, déjà posée en 2015 et 2016, après la prise d'otages de l'Hyper Cacher et l'assassinat du père Hamel. Mais sécuriser les dizaines de milliers d'édifices religieux français est une gageure.

Avec l'attaque au couteau qui a fait trois morts dans la basilique Notre-Dame de Nice, la question de la protection des lieux de culte refait naturellement surface. Elle avait émergé dans le débat public dans la foulée des attentats de Charlie Hebdo et de l’Hyper Cacher en janvier 2015 poussant les autorités à mettre en place une mission de coordination de la protection des lieux de culte, par exemple  pilotée par un préfet. Son but ? Protéger et préconiser des mesures de prévention en concertation avec les acteurs de l’Etat et les représentants des cultes.

Quelques semaines plus tard, en avril, la menace pesant sur les lieux de culte catholiques s'était concrétisée, lorsque la police avait annoncé l'arrestation de Sid Ahmed Ghlam alors sur le point de commettre une attaque terroriste contre une église de Villejuif pendant la messe du dimanche. Les mesures de protection des églises et autres abbatiales avaient d'ailleurs été renforcées après cet attentat déjoué. 

"Opération sentinelle renforcée"

Cinq ans plus tard, dans la foulée de l'attaque terroriste islamiste dans la basilique Notre-Dame qui a fait trois morts en plein cœur de Nice, Emmanuel Macron vient à son tour d'annoncer un renforcement des mesures. "Ce matin, nous avons décidé d'augmenter la posture de vigilance partout en France, pour nous adapter à la menace terroriste." En ce sens, "nos militaires seront davantage mobilisés dans les prochaines heures", a-t-il précisé. "Nous passerons la mobilisation, dans le cadre de l'opération Sentinelle, de 3.000 à 7.000 militaires sur notre sol. Nous nous mettrons en situation de protéger tous les lieux de culte, en particulier les églises", a-t-il ajouté alors que la Toussaint s'approche. Cette mobilisation exceptionnelle de moyens est la conséquence de l'activation du niveau "urgence attentat" du plan Vigipirate, annoncée un peu plus tôt par le ministère de l'Intérieur.

Sollicité par LCI pour plus de précisions sur les moyens déployés et les personnels mobilisés mais aussi sur le nombre de sites sensibles faisant l'objet d'une protection accrue, à ce jour et à la veille de cette attaque, le ministère n'a pour l'heure pas donné suite. Selon nos informations, après l'attaque de Nice, Beauvau a fait passer aux forces de l'ordre une série de  consignes visant à sécuriser lieux de culte, cimetières, lieux d'enseignement et de la petite enfance, les services publics, les gares, les aéroports et les entreprises de presse.

A titre d'illustration, en juillet 2017, l'Intérieur alors contacté par 20 Minutes avait fait savoir qu’à date, "821 sites juifs, dont 434 en Ile de France, 1098 sites musulmans et 2441 sites chrétiens [faisaient] l’objet d’une surveillance dans le cadre de patrouilles de la police nationale, de la gendarmerie ou des forces armées". En janvier 2016, Bernard Cazeneuve, alors ministre de l'Intérieur, avait déclaré que ce dispositif mobilisait alors 15.000 hommes.

A noter que la France compte 50.000 édifices chrétiens, lesquels englobent aussi bien des églises, que des temples, des chapelles ou des écoles. Le culte catholique en dénombrerait 45.000 à lui seul. On recense par ailleurs 4.000 lieux de culte protestants, 2.500 mosquées écoles musulmanes et 800 lieux de culte juifs dont près de la moitié sont des synagogues, selon un rapport sénatorial en date de 2015. A l'époque, déjà, l’impossibilité de sécuriser tous les sites concernés n'avait pas tardé à être mise en lumière, la protection, des édifices chrétiens notamment se révélant matériellement impossible. 

Patrouilles dynamiques

Objet d’attentions particulières, les sites chrétiens auraient été davantage visés par des atteintes diverses que les sites d’autres religions ces dernières années. "Entre 2008 et 2016, les actes antichrétiens ont augmenté de + 245 %. Une grande partie est constituée par des actes de vandalisme (399), tandis que 191 vols d’objets cultuels ont été constatés. Certains ont un motif crapuleux. D’autres recouvrent des motivations idéologiques diverses. Enfin, beaucoup sont purement gratuits", expliquait le ministère de l'Intérieur Bruno Le Roux, en février 2017.

"Sur un plan préventif, l'État poursuit ses efforts en matière de protection des lieux à caractère cultuel, d'une part à travers le dispositif 'Sentinelle' sous la forme de patrouilles dynamiques, composées de militaires, de policiers ou de gendarmes sous l'autorité des préfets territorialement compétents et d'autre part matériellement depuis 2015, avec environ 4 millions d'euros alloués au financement de travaux de sécurisation de sites chrétiens (dispositifs de vidéoprotection, systèmes d'alarme, portails, etc.)", soulignait-on en octobre 2019 Place Beauvau en réponse à une question écrite formulée par le sénateur LR Édouard Courtial concernant la sécurisation des églises.

Vigilance concernant les célébrations religieuses

Pour rappel, dimanche 25 octobre, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a transmis un télégramme de trois pages aux préfets et aux directeurs généraux de la police nationale et de la gendarmerie leur ordonnant de prendre des mesures de protection des lieux de culte. Ce dernier, rédigé par la Direction générale de la police nationale (DGPN), et que Le Point a pu consulter, présente les lieux de culte comme des cibles, qu'ils soient chrétiens – à l'approche de la Toussaint – ou musulmans – plusieurs imams sont visés pour leur soutien au président de la République et à un islam de France. Le document faisait notamment référence au communiqué de l’agence Thabat, mais également "d’autres éléments de propagande récemment diffusés par des organes", en lien avec le groupe État islamique (EI), à la suite de l’attaque terroriste de Conflans-Sainte-Honorine. 


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