"Un immense gâchis" : le projet de contournement routier de Beynac-et-Cazenac définitivement enterré

Publié le 30 juin 2020 à 13h41, mis à jour le 30 juin 2020 à 14h19

Source : TF1 Info

PATRIMOINE - Le Conseil d'Etat, plus haute juridiction administrative, a jugé irrecevable le pourvoi du département de Dordogne, scellant la victoire des défenseurs de l’environnement et du patrimoine. Il n'y aura donc pas de contournement routier à Beynac-et-Cazenac.

"Quand les Périgourdins ont été consultés sur ce projet, par trois fois, ils l’ont rejeté. Donc le projet n’aurait jamais dû commencer." "On ne peut gaspiller l’argent comme ça en France." "Ils auraient dû trouver un terrain d’entente au lieu de se diviser pour arriver à ce résultat qui a gâché beaucoup d’années, d’énergie et d’argent." Le Conseil d'Etat a mis fin lundi à la saga judiciaire du contournement routier de Beynac-et-Cazenac (Dordogne), l'épilogue d'une querelle mêlant élus, riverains, écologistes et autres défenseurs du patrimoine.

Jugeant irrecevable le pourvoi du département, promoteur de ce projet qui divise les habitants depuis près de 30 ans, la plus haute juridiction administrative a estimé que les arguments avancés par son président, le socialiste Germinal Peiro, n'étaient pas admissibles. "C’est un énorme gâchis", commente au micro de TF1 le maire de Beynac-et-Cazenac, Serge Parre, qui y était favorable.

Les constructions vont être démolies

Ce projet controversé de rocade de contournement de 3,2 km, pour un coût de 32 millions d'euros, devait permettre, selon ses promoteurs, de réduire la circulation routière dans un village touristique de 550 âmes, très fréquenté l'été et situé au pied d'une forteresse classée du XIIe. Les travaux avaient débuté en février 2018 avant d'être stoppés net un peu moins d'an plus tard, suite à un arrêt du Conseil d'Etat qui a suspendu l'arrêté préfectoral d'autorisation des travaux.

Ses opposants estimaient qu'il portait atteinte, dans un site classé Natura 2000 et "réserve de biosphère", à l'habitat de plus de 120 espèces - chiroptères, mammifères semi-aquatiques, reptiles ou amphibiens -, dont certaines protégées. Ils déploraient en outre son impact visuel à une vallée parsemée de châteaux historiques. Cela leur avait valu le soutien remarqué de Stéphane Bern. Le "monsieur patrimoine" d'Emmanuel Macron avait notamment dénoncé la destruction partielle d'un vestige gallo-romain, avec l'autorisation de la préfecture locale.

Comme l'avait décidé l'an dernier la cour d'appel administrative, les constructions déjà réalisées devront être démolies. La justice administrative avait estimé, en décembre dernier, que le projet ne répondait pas à une "raison impérative d’intérêt public majeur" et ne pouvait pas déroger à l'interdiction de porter atteinte à des espèces protégées et à leur habitat. Elle avait aussi jugé que des travaux de voirie effectués en 2017 à Beynac rendaient la déviation "moins utile". 

Un gâchis de plus de 40 millions d'euros

La décision du Conseil d’Etat vient donc sceller définitivement la victoire des opposants à ce projet. "Cet aboutissement est une victoire de la population qui, depuis 30 ans, refusait de voir la vallée de la Dordogne défigurée par la circulation routière. C'est aussi une excellente nouvelle pour l’économie touristique du Périgord", se réjouit Kléber Rossillon, l'un des principaux opposants, châtelain local et président d'honneur de l’association Patrimoine Environnement. 

"C'est un scandale absolu", fulmine de son côté Germinal Peiro. Le président du Conseil départemental déplore notamment la pollution atmosphérique et sonore d'un village qui voit passer certains jours d'été "jusqu'à 13.000 véhicules" ou le "gaspillage d'argent public" avec un coût estimé à "15 millions d'euros" pour la démolition en plus des "26 millions déjà dépensés". "L'Etat a décidé de suivre les arguments de quelques grandes fortunes de la vallée. Mais le peuple du Périgord va résister contre les seigneurs !", déplore-t-il.


La rédaction de TF1info

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