Cancer : le tabou persiste en entreprise

Publié le 17 avril 2014 à 17h31
Cancer : le tabou persiste en entreprise

SANTE - La dernière enquête de la Ligue contre le cancer révèle que les patients actifs professionnellement seront forcément confrontés à la difficulté de devoir conjuguer maladie et travail. Car trop souvent encore, ils se retrouvent pénalisés à cause d'un manque d'anticipation de la part de leur entreprise.

Double peine. Etre malade du cancer, ce n'est pas seulement la souffrance et la lourdeur des traitements, c'est aussi la difficulté accrue de conjuguer vie privée et vie professionnelle. Selon la Ligue contre le cancer, c'est même impossible , affirme-t-elle dans le 3e rapport de l’Observatoire sociétal des cancers. Si les conséquences économiques de cette maladie pour les patients et leur entourage sont connues, cette nouvelle édition met en avant l’impact de la maladie sur le parcours professionnel. Faut-il parler de son cancer sur son lieu de travail ? L’annonce de la maladie modifie-t-elle les relations avec l’employeur et les collègues ? Autant de questions explorées via cette enquête .

Cette dernière souligne que trois personnes sur dix qui étaient en emploi effectif au moment du diagnostic ne le sont plus deux ans après. "On peut y trouver plusieurs raisons. Soit le malade prend sa retraite, soit il souhaite changer de vie. Mais dans la plupart des cas, ce sont des personnes pour qui tout n'a pas été mis en place pour faciliter leur retour dans l'entreprise", explique à metronews Emmanuel Jammes, membre de la Ligue et coordinateur du rapport. En outre, 11 % des sondés qui étaient en activité s’estiment pénalisés professionnellement à cause de cette situation.

Des mesures d'aide encore peu appliquées

Les salariés, qu'ils soient malades ou en bonne santé, s'accordent à dire qu'il est difficile d'en parler autour de soi. Il s'agit en effet d'un sujet tabou pour 63 % des personnes ayant ou ayant eu un cancer et pour 57 % des employés n’ayant pas été confrontés à la maladie. Seuls les chefs d'entreprise n'ont pas cette impression, puisque 92 % d'entre eux ne le pensent pas. Ces derniers, justement, estiment faire tout le nécessaire pour aider le maintien dans l’emploi : 79 % d’entre eux déclarent avoir fait bénéficier de mesures spécifiques  pour aider un salarié atteint de cancer .

Car le retour dans le monde professionnel est un moment très attendu par de nombreux patients, qui y voient un signe du retour à une vie normale. Aménagement des horaires, réduction du temps de travail, télétravail… tous ces dispositifs peuvent leur être proposés à cette occasion. Mais pour les salariés interrogés, la situation est bien différente : un malade sur trois déclare n’avoir bénéficié d’aucune de ces mesures et un salarié sur deux estime même avoir connu des répercussions sur sa situation professionnelle, y compris se voir imposer un travail moins intéressant.

"Une double peine"

A la place, certains chefs d'entreprise préfèrent même changer l’organisation globale de l’entreprise. 47 % d'entre eux déclarent avoir pris une autre personne en contrat temporaire, quand 39 % ont réparti la charge de travail entre les autres salariés. "Oui, ces personnes peuvent avoir des séquelles comme de la fatigue. Mais c'est dommage que les entreprises n'anticipent pas mieux leur retour parce qu'elles peuvent se sentir stigmatisées et cela va être vécu comme une seconde peine pour eux. Il faut mieux anticiper la reprise avec le concours du médecin du travail", ajoute Emmanuel Jammes.

Cette situation peut se répercuter sur la vie privée. Car bien que le cancer soit pris en charge dans le cadre des affections de longue durée (ALD), les patients n’arrivent souvent plus à financer le quotidien. Le troisième plan cancer , présenté en février 2014, doit justement mettre l'accent sur la vie après la maladie. Il y a urgence, car chaque année près de 350 000 personnes sont touchées par un cancer, dont 100 000 salariés. Une situation qui, avec le recul de l’âge de la retraite et l’augmentation des diagnostics, risque d’être de plus en plus fréquente.


La rédaction de TF1info

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