Vers l'interdiction du protoxyde d’azote : "Il était temps que le gouvernement prenne ses responsabilités"

Publié le 7 septembre 2020 à 14h18, mis à jour le 7 septembre 2020 à 15h15
Des capsules de protoxyde d'azote jonchant le sol
Des capsules de protoxyde d'azote jonchant le sol - Source : TF1

TÉMOIGNAGE - Le ministre de l'Intérieur a déclaré réfléchir à interdire la vente des gaz hilarants. Un soulagement pour Nadine Grosdidier qui le réclame depuis la mort de son fils, survenue en 2018 après avoir inhalé du "proto".

"Enfin une bonne nouvelle". Sur la page Facebook de l'association Yohan, du nom de son fils décédé en 2018 après avoir inhalé  du protoxyde d’azote, Nadine Grosdidier n'a pas tardé à partager son soulagement en toutes lettres. Dimanche, dans une interview au Parisien, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a en effet détaillé les mesures de lutte contre l'insécurité et les stupéfiants, précisant notamment réfléchir à une "interdiction pure et simple" de la vente des gaz hilarants.

"Il était temps que le gouvernement prenne ses responsabilités", explique à LCI la mère endeuillée, insistant sur le fait que cela devenait "urgent" et rappelant qu'en décembre 2019, le Sénat a adopté à l'unanimité une proposition de loi prévoyant l'interdiction de vente de protoxyde d'azote, un composé chimique faisant l’objet d’un usage détourné par les plus jeunes.

Alors que l'utilisation de ce gaz euphorisant s'est révélée en forte en hausse dès la sortie du confinement, de nombreuses municipalités ont pris des arrêtés tout au long de l'été pour tenter de faire reculer sa consommation chez les jeunes en interdisant la vente aux mineurs des produits contenant cette molécule. C'est ainsi le cas, entre autres, à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), à Compiègne (Oise), à Vincennes (Val-de-Marne),  à Cournon-d'Auvergne (Puy-de-Dôme) ou encore à Carcassonne (Languedoc) et dans Vendin-le-Vieil, Bully-les-Mines, Loison-sous-Lens, Meurchin dans le Nord. 

"J'ai moi-même reçu beaucoup de mails de maires qui prennent des arrêtés, les pauvres, ils ne pouvaient plus rien faire d'autre", explique-t-elle, regrettant que le phénomène "a pris de l'ampleur en deux ans alors que ça aurait pu être évité". Et d'ajouter , stupéfaite : "Je ne pensais pas qu'on en arriverait là, pour certains, c'est par bonbonne entière"

Autre preuve que la tendance va "en montant" : les témoignages qu'elle continue de recevoir. "Il y a la mamie dont la petite-fille est en cure, l'autre dont la petite fille consomme une centaine de cartouches par jour, mais aussi un père de famille qui se retrouve paralysé ", soupire-t-elle, "preuve que ça ne concerne pas que les jeunes".

Estimant que la situation actuelle s'apparente à de la "non-assistance à personne en danger", Nadine Grosdidier attend désormais une chose : "Que l'adoption d'une loi aille vite étant donné l'urgence sanitaire (...) pour ces parents et pour ces jeunes qui se mettent en danger."

Celle qui a fait de la prévention une mission au quotidien depuis la mort de son fils, "à sa petite échelle" précise-t-elle, compte tourner une page une fois le texte de loi adopté. "Mon rôle s’arrêtera là", annonce-t-elle. "Après la mort de Yohan, ça me mettait en colère de voir que rien n'était fait. 'Que fait le gouvernement ?', je me répétais. (...) Je n'avais plus rien à perdre, je me devais de faire quelque chose pour prévenir car beaucoup de parents, comme nous à l'époque, ne savent pas que ça existe, on a beaucoup de retours de parents qui n'en reviennent pas", détaille-t-elle.

Pour rappel, le 9 juillet dernier, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) alertait sur les dangers de l'inhalation du protoxyde d'azote à l'origine vendu pour les siphons à chantilly mais qui, lorsqu'il est inhalé pour ses effets euphorisants, peut provoquer une asphyxie par manque d'oxygène pouvant entraîner la mort, un risque de chute ou encore des brûlures liées au froid du gaz. À usage régulier, des effets secondaires sont relevés comme des pertes de mémoire, des troubles de l’érection, de l’humeur, du rythme cardiaque et des hallucinations visuelles…

"Ce n'est pas dit que dans dix ans, on ne voie pas apparaître d'autres problèmes", s’inquiète encore Nadine Grosdidier au sujet de ces "lésions irréversibles". Et cette dernière d'insister sur l'importance et l'urgence d'apposer, toujours à titre préventif, une signalétique sur les produits concernés, y compris les dérivés comme le nettoyant pour clavier d'ordinateur qui, détourné de son usage, a coûté la vie de son fils il y a deux ans.


Audrey LE GUELLEC

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