Approximations, contre-vérités : on a vérifié les arguments entendus lors de la Grande confrontation

Publié le 9 décembre 2020 à 16h10, mis à jour le 9 décembre 2020 à 19h03

Source : TF1 Info

FACT CHECK - Lors de la "Grande confrontation" diffusée ce mardi sur LCI, plusieurs profils ont interrogé le ministre de la Santé, parfois en faisant des erreurs, des approximations ou directement en diffusant des fausses informations. Nous avons passé aux cribles certains arguments.

Une psychologue retraitée, une fonctionnaire de l'Éducation nationale, un infirmier à l'AP-HP, une attachée de presse et un écrivain. Les profils présents sur le plateau de LCI lors de la Grande confrontation étaient divers et variés. Mardi 8 décembre, ils ont confronté le ministre de la Santé à leurs craintes, leurs questionnements et leurs doutes. Face à Olivier Véran, chacun est venu avec ses arguments, qui étaient parfois fallacieux.

Des soignants plus récalcitrants à se faire soigner ?

C'est Martine Gruère qui a ouvert le bal. Retraitée de 75 ans, elle fait partie des publics prioritaires à la vaccination. Si elle n'est pas complètement réticente à cette méthode, elle a voulu savoir pourquoi le personnel soignant n'était pas le premier à se faire vacciner. Cette ancienne psychologue a tenu à souligner que "les soignants sont souvent plus réticents que la majorité de la population" à se faire vacciner. Une affirmation qui ne va pas dans le sens des dernières données disponibles à ce sujet. Selon une étude de Santé publique France, publiées en novembre 2020, seule 53% des personnes interrogées répondaient vouloir "certainement ou probablement se faire vacciner". Or, ce chiffre augmente très fortement chez le personnel soignant. Comme nous vous l'expliquions dans cet article, l'étude relevait que 80% des médecins généralistes et pharmaciens avaient l'intention de se faire vacciner. Un pourcentage qui tombait à 68% chez les professionnels de santé libéraux et 55% chez les infirmiers. C'est tout de même plus que la moyenne nationale.

Un ADN réécrit ?

Une autre invitée était, quant à elle, bien plus réticente au vaccin. Anaïs Lefaucheux, présentée comme critique littéraire, a ainsi regretté face à Olivier Véran que le futur vaccin contre le Covid-19 vienne "modifier l'ADN", reprenant à son compte une fausse information largement diffusée sur les réseaux sociaux. Des messages alarmistes assurent en effet depuis quelques jours que les vaccins utilisant la technologie "à ARNm" sont dangereux car ils contribueraient à modifier nos gènes de manière irréversible : "Personne ne pourra ensuite corriger cette anomalie génétique jusqu'à la fin de vos jours et vous la transmettrez à votre descendance", croit ainsi savoir un internaute. Des thèses formellement contestées par les scientifiques spécialistes de ces questions, comme l'a rappelé le ministre de la Santé sur le plateau, avant de préciser le fonctionnement de cette nouvelle méthode : "On ne vous injecte pas de maladie, ni de virus [...]. On n'injecte qu'un brin d'ARN, il n'intègre pas le génome humain, il ne rentre pas du tout dans l'ADN humain". 

Des précisions qui n'ont pas satisfait cette critique littéraire, sympathisante de François Asselineau, qui a poursuivi en faisant référence à un  vaccin utilisant la "technologie OGM", provoquant l'étonnement de son interlocuteur. Et à raison. Elle a fait une confusion entre différents vaccins, comme vous pouvez le lire dans cet article

Un calendrier trop rapide pour être honnête ?

Enfin, cette invitée a également partagé ses craintes face à la rapidité des laboratoires pour sortir un vaccin contre le coronavirus, sachant qu'en théorie, il faut près de dix ans pour mettre au point un vaccin. On expliquait déjà ici comment ces résultats, certes jamais vus auparavant, avaient été obtenus grâce à une multitude de facteurs (une collaboration internationale jamais vue, des calendriers revus, etc.). Si une grande partie des arguments utilisés sont trompeurs, et malgré les efforts du ministre de la Santé, Anaïs Lefaucheux a conclu en fin d'émission qu'elle ne se vaccinera pas. Lançant qu'elle préfèrera prendre "du zinc et de la vitamine D". Une méthode qui fait référence à la technique notamment utilisée au Royaume-Uni. Et dont les données ne montrent pas pour le moment des bienfaits particuliers.

"Une affaire de gros sous" ?

Au-delà des technologies utilisées par ces nouveaux vaccins, le ministre de la Santé a également dû répondre aux inquiétudes qu'avaient les invités concernant les contrats signés entre l'Union européenne et les laboratoires. À la première question de savoir s'il y avait une affaire de "gros sous" qui prendrait le dessus sur le reste, Olivier Véran a écarté cette critique. Il a rappelé que "la vaccination va coûter moins cher au pays que peut-être deux ou trois jours de fermeture des commerces. Ce n'est pas une affaire de gros sous". Et qu'en est-il des clauses présentes dans ces contrats qui lient le gouvernement aux laboratoires, et qui les déchargeraient de leur responsabilité ? Comme nous vous l'expliquions dès la fin septembre, ce n'est "ni vrai ni faux", pour reprendre les termes du ministre. C'est en fait un "dispositif courant quand on est dans un produit issu de la recherche". Ainsi, les instances européennes se sont notamment engagées à apporter des garanties pour épauler lesdits laboratoires, dans l'hypothèse où des indemnisations devaient être prononcées dans les mois ou années à venir. 

REPORTAGE - Les scientifiques répondent aux doutes sur les vaccins anti-CovidSource : JT 20h WE

300.000 à 400.000 de sacrifiés ?

Enfin, le ministre de la Santé a débattu avec Alexandre Jardin. Devenu l'une des voix contestataires des mesures gouvernementales, notamment celle de la fermeture des commerces, il a regretté que soit actuellement "injectée une très forte dose de peur" dans la société. L'écrivain a développé sa vision des choses, à savoir "apprendre à vivre durablement avec le virus en acceptant en partie la mort". Une stratégie fataliste que refuse le ministre de la Santé. Assumant sa gestion de l'épidémie, il l'a défendue en estimant que la société ne se remettrait pas de "sacrifier" "300.000 ou 400.000 d'entre nous". Un chiffre qui peut paraitre alarmiste. Utilisé auparavant par Emmanuel Macron, il est en fait le fruit de modélisations réalisées par l'Institut Pasteur. Les chercheurs de la fondation française concluaient en effet en septembre denier "qu’en absence d'amélioration significative de la prise en charge des patients, et sur la base des taux de mortalité publiés pour des populations de structure d’âge similaire à celle de la France, on pouvait s’attendre à une mortalité totale de 100,000 à 450,000 personnes avant d'atteindre une immunité collective de 50%".

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Felicia SIDERIS

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