Réouverture des écoles le 11 mai : les modalités de Blanquer suscitent inquiétudes et critiques

par Hamza HIZZIR
Publié le 21 avril 2020 à 18h02

Source : JT 13h Semaine

DÉCONFINEMENT - Le ministre de l'Education nationale a dévoilé ce mardi les modalités d'un retour à l'école à partir du 11 mai. Des annonces qui n'ont rassuré personne du côté des enseignants, des syndicats et des politiques.

Il s'agissait de dissiper quelque peu le flou entourant la réouverture progressive des écoles le 11 mai annoncée par Emmanuel Macron la semaine dernière, et de rassurer ainsi parents et enseignants. Raté. 

Les "grands principes" de cette reprise (pas plus de quinze élèves par classe et échelonnement selon les niveaux), distillés ce mardi matin par le ministre de l'Education nationale, Jean-Michel Blanquer, devant la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale, suscitent au contraire, quelques heures plus tard, encore beaucoup d'inquiétudes. 

"Il n'y a pas grand-chose de réaliste dans toutes ces annonces, pointe Catherine Da Silva, directrice d'une école primaire de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), interrogée par TF1. Elles posent plus de questions qu'elles n'offrent de réponses. Mais c'est un peu toujours la même chose depuis le début... Néanmoins, c'est un point de départ pour commencer à réfléchir à cet accueil. Quinze élèves par classe, ça me semble excessif, notamment en maternelle, avec des enfants de quatre ou cinq ans, pour qui apprendre les gestes barrières sera compliqué. Et  il y a aussi tout ce qui va être déplacements dans les locaux. Contrairement à ce qu'on croit, un école n'est pas un grand espace. Rien que dix classes de quinze, ça ferait 150 élèves, ce n'est pas rien. Les cantines sont plus petites. Et puis, si les enseignants sont dans les classes, ils ne pourront pas faire du distanciel en plus."

"Une énorme masse de population en déplacement"

Catherine Da Silva, qui dirige une école comptant 262 élèves, évoque aussi la problématique du déjeuner : "En temps normal, 80% de nos élèves déjeunent à la cantine. Je ne vois pas comment faire. On n'a que trois salles en élémentaire pour faire manger les enfants. En général, ils sont huit par table. Pour la distanciation sociale, il en faudrait beaucoup moins. Donc ça veut peut-être dire que des parents seront obligés de venir récupérer leurs enfants sur le temps de la cantine.

Dans une ville comme la nôtre, où il y a 72 écoles, vous imaginez bien que ça représenterait une énorme masse de population en déplacement, et énormément d'enfants à prendre en charge. Et comme les locaux ne sont pas infinis, j'ai du mal à concevoir la façon dont on va procéder. Tout ça reste à préciser, justement avec nous, les enseignants, et les syndicats qui nous représentent."

Des syndicats qui, eux aussi, continuent de se montrer inquiets. "On doit nous donner les conditions sanitaires de cette reprise, a, par exemple, réagi Francette Popineau, secrétaire générale du Snuipp-FSU, premier syndicat du primaire, sur RTL. On n'a pas encore compris si on aurait des masques, si les enfants en auraient, comment on mettra en place la distanciation, 15 dans une classe, ça peut être beaucoup... On a le sentiment qu'on se dépêche de donner des gages pour dire que ça va reprendre, mais sans avoir pensé le protocole de reprise."

 Même son de cloche du côté de Stéphane Crochet, du SE-Unsa, sollicité par l'AFP :  "Le ministre donne bien les gages d'une reprise progressive. Mais de nombreuses questions demeurent sur le plan sanitaire. Sur quoi se fonde-t-on, par exemple, pour décider du nombre de 15 élèves par classe ?"

Les réactions politiques ne sont pas moins dubitatives. Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat, s'interroge ainsi sur Twitter :  "Pourquoi les associations de collectivités n’ont-elles pas été consultées alors qu’elles seront en première ligne ? Pourquoi ne pas reprendre de façon différenciée en fonction de la circulation du virus ? Quel protocole sanitaire et quel suivi épidémique ?" Pour Nicolas Dupont-Aignan, député de l'Essonne et Président de Debout la France,"Blanquer cherche à rendre possible l'impossible réouverture des écoles le 11 mai. Foyers de transmission du virus, elles ont été fermées en premier. Le bon sens veut qu'elles soient rouvertes en dernier quand on aura les tests et les masques pour déconfiner le pays".

Interviewé par Roselyne Bachelot sur LCI ce mardi après-midi, Philippe Laurent, maire (UDI) de Sceaux et secrétaire général de l'Association des maires de France, considère, lui, que "le schéma de rentrée en deux semaines proposé par Jean-Michel Blanquer semble très et sans doute trop ambitieux", et qu'"il faut être empirique : première rentrée le 11 mai avec 20% des élèves, évaluation, correction, deuxième vague, etc". 

Enfin, Bastien Lachaud, cadre de LFI et député de Seine-Saint-Denis, juge que le ministre "ne sait toujours pas organiser le déconfinement. Entre annonces vagues et questions renvoyées à plus tard, il parle pour ne rien dire, et se décharge sur les élus locaux et fonctionnaires. Professeurs, parents, élèves attendent toujours..."


Hamza HIZZIR

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